350 usines de fabrication de sacs en plastique à l’arrêt et 50.000 emplois perdus
Au lieu de s’attaquer à la racine du mal, le gouvernement préfère tuer le malade
«La région de Tit Mellil est devenue une région fantôme». C’est l’amer constat qu’a dressé Abdelaziz Derouich, membre de la Coordination nationale des professionnels du secteur du plastique lors d’une conférence de presse organisée mardi après-midi à Casablanca.
Selon lui, en adoptant à la hâte la loi 77/15 relative à l’interdiction de la fabrication, de l’importation, de l’exportation, de la commercialisation et de l’utilisation des sacs en matière plastique, le gouvernement Benkirane a condamné à mort le secteur et, par ricochet, la région de Tit Mellil qui abritait la majeure partie des unités de fabrication de ces produits. «Ce ne sont pas les industriels ou les employés qui sont lésés par cette loi, mais également les propriétaires des cafés, les transporteurs et tous ceux qui tirent profit de cette industrie», a-t-il déclaré en précisant que, selon les estimations de la Coordination nationale, plus de 50.000 postes de travail ont été perdus à cause de cette loi qui est entrée en vigueur au début de ce mois.
Abdelaziz Derouich a également souligné qu’au lieu de s’attaquer au problème de la collecte des déchets et des sacs de plastique, l’Exécutif a préféré la solution la plus contre-indiquée, à savoir la mise à mort de tout un secteur. «C’est comme si, au lieu de s’attaquer à la racine du mal, un médecin décidait de tuer le malade lui-même», a-t-il ironisé.
Pour sa part, Mohamed Abarat, coordinateur de la Commission nationale du secteur du plastique, a critiqué l’empressement du gouvernement à faire adopter cette loi (en moins de 6 mois seulement), l’exhortant à la mettre en application par étapes sur une durée de 5 ans au moins pour que les professionnels puissent résoudre leurs problèmes et payer leurs dettes.
Selon lui, tous les appels de la Coordination au dialogue ont buté sur le niet du gouvernement. Il a affirmé en substance que la Coordination avait programmé récemment une réunion avec le chef du gouvernement lui-même pour débattre de la situation du secteur, mais à la dernière minute, ce dernier s’est excusé et en a demandé l’ajournement, mais «jusqu’à maintenant, on attend encore».
Aziz Boudi, également membre de la Coordination, a appelé les responsables gouvernementaux à ouvrir le dialogue avec les professionnels du secteur pour trouver des alternatives et des solutions afin de préserver l’emploi de milliers des Marocains. Après avoir indiqué que cette loi est improvisée et que les responsables n’ont pas de vision prospective, il a précisé que, non seulement elle a eu des répercussions négatives sur les professionnels et les industriels, mais également sur les commerçants et, particulièrement, ceux d’entre eux qui officient dans les quartiers populaires et qui sont désorientés et «souffrent en silence car ce sont eux qui sont en contact direct avec les citoyens et les consommateurs».
Pour sa part, Mohamed Debbaghi a fustigé le gouvernement qui n’a pas prévu, préalablement à la mise en application de cette loi, d’alternative aux sacs plastiques et condamné la campagne publicitaire diffusée sur les médias. Laquelle induit en erreur les Marocains en présentant certains sacs comme étant en tissu, alors que la vérité est autre puisqu’ils sont, en réalité, des sacs en plastique. «La honte, poursuit-il, c’est que l’Etat arrête la production des sacs en plastique par 350 usines, et autorise une seule à fabriquer ces sacs». Il a, en outre, affirmé qu’en France, l’Etat et les professionnels débattent en vain de ce problème depuis 2000 afin de trouver une alternative aux sacs en plastique, tout soulignant que la Coordination a des alternatives et qu’elle est prête à les présenter aux responsables gouvernementaux s’il ont réellement la volonté de trouver une solution à ce problème social.
La Coordination nationale a, pour rappel, organisé plusieurs sit-in à Rabat et Casablanca et compte organiser, ce jeudi, une marche depuis le siège du ministère de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique jusqu’au Parlement.
Il convient de rappeler également que le Premier secrétaire de l’USFP, Driss Lachguar, avait récemment mis en garde, à Tit Mellil, contre les répercussions de la mise en application de la loi 77/15.
La parti de la Rose avait également organisé, en collaboration avec la Coordination nationale du secteur du plastique, une journée d’étude à Rabat au cours de laquelle le dirigeant ittihadi avait précisé que l’USFP n’était pas hostile à la restructuration du secteur ou à la mise en place de lois permettant de hisser le pays au rang des nations développées, mais qu’il était plutôt opposé à la méthode adoptée par le gouvernement pour la mise en application de la loi 77/15.
Le 27 Juillet 2016
SOURCE WEB Par Libération
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