Relance de l’économie : “entre l’UE et les Etats-Unis, il y a un gouffre béant !”

La réalité est parfois cruelle : non seulement les Etats-Unis viennent de retrouver leur niveau de PIB pré-crise, mais force est de constater qu’ils vont transcender cette trajectoire de croissance d’avant crise à la suite d’un aggiornamento du policy mix (politiques économiques budgétaires et monétaires) que les Européens, engoncés dans leurs dogmes, peinent à comprendre, dénonce notre chroniqueur Sébastien Laye, entrepreneur dans l’immobilier et économiste à l’Institut Thomas More.
Si on considère la question du soutien à l’économie durant la crise sanitaire à proprement parler, il faut s’extirper des lieux communs sur le quoi qu’il en coûte, phraséologie politicienne qui ne tient pas la route : là où en 2020 les Etats-Unis ont dépensé 10% de leur PIB (alors que les mesures sanitaires ont été beaucoup plus légères) largement en soutenant directement les ménages, la France a consacré 5% de son PIB seulement, et rien directement pour les ménages. Si cela peut paraître dispendieux du fait de la situation des finances publiques pré-crise (endettement déjà élevé, dépense publique non contrôlée), nous avons été en retard même sur les vertueux allemands.
En 2021, la situation face aux Allemands s’inverse car la crise sanitaire perdure, mais les Américains viennent d’annoncer un plan de 1.900 milliards de dollars : au total, d’ici la fin de l’année, l’effort durant la crise aura été de presque 20% du PIB. Si le soutien aux commerces fermés par décision des pouvoirs publics (une juste indemnité et non une aide) a été massif, les populations européennes n’ont pas reçu d’aides directes comme les ménages américains : ces derniers, sur fonds d’aides et de reprise économique, enregistrent un pic de leur pouvoir d’achat jamais atteint depuis 1999 : et avec l’épargne accumulée (excédent d’épargne très rare dans une culture américaine où chacun pense rapidement trouver un emploi) pendant la crise, ce pouvoir d’achat aura un fort soutien au cours des dix prochains mois.
A la fin de l’année, le PIB de la zone euro aura dépassé de 1,7% son pic pré-crise, alors que les Etats-Unis seront 9% dessus : non seulement les stigmates de la crise sont déjà effacés, mais les Etats-Unis dépassent largement leur trajectoire pré-crise, là où les Européens n’arrivent pas à renouer avec cette tendance. Le cas de la France dans ce contexte est encore plus alarmant, puisque le PIB pré-crise ne devrait pas être atteint avec le second trimestre 2022.
En réalité, les Etats-Unis ne se contentent pas de compenser les effets de la crise du Covid ; une bonne crise n’étant jamais perdue, cet épisode malheureux est venu cristalliser, solidifier, valider des changements dans la pensée économique et politique à l’œuvre depuis les dernières années, visibles dans les déclarations de Yellen, Powell, Trump et Biden : le nouveau consensus transpartisan est que le relativement faible taux de croissance des années 2000 est inacceptable pour la première puissance mondiale.
La majorité des parieurs sportifs ne connaît pas cette astuce secrète !
Une stagnation séculaire, des politiques déflationnistes, une modération salariale, ne sont pas à la hauteur des enjeux. Les Etats Unis ont bien appuyé sur le bouton reset de leur économie, et ne sont pas déterminés à voir les Chinois (qui tout en utilisant la mondialisation comme un passager clandestin n’ont pas hésité à faire de l’expansion rooseveltienne à tout crin depuis vingt ans) les dépasser en 2028 en PIB comme cela était initialement écrit. Ils ajoutent donc aux mesures de soutien à l’économie durant le Covid un futur plan de 3.000 milliards dédié aux infrastructures, à l’éducation et à la santé, pour le reste de la décennie.
A ce stade, les Européens ont du mal à finaliser et à lancer un premier plan post-Covid de relance à l’échelle européenne, qui s’apparente plus à un soutien à la dépense publique normale qu’à un vrai plan d’investissement de long terme ; un total d’aides directes de 390 milliards, avec un impact pour la France de 0,75% par an à partir, au mieux, du deuxième semestre 2021 : probablement assez pour maintenir notre État Providence mais rien pour élever durablement notre croissance.
Le risque est désormais réel, au cours de la décennie, de voir l’écart entre la zone Euro et les Etats Unis, déjà caractéristique des années 2000, s’envoler à un différentiel irrattrapable. Il serait triste de voir deux zones de forte croissance (les Etats-Unis et l’Asie), des foyers de développement ailleurs, et une Europe condamnée à la croissance molle, par manque d’audace et d’ambitions de ses dirigeants.
Le 29/03/2021
SOURCE WEB PAR Capital
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