#Maroc : RÉFORME DU CODE DE LA FAMILLE LES ATTENTES POUR 2023 de Soumaya Naamane Guessous

Nous allions terminer l’année 2022 sur une note négative. Mais nous avons été sauvés par nos Lions de l’Atlas, qui nous ont inondés de joie.
L’année 2022 a été pénible. Une petite reprise de l’économie après la pandémie, mais une sévère sécheresse faisant suite à quatre années de faible pluviométrie. La guerre en Ukraine et ses effets sur l’économie mondiale, la hausse des prix de l’énergie et des carburants, la chute du pouvoir d’achat et la hausse du niveau de vie.
Espérons que cette nouvelle année nous procure santé et sérénité, dans un univers de paix… et la réforme du Code de la Famille.
Les femmes constituent la moitié de la population : au Maroc, il y a une femme pour chaque homme. J’entends toujours dire que pour chaque homme, il y a quatre, cinq, dix femmes! Ce qui justifie la polygamie et la drague sauvage.
Il est normal que cette moitié de la population bénéficie des mêmes droits que les hommes, d’autant qu’elle contribue amplement au développement du pays.
Quels sont les grands chantiers de cette réforme?
La polygamie : elle est soumise à l’autorisation du juge. Le demandeur doit justifier d’un motif exceptionnel et de ressources financières suffisantes pour deux foyers. Souvent, le mari avance comme raison l’insatisfaction sexuelle !
La polygamie concerne moins de 2% des foyers marocains, mais c’est une menace pour les femmes, dont certaines apprennent que le mari a un autre foyer lorsqu’il meurt.
Beaucoup d’hommes fraudent en se procurant des attestations de résidence dans des villes autres que celles où ils vivent et obtiennent des certificats de célibat.
Il y a aussi des failles dans la loi : l’autorisation remise par le juge ne comprend pas le nom de la seconde épouse ! Des hommes se sont remariés plusieurs fois en utilisant ce document ! Une fraude bientôt impossible : le ministère de la Justice lance une plateforme digitale qui renseignera sur la situation matrimoniale des citoyens.
Mariage des mineurs : une mineure doit être scolarisée ou en formation pour assurer son autonomie. L’âge légal du mariage est 18 ans. Mais les juges peuvent octroyer une dérogation avec des conditions qui sont rarement respectées. En 2020, sur 20.000 demandes de dérogation, 13.333 ont été accordées !
Le viol conjugal : la loi pénalise tout viol commis par un homme sur une femme, mais pas sur l’épouse. Le viol conjugal existe. C’est la pire des violences conjugales.
La tutelle : la majorité des mères divorcées ont la garde des enfants. Mais jamais la tutelle qui revient de droit au père !
La mère ne peut changer d’école à l’enfant, demander un visa ou lui faire subir une opération chirurgicale. Elle peut lui ouvrir un compte bancaire, l’approvisionner, mais c’est le père qui le gère. C’est au père que reviennent toutes les décisions. Il peut même désigner un autre tuteur que lui.
Garde des enfants et remariage des mères : la mère peut perdre la garde de ses enfants si elle se remarie. Quand ils atteignent 7 ans, le père peut récupérer leur garde. L’enfant est arraché à sa mère et remis à la belle-mère ! De nombreuses femmes sont ainsi privées de remariage.
L’enfant illégitime : « La filiation illégitime ne produit aucun des effets de la filiation parentale légitime vis-à-vis du père » (art. 148). L’Etat ne peut continuer à cautionner la marginalisation de l’enfant illégitime. Le test ADN doit responsabiliser les pères vis-à-vis de leurs enfants nés hors mariage. Sans identité, il y a risque de relations sexuelles et de mariages incestueux.
Ta’cib, héritage par agnation : l’islam a permis aux femmes d’hériter. Il a recommandé aux hommes de les prendre en charge financièrement. 14 siècles plus tard, le contexte a changé: les femmes contribuent grandement aux budgets familiaux et conjugaux. Ta’cib a été établi par des religieux et non par le Coran : une femme ne peut hériter seule sans qu’on lui colle au moins un homme. Que de veufs, de veuves et leurs enfants chassés de leur domicile, par le tribunal, pour donner aux héritiers leurs parts… au nom de l’islam qui n’a jamais cautionné ces cruautés!
Reconnaissance du travail domestique des épouses : une épouse sans emploi, gérant le foyer et les enfants, libère le mari et lui permet de travailler en toute quiétude. Après des années de sacrifices, si elle divorce, elle se retrouve démunie. Si le mari a acquis des biens, il en est l’unique propriétaire car la femme ne travaille pas. Le travail de l’épouse doit être valorisé, surtout en cas de divorce.
A part le Code de la famille, une autre discrimination devrait impérativement être enrayée, à savoir le témoignage des femmes qui est irrecevable. Juge, procureur du Roi, colonel, médecin… elles valent 12 témoins. Mais hors du travail, elles ne témoignent pas!
Le Coran ne précise pas le sexe du témoin. La seule distinction concerne les transactions financières (S 2 : 282): un homme ou deux femmes «en sorte que si l’une d’elles s’égare, l’autre puisse lui rappeler».
Il y a 14 siècles, les femmes étaient inexpérimentées en commerce. Aujourd’hui, notre ministre de l’Economie et des finances est une femme!
Le Coran parle de témoins sans distinction de sexe (S 24 : 6-9). Le Prophète a dit: «Les femmes sont égales aux hommes au regard de la loi».
Selon At-Tabari (exégète du IXe siècle), il n’y a aucune preuve en islam pour exclure la femme du témoignage.
Lors d’un discours, le Monarque a demandé aux parties concernées de réformer les lois, soulignant que «quand les femmes accèdent pleinement à leurs droits, elles ne portent aucun préjudice aux hommes» (30 juillet 2022).
Adapter les lois au contexte actuel et aux nouveaux profils des femmes, des hommes et des familles permet de briser les obstacles au développement de notre pays.
Le 6 janvier 2023
Source web par : le360
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