Facebook et Instagram bientôt indisponibles en Europe? La menace de Zuckerberg pour faire pression sur Bruxelles et Washington
A cause d’un litige concernant le transfert des données d’utilisateurs européens vers les Etats-Unis, Mark Zuckerberg laisse entendre qu’il pourrait suspendre les activités des deux réseaux sociaux dans le Vieux Continent. Une menace brandie depuis 2020.
Coup de bluff ou réelle menace ? Dans son rapport annuel à l’US Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité de contrôle des marchés financiers aux Etats-Unis, le groupe Meta laisse entendre qu’il pourrait fermer Facebook et Instagram en Europe. L’entreprise de Mark Zuckerberg souhaiterait pouvoir stocker librement les données personnelles de ses utilisateurs européens aux Etats-Unis. Mais depuis deux ans ses ambitions sont contrariées par la législation de l’Union européenne en la matière, bien moins permissive que celle américaine.
Dans son rapport auprès de la SEC, l’entreprise qui s’est rebaptisée en octobre pointe notamment l’invalidation par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du Privacy Shield, survenue en juillet 2020. Cet accord entre l’Union européenne et les Etats-Unis concernant le droit de la protection des données personnelles avait été négocié entre 2015 et 2016, soit avant l’entrée en vigueur en 2018 du Règlement général sur la protection des données (RGPD). Le jugement de la CJUE décrétait donc que le Privacy Shield n’offrait plus une protection adéquate aux utilisateurs européens des services de Meta.
Déjà à l’époque l’entreprise avait menacé de restreindre ses activités en Europe du fait de cette décision. Il s’agissait surtout de souligner l’importance que revêtent pour elle les transferts de données dont elle tire l’essentiel de ses revenus. Mais se passer d’un marché comptant plus de 440 millions d’habitants était inenvisageable et il n’en fut rien.
Chute en bourse
Mark Zuckerberg agite pourtant de nouveau ce spectre. Il explique clairement dans son rapport que si un nouveau cadre n’est pas adopté, son entreprise ne sera «probablement plus en mesure d’offrir bon nombre de ses produits et services les plus importants, y compris Facebook et Instagram, dans l’UE».
Comme en 2020, il y a bien peu de chances, pour ne pas dire aucune, qu’une telle menace soit mise à exécution. Pour Meta, il s’agirait surtout de faire pression alors que l’UE et les Etats-Unis négocient actuellement une nouvelle version du Privacy Shield qui serait conforme au RGPD. Mais alors que le géant des réseaux sociaux traverse une des pires crises de son histoire, marquée par une baisse de son nombre d’utilisateurs en Amérique du Nord et une chute en Bourse, cette menace s’apparente à un coup de la dernière chance.
Pour tenter d’éclaircir cette question ainsi que les intentions de Meta, le quotidien économique londonien City A.M. a contacté le responsable des affaires internationales et de la communication de Meta, Nick Clegg. Ce dernier ne nie pas l’importance des transferts de données personnelles vers les Etats-Unis, au contraire. «Un manque de transfert de données de manière sûre et légale entraverait notre économie», déclare-t-il. Mais il tente également de lier le sort de son entreprise pesant 86 milliards de dollars de chiffre d’affaires annuels à celui de bien plus petites boîtes, qui souffriraient autant que la sienne si les transferts de données restaient limités. «Une petite start-up technologique en Allemagne ne serait plus en mesure d’utiliser un fournisseur de cloud basé aux Etats-Unis», illustre Clegg. Pas sûr que l’argument convainque…
Le 07/02/2022
Source web par : libération
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