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Maroc-UE: la Commission européenne propose d'étendre les accords agricoles au Sahara

Maroc-UE: la Commission européenne propose d'étendre les accords agricoles au Sahara

Il y a cinq mois, la Cour de justice de l’UE jugeait que "les accords d’association et de libéralisation conclus entre l’UE et le Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental". Mais les protocoles agricoles pourraient être amendés, en fonction du mandat de négociation qui est actuellement dans les couloirs de Bruxelles.

L'ébauche de mandat de négociation qui sera accordé à la Commission européenne sur les protocoles agricoles de l'accord entre le Maroc et l'Union européenne (UE) sera soumise le 24 mai au Comité des représentants permanents (Coreper) de l'UE, qui regroupe les ambassadeurs de chacun des États membres. "Normalement, le projet de mandat de négociation devrait être adopté aux vues des discussions préalables qui ont déjà eu lieu", analyse une source au sein du Service européen pour l'action extérieure (EEAS).

Ce texte devra ensuite passer devant le Conseil des ministres de l'UE afin d'être approuvé. "Cela pourrait se faire dès le 29 mai", précise la même source qui rappelle que l'ébauche doit ensuite passer devant le parlement européen. Ce mandat de négociation fixe les conditions et le contenu des discussions à venir entre l'UE et le Maroc pour amender les protocoles agricoles de l'accord d'association entre les deux parties.

Genèse du mandat de négociation

Tout part de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 21 décembre 2016 qui dispose que "les accords d’association et de libéralisation conclus entre l’UE et le Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental". L’application de l’accord agricole Maroc-UE aux provinces du Sud devient donc "contraire au principe de droit international". Le mandat de négociation est donc la conséquence logique de l'orientation politique annoncée par Federica Mogherini, vice-présidente de la Commission européenne et haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères, à plusieurs reprises.

Le 7 février, Nasser Bourita, alors ministre délégué aux Affaires étrangères, et Federica Mogherini se sont rencontrés à Bruxelles pour réaffirmer "l'importance stratégique des relations" entre l'Union européenne et le Maroc. La position des deux parties est claire: résoudre le problème causé par l'arrêt de la Cour en faisant en sorte d'étendre les préférences tarifaires au Sahara au sein des protocoles agricoles. Pour ce faire, un mandat de négociation doit être adopté.

Des réunions de travail ont déjà eu lieu, depuis l'annonce du binôme. Une délégation de la Commission européenne s'est notamment rendue à Rabat le 1er mars pour une "discussion technique" avec la partie marocaine en vue de "sauvegarder les accords qui lient le Maroc à l’Union européenne". La première réunion du genre s'est tenue le 13 février à Bruxelles.

Contenu du mandat de négociation

Le mandat de négociation a été proposé le 19 avril par la Commission européenne au Conseil de l'UE. Les ministres des États membres en ont donc discuté, afin de fixer les règles et le contenu des futures négociations. Si quelques États membres, notamment les Pays-Bas, le Danemark et la Suède, ont émis quelques réticences, le mandat a été accepté la semaine dernière. Il poursuit son chemin ce mercredi 24 mai au Coreper. Il devrait normalement passer devant le Conseil de l'UE à la fin du mois.

Difficile d'obtenir des déclarations officielles tant que le processus n'est pas achevé. Selon plusieurs sources à l'UE ayant requis l'anonymat, le mandat de négociation mentionne l'extension des préférences tarifaires aux produits du Sahara (les tomates, le poisson ou le phosphate), en indiquant formellement que les dispositions s'appliquent à ce territoire. Le mandat précise qu'il faut s'assurer d'avoir l'accord de la population du Sahara qui doit être consultée, et mettre en place un mécanisme de suivi qui montre que les protocoles agricoles bénéficient aux populations locales. Toutefois, ce contenu du mandat de négociation est déjà vivement critiqué par des parlementaires européens qui dénoncent notamment le "mélange entre peuple et population du Sahara occidental".

L'épreuve du parlement

Une éventuelle complication donc pour le Parlement européen qui va devoir voter le mandat de négociation définitif qui sortira du Conseil de l'UE. À noter que cette institution parlementaire s'était affirmée pour la première fois sur les questions internationales en retoquant l'accord de pêche avec le Maroc.

Dès le 30 mai, un groupe de suivi composé de députés membres de la commission commerce discutera des premiers éléments donnés par la Commission de l'UE. "Les parlementaires échangeront avec la commission sur l’état des lieux des négociations. Le produit final ne sera pas une surprise pour le parlement quand il le recevra", nous indique une source au parlement européen. Un travail politique qui s'annonce compliqué, alors qu'un groupe de 23 parlementaires a adressé une lettre, à l'initiative de Florent Marcellesi du parti Equo (parti écologiste espagnol), à Federica Mogherini, Pierre Moscovici et Cecilia Malmström le 16 mai, dont Telquel.ma détient une copie. À partir d'éléments obtenus auprès de "plusieurs sources diplomatiques et institutionnelles", ces députés déduisent que par ce mandat d'arrêt de négociation, "le plan de la Commission consisterait à chercher à contourner l'arrêt de la CJUE". "Sans avoir vu le mandat, nous avons eu la confirmation de la Commission, qu'elle ne compte négocier qu’avec la partie marocaine et non pas avec le Front Polisario", reproche par exemple une source au Parlement.

Si cette lettre n'est pas une surprise alors que les parlementaires "pro-Polisario" font du lobbying au Parlement depuis longtemps, l'organe législatif est aussi composé de députés qui voient le Maroc comme un pays stable de la région, notamment sur les questions de coopération économique, mais aussi celles qui touchent à l'aspect sécuritaire et migratoire.

Le 24 Mai 2017

SOURCE WEB Par Telquel

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