Transport de marchandises vers le Maroc : Une profession, des problèmes et beaucoup de responsabilités
Métier où la confiance est le principal fonds de commerce, le transport de marchandises et de colis pour le compte d’autrui reste encore méconnu. Pourtant, c’est à ces agents que plusieurs MRE confient leurs colis et leurs bagages pour être transportés au Maroc ou en Europe. Selon ses professionnels, ce secteur reste toujours sous l’influence du transport maritime, mais aussi de la concurrence des autocars. Témoignages.
Personnes de confiance, assez connues parmi les Marocains résidant à l’étranger, les transporteurs de marchandises pour le compte d’autrui, effectuant souvent les mêmes trajets entre le Maroc et l’Europe, restent encore méconnus. Pourtant, les MRE confient à ces personnes des vêtements, des produits, des denrées alimentaires et même des appareils électroménagers à destination du Maroc ou parfois de l’Europe. Avec un prix qui ne dépasse pas les 1,5 euros le kilo pour les marchandises et jusqu’à 60 euros suivant la taille de l’appareil électroménager, ces colis arrivent généralement à temps, malgré un trajet qui reste difficile.
Au Maroc, l’apparition de ce métier est intervenu au lendemain de la libéralisation du secteur du transport. Selon une source au sein de l’Association marocaine des transports routiers intercontinentaux (AMTRI) du Maroc, c’est le dahir de 1974 qui régit en quelques sortes cette profession. Mais si certains voient dans la libéralisation du secteur une aubaine, d’autres, à l’instar de l’AMTRI, y détectent plusieurs failles. « Depuis la libéralisation, n’importe qui peut faire du transport international. Auparavant ce n’était pas le cas, vu qu’il fallait passer par une commission provinciale puis nationale en fournissant beaucoup de données sur le transporteur », explique notre source. De son côté, Driss Bernoussi, président de l’AMTRI, reste positif, indiquant qu’« il y a des conditions d’accès à la profession mais il n’y a pas de conditions de radiation de la profession ». Celui-ci de préciser : « Un transporteur n’a pas de contrôle annuel, l’autorisation est octroyée à vie. Pis encore, une entreprise condamnée pour une raison dans le cadre d’une opération avec un tiers n’est pas sanctionnée et ne sera pas radiée ».
La confiance du client : une base importante du métier
Pour lui, le dahir de 1974 concerne la définition des responsabilités. « Contrairement aux pays européens, qui définissent la responsabilité en fonction de plusieurs critères, au Maroc, en cas de découverte de produits illicites, tout le monde est embarqué », souligne-t-il avant d'ajouter que « la loi reste vague au Maroc » et que « chaque département ministériel renvoie la balle à l’autre ».
Mais si les grandes et moyennes entreprises se regroupent dans le cadre de l’AMTRI, les petits transporteurs se réunissent dans de petits syndicats. Mohamed, un transporteur de marchandises et de colis entre le Maroc et la France, contacté ce mardi par notre rédaction, estime que ce métier reste dépendant de la clientèle. « Lorsque vous avez des clients qui vous sollicitent, vous faites des allers-retours. Généralement, un client satisfait qui vous fait confiance donnera sans doute votre contact à quelqu’un d’autre et ainsi de suite ».
Mohamed, transporteur depuis plus de vingt ans, a parcouru des dizaines de milliers de kilomètres à bord de sa fourgonnette qui transporte lors de chaque voyage un maximum de 3,5 tonnes. « Nous avons notre patente et nous payons nos impôts. D’abord il fallait se rendre au tribunal commercial pour disposer d’une patente pour transport de marchandises pour le compte d’autrui », raconte-t-il.
Excepté son carnet d’adresse et sa serviabilité, Mohamed doit aussi la continuité de son activité à la vigilance. « Nous effectuons à chaque fois un contrôle avec le client sur place pour éviter les produits illicites. Il faut impérativement faire cela et être sûr de ce qu’on transporte », avance-t-il, reconnaissant qu'il s'agit là d'une « grande et vraie responsabilité d’être la personne en charge de ce bagage ou de ce colis jusqu’à son arrivée à sa destination finale ». Pour les problèmes rencontrés lors de ses voyages express, il se contente de citer « les problèmes sur les nouveaux produits transportés qui ne sont pas encore référencés ». D’autres se font attraper par la douane pour des produits illicites. « Mais généralement, les transporteurs qui en sont responsables changent carrément de métier après ce genre d’incidents ».
Les traversées de la Méditerranée : un mal parmi d'autres
Laârbi, un deuxième transporteur, détaille ce passage devant la douane. « Avant de passer par la douane, un passage par le scanner s’impose avant tout contrôle. Un scanner qui révélera en détail la nature des produits transportés à bord de la fourgonnette ou la camionnette », dit-il. Selon ce transporteur, qui fait le même trajet que Mohamed, « cette opération permet de cibler les zones suspectes et d’aller directement fouiller là où le scanner indique un flou ou un produit difficilement identifiable ». Les douaniers tomberaient parfois sur des produits illicites et même sur des sabres dissimulés.
Mais les maux de ce secteur restent nombreux et variés. Les agences sont assez nombreuses au Maroc comme à l’étranger. Le métier souffre actuellement, selon les transporteurs contactés, de plusieurs problèmes, à commencer par la concurrence rude des autocars. « Alors qu’ils sont censés ramener des personnes au lieu des marchandises et des colis, les autocars préfèrent aussi gérer une autre activité. Ils reviennent au Maroc avec dix places seulement, et des tonnes de marchandises, en plus d’une remorque supplémentaire », dénonce Laârbi.
L’autre problème, qui reste majeur pour ce métier, est sans doute le transport maritime. « J’ai pris un billet pour le 4 novembre de Sète à Nador à bord d’un bateau de GNV (Grandi Navi Veloci, ndlr). Il est annulé encore une fois et je suis obligé d’attendre jusqu’au 18 novembre, donc pas de bateau et pas de transport », déplore Laârbi. L’activité serait en gel depuis l’Aïd, soit près de 3 mois. Un avis à moitié partagé par M’hamed Hajjaj. Employé d’une société présente au Maroc et en Suisse, ce dernier affirme que « le problème majeur reste les bateaux de transport ». « Au niveau de la douane, les opérations restent fluides dans la mesure où, à force de faire le même trajet plusieurs fois par mois, vous devenez connu de ce service. Je fais le trajet jusqu’à 3 jours par mois entre le Maroc et la Suisse », poursuit-il.
« Il est souvent difficile d’expliquer à un client que la cause derrière ce retard est finalement le transport maritime. Vous perdez alors sa confiance et il ne fera plus appel à vous », souligne de son côté Laârbi. Et il n’a pas tort, dans un métier où la confiance reste le principal fonds de commerce.
Le 04 Octobre 2016
SOURCE WEB Par Yabiladi
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