Modèle de développement : Les réponses de la Commission à quelques interrogations de la CGEM

La Confédération générale des entreprises du Maroc a passé en revue différents éléments abordés dans le rapport de la Commission spéciale sur le modèle de développement. Voici ce qui en ressort.
La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) a reçu, ce jeudi 3 juin, Chakib Benmoussa, président de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD). La conférence a été longuement consacrée à la présentation du rapport. Elle a également connu la participation d’Ahmed Reda Chami, membre de la commission et président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), de Ghita Lahlou, membre de la CSMD et présidente de la commission Capital humain de la CGEM, et de Driss Jettou, ancien Premier ministre.
Une seconde partie a été réservée à une série de questions-réponses avec différents intervenants. Parmi eux, Mia Lahlou-Filali, directrice générale du groupe Pharma 5, a interrogé la vision de la CSMD sur l’industrie pharmaceutique et la manière de « le valoriser à sa juste valeur ». « Le rôle du médicament est central dans l’accès aux soins. Comme l’a démontré la pandémie, c’est l’un des garants de la souveraineté nationale. Ce secteur souffre pourtant d’un problème structurel de gouvernance car il est à cheval entre deux administrations, ce qui se traduit par l’absence de synergie et d’ambition. C’est une perte d’opportunité colossale. Serait-il possible que cette industrie fasse partie des ambitions sectorielles du pays ? », A-t-elle interrogé.
Réponse de Chakib Benmoussa : « Nous n’avons pas cherché à zoomer de façon particulière sur des dimensions sectorielles. Nous avons considéré que la stratégie de diversification nationale devait être définie par le gouvernement. Nous avons également donné des pistes, insisté sur certains aspects, y compris sur l’industrie pharmaceutique comme étant un sujet important en tant que gisement et en tant que souveraineté. Cette pandémie a prouvé l’intérêt d’avoir des capacités en interne, or un certain nombre d’obstacles font que les initiatives dans ce domaine ont du mal à aboutir. »
« L’industrie pharmaceutique est effectivement citée comme un gisement », a complété Ahmed Reda Chami. Et d’ajouter : « Cela signifie que cette industrie aura l’attention des pouvoirs publics. Il y a encore beaucoup à faire, que ce soit au niveau de la recherche et développement, des essais cliniques… Mais il faut une concentration entre les acteurs, qui sont actuellement très fragmentés. Déjà lorsque j’étais au ministère de l’Industrie, nous n’avions pas réussi à faire en sorte que ces acteurs se mettent d’accord. L’idée, c’est pourtant que nous ayons des médicaments fabriqués au Maroc, qui soient des princeps et pas seulement des génériques. N’oublions pas non plus que l’industrie pharmaceutique reste un secteur extrêmement protégé. Là aussi, il faut donc travailler avec les pouvoirs publics pour comprendre comment ce secteur peut s’ouvrir, en s’assurant que ses acteurs continuent à croître et à aller vers des activités beaucoup plus sophistiquées. »
La culture, un secteur à prendre en main
Neila Tazi, présidente du groupe de communication A3, productrice du Festival Gnaoua & Musiques du Monde et présidente de la Fédération des industries culturelles et créatives (FICC), relevant de la CGEM, a rappelé que dans le rapport de la CSMD, « parmi les indicateurs ciblés à l’horizon 2035 qui permettront de mesurer les progrès du Maroc, la culture a été placée au premier rang des priorités en termes de capital humain. Les constats qui figurent dans le rapport décrivent certes le grand malaise des acteurs de la culture au Maroc, mais ce rapport ne contient pas les propositions innovantes et tant attendues pour en faire un levier de développement. Au-delà d’inscrire la culture dans l’enseignement et d’augmenter le budget de ce secteur, quelle est votre vision pour les industries créatives et culturelles, et comment voyez-vous le rôle du secteur privé ? », A-t-elle demandé.
« Actuellement, la culture représente 0.1% du PIB. L’idée est de passer à 1% du PIB et de multiplier par trois les emplois, qui sont aujourd’hui de l’ordre de 40.000 », a répondu Ghita Lahlou. « Les modes de financement doivent être amorcés essentiellement par des financements publics, des contributions de grands groupes, du crowdfunding, de la formation et de la diffusion des produits culturels, en attendant que le secteur privé puisse s’en emparer dans le cadre de ce nouveau modèle de développement, à l’instar des pays beaucoup plus avancés », a-t-elle ajouté.
« C’est un secteur essentiel sur le front économique, puisqu’il représente un gisement d’emplois et de croissance qui nous paraît important », a soutenu de son côté Chakib Benmoussa. « Lorsqu’on évoque cette dimension culturelle, on peut la rattacher à beaucoup d’autres volets, notamment l’artisanat, qui a une dimension identitaire et culturelle très forte et à des métiers qui, aujourd’hui, ne sont pas très présents au Maroc mais qui mériteraient d’être développés en termes de formation. La culture est le fondement même du développement parce que c’est ce qui reflète ce que nous sommes, notre identité… Nous avons la chance d’avoir une histoire, un patrimoine, des valeurs, une culture plurielle… Nous avons aussi beaucoup insisté dans le rapport sur le fait que la culture, c’est aussi toute cette capacité à mobiliser les jeunes et les moins jeunes sur le territoire, alors même que nous avons actuellement des centres culturels fermés par manque d’animateurs », a-t-il également déclaré.
Une cohérence d’ensemble
Hassan Belkhayat, l’un des associés fondateurs de Southbridge A&I, a soulevé la question des priorités et de la doctrine économique : « Nous sommes très libéraux sur certains secteurs et beaucoup moins sur d’autres, notamment le social. Y a-t-il donc une doctrine, ou en tout cas une cohérence de doctrine, qui sous-tend tout ce travail ? »
« Je voudrais d’abord insister sur le fait que nous considérons qu’il ne s’agit pas de commencer par le secteur économique, puis social… Nous pensons que si nous nous inscrivons dans cette approche, la cohérence d’ensemble ne sera pas assurée. Nous aurons du mal à faire un véritable saut qualitatif. Bien sûr, il est évident qu’on ne peut pas tout faire dans chaque domaine. Il y a des mesures symboliques qui créent la confiance, des réformes qu’il faut entamer rapidement… Notre conviction, c’est que si, à travers le pacte national pour le développement, on parvient à créer un minimum de consensus sur ce socle qui indique certaines priorités, cela peut devenir quelque chose de tout à fait réalisable. Les priorités doivent tenir compte de nos ressources et les ressources, ce sont aussi les capacités à mobiliser d’autres acteurs, nationaux et internationaux. Chaque institution – Parlement, gouvernement, secteur institutionnel, secteur bancaire – doit jouer son rôle », a plaidé Chakib Benmoussa.
Le 3 juin 2021
Source web Par : medias24
Les tags en relation
Les articles en relation

Modèle de développement : la CSMD ne livrera pas son rapport en juin
La crise du Covid-19 a bousculé tous les agendas, y compris ceux de la Commission spéciale sur le modèle de développement. Non seulement il y a eu le con...

Blocage des importations de charbon russe : quelles alternatives pour le Maroc ?
Les flux d’importations du charbon russe sont bloqués depuis quelques semaines, en raison du refus du paiement par les banques marocaines des fournisseurs. E...

Réintégration de la CNT à la CGEM: les vérités de Jalil Benabbès-Tâarji
Pour Jalil Benabbès-Tâarji, président de l’ANIT, il est nécessaire, et même indispensable, pour la Confédération nationale du tourisme (CNT), de reveni...

Miriem Bensalah-Chaqroun décorée de la Croix de Grand Officier de l’ordre du Mérite civil du Ro
La présidente de la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM), Mme Miriem Bensalah-Chaqroun, a été décorée, lundi soir à Rabat, de la Cro...

Pénurie d'eau au Maroc: le CESE tire la sonnette d'alarme
"Le droit à l'eau et la sécurité hydrique sont gravement menacés par un usage intensif", avertit le Conseil économique, social et environnemental, appe...

Les comptes des associations sous la loupe de Driss Jettou
Les magistrats de la Cour des comptes s’intéressent aux financements des associations. C’est ce qui ressort d’une note adressée en date du 1er juillet �...

Le Maroc, une puissance maritime en devenir
UNE POSITION GÉOGRAPHIQUE PRIVILÉGIÉE, DE GRANDES RICHESSES HALIEUTIQUES ET ÉNERGÉTIQUES, UNE INFRASTRUCTURE PORTUAIRE EN PLEIN DÉVELOPPEMENT, AVEC DES PO...

Des proches de Mustapha Bakkoury interdits de se déplacer à l’étranger
Mustapha Bakkoury, PDG de Moroccan agency for solar energy (MASEN) a été récemment interdit de quitter le territoire national pour mauvaise gestion et malver...

Les TPME face au défi digital
Une étude sur le phénomène 4.0 dans l'entreprise marocaine vient d'être rendue publique. L'idée est de faciliter la compréhension des enjeux e...

Rapport: le Maroc aura soif, voici pourquoi
Le conseil économique, social et environnemental vient de tirer la sonnette d’alarme à propos de la pénurie d’eau. Les ressources sont estimées à 650 m...

Mezouar démissionne de la CGEM
Un courrier électronique adressé ce dimanche 13 octobre par Salaheddine Mezouar aux membres de la CGEM, annonce sa démission de son poste de président. C...

#MAROC_Tourisme_recommandations_du_CESE: Pour une bonne stratégie post-Covid
Lors d’une visioconférence tenue ce mardi 30 mars, Ahmed Reda Chami, président du conseil économique, social et environnemental, plaide pour une nouvelle s...