Rapport du Giec : L’agriculture est à la fois un fardeau et un rempart pour le changement climatique

Les délégations des 195 pays membres du Giec, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, ont approuvé, au terme de cinq jours et demi, un rapport sur les liens entre changement climatique et usage des terres publié ce jeudi 8 août. Il alerte sur le rôle de l’agriculture dans la dégradation des terres mais aussi sur le potentiel du secteur pour séquestrer le carbone dans les sols.
L'agriculture est une des causes majeures de dégradation des sols en raison d'une exploitation et d'une intensification sans précédent de la gestion des terres. Les terres agricoles occupent environ 38 % de la surface des terres, et la superficie augmente, principalement du fait de la demande de produits d’origine animale. Entre 1961 et 2016, les émissions agricoles ont ainsi presque doublé et représentent aujourd’hui plus de la moitié des émissions totales du secteur des terres. Or, normalement, ces derniers agissent comme des puits de carbone, en captant et séquestrant le CO2 de l'atmosphère. Entre 2007 et 2016, ils ont ainsi permis d'éliminer 28 % du total des émissions.
Mais cette propriété est bouleversée par les activités agricoles et le changement climatique. En augmentant l’intensité des précipitations, les inondations, la fréquence et l’intensité des sécheresses, le stress thermique, les vents et l’élévation du niveau de la mer, celui-ci va également dégrader la capacité globale des sols à stocker le carbone. C’est pourquoi les auteurs du dernier rapport du Giec sur le changement climatique et l’utilisation des sols, publié ce jeudi 8 août, appellent à une transformation de nos modèles agricoles et de nos modes de consommation.
Lutter contre le gaspillage alimentaire et manger moins de viande
Actuellement, 25 à 30 % de la nourriture produite est gaspillée. Par ailleurs, l’évolution des modes de consommation a contribué à ce qu’environ deux milliards d'adultes soient en surpoids ou obèses à travers la planète alors que 821 millions de personnes sont encore sous-alimentées. "Il sera impossible de maintenir les températures mondiales à des niveaux sûrs sans changer notre façon de gérer les terres et la manière de produire de la nourriture", alertent les auteurs.
Parmi les mesures avancées par le rapport, il y a la réduction de la demande en produits animaliers pour aller vers des régimes végétariens ou végétaliens. "La consommation de régimes alimentaires sains et durables, tels que ceux basés sur les céréales secondaires, les légumineuses, les légumes, les noix et les graines… offre des opportunités majeures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre", indique le rapport. Et un potentiel de réduction des émissions compris entre 0,7 et 8 gigatonnes de CO2 par an.
Amélioration des pratiques agricoles
Par ailleurs, du côté des pratiques agricoles, les auteurs appellent à intensifier la productivité (à l'hectare ou à l'animal) dans les pays où cela est possible, plutôt situés au Sud. Dans les pays de l’OCDE, l’enjeu est au contraire de trouver un nouvel équilibre entre protection des écosystèmes et production agricole. Le rapport prône ainsi la gestion durable des terres : agroforesterie, agriculture biologique, rotation de culture, utilisation des eaux de pluie...
"Nous avons une double responsabilité face à la gestion des terres, nous sommes à la fois responsables de la crise climatique qui les appauvrit mais aussi d’une agriculture productiviste polluante qui les dégradent renforçant ainsi la crise climatique. Ce rapport du GIEC doit permettre à nos décideurs politiques de comprendre l’urgence à reformer notre système de production agricole pour assurer la sécurité alimentaire des années à venir", explique Laurence Tubiana, directrice générale de la Fondation européenne pour le climat.
Les auteurs du rapport insistent également sur le fait que "la décarbonations de l'économie ne doit pas reposer sur des changements d'usage des terres à grande échelle". L'utilisation de bioénergie avec captage et stockage de carbone (BECCS), qui consiste à faire pousser des végétaux et à les brûler pour produire de l’énergie tout en captant le CO2 issu de la combustion pour le stocker dans des réservoirs géologiques, aurait ainsi des conséquences sociales en termes d'accès au foncier et environnementales (recours accru aux pesticides...) importantes.
Les scientifiques appellent enfin à décarboner tous les secteurs le plus rapidement possible, et pas que celui des terres, quand bien même celui-ci représente près du quart des émissions liées aux activités humaines.
Le 08 août 2019
Source web Par novethic
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