Tourisme/Marque Maroc: Adel El Fakir parie sur le 100% digital
Première sortie médiatique d’Adel El Fakir. Six mois après sa nomination, le DG de l’ONMT dévoile son plan d’action. Depuis la prise de ses fonctions, le patron de l’Office marocain du tourisme a enchaîné les rencontres avec les acteurs du secteur.
Six mois après sa nomination à la tête de l’ONMT, Adel El Fakir capitalise sur son expérience professionnelle dans le marketing pour déployer une nouvelle stratégie qui porte sur la transformation digitale de la destination Maroc (Ph. ONMT)
Objectif: analyser l’existant, dresser le bilan des différentes expériences, recueillir les avancées majeures mais aussi les limites pour capitaliser sur les acquis et relever de nouveaux challenges. Ce sont là les fondamentaux qui servent de base au nouveau plan d’action, aux réalisations et perspectives de la destination Maroc. Adel El Fakir dévoile une batterie de mesures qui s’articulent autour de la transformation et du tout digital.
- L’Economiste: Six mois après votre nomination à la tête de l’ONMT, quel bilan dressez-vous des réalisations?
- Adel El Fakir: Après 6 mois, je suis heureux de découvrir un office plein de potentiel en termes de ressources humaines, de grands acquis sur le plan opérationnel, un fort maillage international avec une présence via 15 délégations, des contrats annuels avec les grands TO mondiaux et les compagnies aériennes, une bonne maîtrise de la marque Maroc... Globalement, je suis satisfait d’avoir un outil bien rodé pour continuer à relever les défis du tourisme.
- Mais il y a aussi des limites?
- Les limites viennent du fait que nous sommes sur l’un des marchés les plus compétitifs au monde. Sur quelques villes marocaines (notamment Marrakech), nous sommes parmi le top 10 des destinations mondiales. Aujourd’hui, le choix du voyageur se fait par le canal digital sur une centaine de destinations. Du coup, nous évoluons dans un marché extrêmement compétitif avec des circuits de décision très courts et des mutations majeures (ndlr: Booking.com, compagnie aérienne low cost, éclosion de la classe moyenne des pays émergents...). Là où l’Office peut avoir des limites, c’est sur sa capacité à être agile et réactif. Or, la structure juridique de l’ONMT fait que l’agilité, la flexibilité, la réactivité... posent parfois des limites à notre action face aux marchés. L’autre défi réside dans le recrutement et l’attractivité des compétences RH.
- Quelles ont été les résolutions et les orientations majeures prises lors du dernier conseil d’administration, tenu le 5 décembre?
- Le conseil a validé les grandes orientations de l’Office sur les années à venir. C’est le cas notamment pour le volet fonctionnement, mais avec des améliorations et des changements pour accompagner la dynamique du marché. Cela passe par la mise en place de solutions internes, un système ERP intégré de gestion, une réorganisation des services,... Sur la promotion, nous avons l’aval pour nous orienter vers le 100% numérique en ce sens que la destination Maroc puisse rattraper le temps perdu. L’enjeu est de passer vers une marque Maroc 100% digitale, à l’instar de certains pays comme le Portugal.
- C’est un virage à 360 degrés orienté digital. Y a-t-il un budget conséquent pour traduire cette nouvelle résolution?
- Un budget a été arrêté dans ce sens. Le fait aussi d’orienter une grande partie des investissements sur le digital va nous permettre de disposer d’un budget conséquent en 2019 qui nous permettra d’avoir une visibilité importante de la marque sur les marchés actifs par l’Office.
- Vous inscrivez-vous en rupture ou en continuité avec vos prédécesseurs?
- Je dirais que je m’inscris plutôt dans la transformation. En même temps, ce sera de la continuité parce que les acquis sont là: un maillage international, une présence forte, une bonne connaissance du produit, une maîtrise des techniques de communication et du marketing. Il faut consolider ces acquis. L’enjeu est d’assurer la continuité tout en réinventant le modèle. Sur cette base-là, il va falloir relever les challenges qui nous attendent. La pression sur la promotion est tellement forte que le marketing devra être plus pointu, plus affiné... pour parler aux différentes cibles. Derrière, c’est le digital qui devra faire la différence. Ainsi qu’une force de frappe commerciale à travers les délégations de l’Office.
- A lui seul l’indicateur des arrivées n’est pas un critère pertinent de l’attractivité de la destination. Il y a aussi les recettes, les nuitées, les capacités... Sur quoi repose votre grille d’analyse?
- Les flux restent un indicateur majeur. Mais à lui seul, cet indicateur n’est pas suffisant pour renseigner sur l’attractivité. A mon avis, les recettes sont le principal outil de mesure. Nous sommes autour de 70 milliards de DH par an. Mais nous avons un réel problème de captation sur les recettes. Nous ne captons pas tout, surtout les recettes du tourisme interne. Nous disposons aussi d’indicateurs qui renseignent sur la santé de la destination. Il s’agit notamment d’indices liés à la notoriété, la perception et la connaissance de la destination, la durée de séjour, la dépense moyenne, le taux d’occupation dans l’hôtellerie, notre part de marché…
- Votre plan d’action d’ici 2020?
- Comme je viens de vous l’annoncer, nous insisterons sur la force de frappe qu’offre le digital. Parallèlement, il y a une série d’actions liées à la maîtrise de la demande. C’est-à-dire cerner et comprendre profondément le profil de nos acheteurs. Nous devons revenir en force sur la maîtrise de la demande. L’Office doit devenir l’expert de la demande et anticiper l’évolution des besoins et des mutations des comportements des voyageurs. Le plan d’action donnera aussi la part belle au marketing. Par marketing, j’entends une connaissance parfaite du produit et sa différenciation par rapport à nos concurrents. Le Maroc a une offre culturelle exceptionnelle et un arrière-pays unique. Autre levier majeur du plan d’action, le BtoB qui passe par la mise en relation des professionnels marocains et des donneurs d’ordre internationaux à travers les délégations de l’Office présentes dans les principaux marchés émetteurs.
- La destination est quasi absente des radars du digital. Comment rattraper le temps perdu?
- D’abord, il faut que la marque Maroc soit omniprésente sur le digital, pas uniquement lors de campagnes ponctuelles. Autrement dit, une présence et une visibilité continue dans le temps et multicanal. Il nous faut aussi assurer un référencement de la marque via les principales plateformes (sites) par lesquelles le voyageur prend sa décision. C’est un travail de longue haleine qui repose sur une connaissance approfondie des comportements de nos cibles.
- Prévoyez-vous des campagnes pour le tourisme interne?
- Avant de vous répondre, je tiens à rendre hommage au travail réalisé par Kounouz Biladi (ndlr: pas de campagne en 2018). Au démarrage il y a 10 ans, Kounouz Biladi devait résoudre l’équation pour que le touriste marocain puisse visiter le pays à des tarifs accessibles. Il a réalisé ses objectifs. Aujourd’hui, le touriste marocain est le premier client des hôtels nationaux. Nous avons dépassé la France, c’est une véritable performance! Le premier vecteur du tourisme en Espagne, c’est le tourisme interne. Aujourd’hui, le challenge consiste à réinventer le concept de tourisme interne. Nous y travaillons via une nouvelle approche de façon à ce qu’il soit l’un des axes majeurs de développement, l’un des principaux relais de croissance.
- Des experts reprochent au Maroc de rester très collé aux marchés émetteurs classiques. Il va falloir démarcher aussi la Chine, la Corée du Sud, le Japon...
- Les marchés classiques sont importants. Ils nous permettent de faire vivre l’ensemble du territoire avec des taux de retour importants. Mais il va falloir aussi capter le top 5 marchés des 10 prochaines années. Ce sont des marchés à potentiel mondial. Je citerais principalement la Chine qui est le 1er marché avec 130 millions de voyageurs. L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) prévoit à ce qu’ils passent à 500 millions d’ici 2030. C’est l’explosion du pouvoir d’achat de la classe moyenne chinoise qui booste ce marche. Le Maroc a été précurseur sur la Chine. Un bureau de l’ONMT a été mis en place à Pékin il y a 8 ans. Ce qui nous a permis d’avoir un très fort maillage sur ce marché. L’élément déclencheur a été l’annulation de la procédure des visas pour les touristes chinois. Décision prise par Sa Majesté le Roi Mohammed 6 lors de la visite officielle en Chine en 2016.Les touristes chinois étaient au nombre de 15.000 en 2015. Ils sont passés à 109.000 en 2017. Cette année, nous tablons sur 200.000 Chinois en visite au Maroc, sachant qu’il n’y a pas encore de liaison aérienne directe. Une liaison directe Casa-Pékin est en cours de préparation pour une ouverture fin 2019.
- Selon un récent rapport, l’Office est un «organe sclérosé de l’intérieur». La solution passerait par l’adoption de nouveaux statuts, l’intégration d’experts spécialisés... Partagez-vous ce constat?
- Je reviens à l’ADN et aux fondamentaux de l’Office. C’est un organisme en charge de la promotion et de la distribution de la marque touristique Maroc. Nos marchés et nos concurrents sont sur l’international. Notre cœur de métier nous impose une remise en question permanente compte tenu de la sophistication du marché et de nos concurrents. Il est tout a fait normal de considérer une évolution institutionnelle de l’Office.
Parcours et mission
Adel El Fakir a été nommé le 21 juin 2018 à la tête de l’ONMT. Ses missions principales: renforcer l’image de la marque Maroc à l’échelle internationale et mettre en place une stratégie marketing et commerciale afin de promouvoir et rehausser l’attractivité de la destination. Lauréat de l’Iscae, El Fakir a à son actif un DESS en marketing à l’Université des sciences sociales de Toulouse et un MBA international business de l’Ecole Ponts & Chaussées et l’Ecole Hassania des travaux publics. Il a fait ses preuves de manager (en 24 ans) notamment chez Coca-Cola où il a été directeur marketing régional et directeur général. Il a aussi occupé le poste de directeur de la Régie publicitaire à la SNRT.
«Blue City»: 1re destination pour les Chinois!
Le Maroc se vend en Chine plus par Chaouen que par Marrakech ou Agadir! La petite ville du Nord est la première destination la plus connue et la plus appréciée par les touristes chinois. D’ailleurs, ils ne l’appellent pas Chaouen, ni Chefchaouen mais plutôt «Blue City». Le touriste chinois est très friand de l’offre culturelle marocaine. Casablanca aussi est une destination star en chine.
Le 23/01/2019
Source web : l'économiste
Plaquette de l'AMDGJB-Geoparc Jbel Bani
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