Sahara/Accord agricole: le Maroc menace de mettre un terme au partenariat économique avec l’UE
Tôt ce lundi 6 février, le Maroc a adressé une mise en garde à peine voilée à l’Union européenne. Cette mise en garde a pris la forme d’un communiqué du ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime.
Le Maroc est excédé, nous rapporte une source informée qui suit le dossier. "L'Union Européenne a signé un accord (l'accord agricole avec le Maroc), elle doit l'assumer et le défendre. La position de la Commission européenne n'est pas claire. Ou bien l'UE nous veut en entier, Sahara compris, ou bien on s'en va. La Commission européenne n'a pas à utliser les attendus d'un arrêté. Elle doit aller vers l'arrêté lui même. Nous ne sommes pas partie à la procédure et rien ne nous est opposable", explique notre source. La région saharienne doit-elle être explicitement mentionnée dans l’accord agricole Maroc-UE pour que celui-ci y soit appliqué?
Cette question, née de l’arrêt de la Cour de justice européenne du 21 décembre dernier, va occuper l’actualité pendant les prochaines semaines.
Dans tous les cas, le Maroc n’acceptera pas, quelles que puissent être les conséquences, une remise en cause de la validité de l’application de l’accord agricole sur la totalité du Royaume, y compris le Sahara.
Le 21 décembre 2016, la Cour de justice européenne annulait un précédent arrêt qui lui-même, une année plus tôt, annulait l’accord agricole Maroc-UE.
Ce qu’a dit la Cour européenne le 21-12-2016:
La Cour dit que la région du Sahara doit être explicitement mentionnée pour être couverte par l’accord agricole. Et n’a pas dit que du fait du statut du territoire, un tel accord ne peut pas être signé.
Rien dans le texte n’empêche ni ne conteste la validité juridique ou la légitimité politique d’un accord agricole englobant le Sahara.
Le Maroc n’était pas partie à la procédure devant la Cour européenne.
Pour le Maroc, l’inclusion ou non du Sahara dans les anciens ou futurs accords, d’une manière explicite, “ne peut émaner que d’un attribut de souveraineté“. Autrement dit, le Maroc agira comme il agit avec toute région marocaine. Le Maroc n’est pas tenu par l’arrêt rendu, il n’était pas partie dans l’affaire.
Le 21 décembre 2016, jour où l’arrêt a été rendu, le Maroc et l’UE avaient publié un communiqué conjoint et tenté de parler de la même voix.
Tôt dans la journée, il y avait eu une déclaration conjointe maroco-européenne. De même, une déclaration du Quai d’Orsay qui était plus explicite et d’une parfaite clarté: non seulement la France a soutenu le recours du Conseil de l’UE et exprimé sa volonté de développer le partenariat avec le Maroc, y compris dans le domaine agricole, mais en plus, elle soutient le processus onusien et le plan d’autonomie marocain. On ne saurait être plus explicite.
Voici le texte intégral du communiqué publié ce lundi 6 février par le ministère marocain de l’Agriculture et de la Pêche maritime.
"Le Maroc et l’Union européenne sont liés par un accord agricole dont l’application est effective sur le territoire du Royaume du Maroc, et ce, malgré un épisode judiciaire qui a, en toute logique, confirmé le protocole agricole entre le Maroc et l’Union européenne.
“Ainsi, celui-ci doit désormais s’appliquer conformément à l’esprit qui a présidé à sa négociation et sa conclusion", souligne le communiqué, ajoutant que l’Union européenne doit assurer le cadre nécessaire pour l’application des dispositions de cet accord dans les meilleures conditions.
“La Commission européenne ainsi que le Conseil européen ont la responsabilité de neutraliser les tentatives de perturbation par des positions et un discours clairs et cohérents avec des décisions que ces instances ont, elles-mêmes, portées et adoptées“, note le ministère.
Le Maroc et l’Union européenne partagent une riche expérience de coopération, relève la même source, ajoutant que "l’accord agricole et de la pêche en compte parmi les exemples les plus réussis et il est primordial de le préserver au risque de déclencher de lourdes conséquences au plan socio-économique, dont l’UE assumera l’entière responsabilité".
Le ministère indique que "toute entrave à l’application de cet accord est une atteinte directe à des milliers d’emplois d’un côté comme de l’autre dans des secteurs extrêmement sensibles ainsi qu’un véritable risque de reprise des flux migratoires que le Maroc, au gré d’un effort soutenu, a réussi à gérer et à contenir".
Le Maroc a conduit une politique volontariste et fortement engagée dans le secteur agricole pour œuvrer à la stabilité des populations et leur sécurité alimentaire à travers une expérience reconnue au niveau du continent, fait valoir le communiqué, soulignant que le Royaume "reste déterminé à poursuivre cette politique de soutien à l’essor d'une agriculture africaine performante à travers l'assistance technique, l’accès aux engrais et l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire".
Le Maroc menace de se tourner vers la Russie, la Chine, le Japon…
"Les actes visant à dresser des obstacles devant l'entrée des produits marocains sur les marchés européens doivent être sanctionnés et traités avec la plus grande fermeté de la part de notre partenaire européen", affirme le communiqué, notant que de "telles nuisances mettent en péril un édifice de coopération construit sur de nombreuses années ne laissant de choix au Maroc que de s’en détourner au profit d’une accélération de partenariats initiés dans des pays et régions diverses notamment la Russie, la Chine, l’Inde, le Japon, les pays du Golfe ainsi qu’auprès de nos voisins africains".
Le Maroc prêt à se défaire sans retour du partenariat économique avec l’Europe
Et de souligner que "l’absence d'un engagement franc de la part de l'UE imposera au Maroc un choix décisif où il sera question de préserver un partenariat économique patiemment entretenu ou de s'en défaire sans retour pour se focaliser sur la construction de nouvelles relations et circuits commerciaux".
"Le Maroc s'inscrit dans une démarche constructive avec son partenaire historique. Il est, toutefois, nécessaire que l’Union européenne veille à la préservation de ses relations avec un pays qui a démontré sa fiabilité en tant que partenaire et ce, dans un cadre global où les échanges commerciaux dans les secteurs agricole et de la pêche sont une partie d'un tout", conclut le ministère.
Voici les liens pour lire et décrypter les réactions les plus significatives:
Le communiqué du ministère marocain de l’Agriculture.
Le communiqué du Quai d’Orsay.
Le ministère marocain des Affaires étrangères :
“Le Maroc est pleinement confiant que l’UE continuera à respecter ses engagements et à honorer toutes ses obligations découlant de l’Accord agricole.
“Dans ce contexte, le Royaume du Maroc, fort de son droit, est disposé à poursuivre la discussion avec ses partenaires européens, dans le cadre des structures du partenariat Maroc-UE", poursuit le communiqué.
La déclaration conjointe Maroc-UE:
"La décision du Conseil de l’UE portant sur la mise en œuvre de l’Accord agricole UE-Maroc demeure à ce titre en vigueur", souligne la même source, ajoutant que "les deux parties examinent toutes les implications possibles du jugement de la Cour et travailleront de concert sur toute question ayant trait à son application, dans l’esprit du partenariat privilégié UE-Maroc et des mécanismes prévus à cet égard".
"Les deux parties confirment la vitalité de ce partenariat privilégié et entendent travailler activement à son développement dans tous les domaines d’intérêt mutuel", conclut la déclaration commune.
Les 5 clés pour analyser l'arrêt de la Cour européenne de justice.
Le 06 Février 2017
SOURCE WEB Par  Médias 24
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