Le projet de loi de Finances adopté en commission parlementaire dans sa partie "recettes"
Le projet sera soumis au vote en plénière vendredi 12 mai à la Chambre des représentants. Parmi les changements: l'alignement progressif des taxes sur les cigarettes brunes sur celles des blondes.
Le projet de loi de Finances 2017, dans sa partie "recettes publiques", a été probablement voté dans la nuit en commission des Finances à la Chambre des Représentants. Il sera débattu puis soumis au vote en plénière du jeudi 11 au samedi 13 mai.
Il y aura ensuite le traditionnel aller-retour avec la Chambre des conseillers. Un aller-retour qui n’est jamais sans intérêt. Par exemple, les conseillers CGEM défendront les amendements du patronat. L’année dernière, ils étaient arrivés à en faire adopter quelques uns.
Médias24 a assisté à la réunion de la Commission des finances, mardi 9 mai, jusqu’à 20H.
Une réunion de la commission des finances, c’est une quarantaine de députés entourant un ministre des Finances qui veut absolument défendre ses recettes et c’est naturel. Et des députés qui réagissent souvent de manière mécanique dans leur vote. Mais pas toujours.
A 16H06, il y avait Mohamed Boussaid, ministre des Finances, en bras de chemise, tout seul au bout de la grande table. Il révisait son texte avec application (photo), en buvant du café pris dans un verre.
Vers 16H15, arrive le premier député. C’est Omar Balafrej de la FGD.
La réunion commencera peu avant 17H, avec près d’une heure de retard.
Le président de la commission est Abdallah Bouanou, du PJD. C’est lui qui reçoit. A sa gauche, Driss Azami Idrissi, ex-ministre du budget, président du groupe parlementaire du PJD et donné par la presse comme candidat au poste de SG du parti.
A sa droite, Mohamed Boussaid, ministre des Finances. A droite du ministre, un siège occupé par Zouhir Chorfi, DG de la douane. Ce dernier laissera sa place à Omar Faraj lorsque le débat arrivera aux dispositions fiscales, le plat de résistance de tout budget.
Les députés se regroupent par couleur ou famille politique. Omar Balafrej est seul représentant de son parti. Le second député de la FGD, Mostafa Chennaoui, est absent. Dans la salle, seuls 4 députés sont absents sur 44.
Omar Balafrej a un comportement atypique. Il peut s’abstenir. Il peut voter pour un amendement de l’opposition, ou contre. Selon le contenu. Il n’est pas (pas encore) dans une posture mécanique.
La position de l’Istiqlal est celle d’un soutien critique. Ses députés peuvent s’abstenir comme ils peuvent voter contre le gouvernement.
Le gouvernement a présenté une série d’amendements portant essentiellement sur:
-la mise en conformité du texte avec les bonnes dates de son adoption;
-la mise en conformité du texte avec des décrets pris entre son dépôt fin septembre 2016 au parlement et aujourd’hui ;
-l’apport de précisions de forme dans le domaine des dispositions fiscales ;
-la mise en conformité de la répartition des dépenses et recettes avec la nouvelle architecture du gouvernement.
Autant que nous puissions en juger et jusqu’à 20H, il n’y a pas eu d’amendement majeur, hormis celui qui concerne le tabac et que nous exposons ci-après.
Certains amendements déposés par leurs auteurs, sont retirés après explications du ministre. Ils ressemblent à de vrais amendements, sauf qu’ils sont sans objet. Par exemple, cet amendement présenté par la majorité gouvernementale et consistant à exonérer de droits de douane, le lait en poudre importé et destiné à l’alimentation infantile. L’objectif est de provoquer une baisse des coûts au profit des familles nécessiteuses ou des couches moyennes. Cela semble frappé du coin du bon sens.
Sauf que dans la pratique, c’est déjà le cas: le Maroc fabrique près de 100% de ce lait en poudre, il importe des substituts et déjà en exonération de droits de douane puisque l’origine est celle de pays ayant un accord d’ALE avec le Maroc.
Second exemple d’amendement retiré: celui proposant des droits de douane de 50% sur certains produits pour protéger l’industrie, alors que le taux maximum est de 25%.
Parmi les amendements qui reviennent chaque année, les propositions de baisse d’IGR ou d’IS “pour encourager l’économie“ ou les “couches moyennes“, ou encore celui qui concerne l’enseignement privé, soit pour lui donner de nouveaux avantages, soit pour réduire l’impact des frais de scolarité sur les budgets des familles.
Dès qu’un amendement est examiné, le député qui l’a proposé ou le porte-parole de son groupe, prend la parole pour l’expliquer. Ensuite, parole au ministre. Si celui-ci déclare : “le gouvernement refuse cet amendement“, on sait que les dés sont jetés et qu’il sera rejeté car sur les 40 présents, 24 sont systématiquement alignés sur les positions de Boussaid.
Omar Balafrej présente un amendement commun avec son camarade Mostafa Chennaoui. Il propose simplement un nouveau taux de l’IS, de 35% (au lieu de 31%), sur les bénéfices nets supérieurs à 100 MDH. Il explique que selon ses calculs, cela rapporterait 2 MMDH à l'Etat, à reverser dans le budget de l'Education nationale. Rejeté.
Le groupe istiqlalien propose d’accorder un avantage qui, là aussi, semble frappé au coin du bon sens: il s’agit de déduire du revenu global imposable des parents, 45% des dépenses de scolarisation des enfants dans le privé. Le ministre rejette. Mais c’est l’argument de Omar Balafrej, qui vote contre, qui est le plus intéressant: “ça va tuer l’enseignement public. De plus en plus de parents opteront pour le privé. Il faut au contraire améliorer la qualité du public pour le rendre plus attractif“.
Il faut se méfier des fausses bonnes idées. Et en politique, on se retrouve aussi souvent à arbitrer entre objectifs antagonistes. L'enseignement public ou les revenus des familles?
Vos cigarettes brunes coûteront de plus en plus cher
L’article 5 (Taxe intérieure à la consommation), introduisait déjà une première mesure sur le tabac. Il s’agit de définir ce que l’on entend par tabac brun. En effet, les cigarettes brunes sont moins taxées que les blondes, comme on peut le constater sur le marché. De sorte que des fabricants ont commencé à mettre sur le marché des cigarettes contenant une part minime de tabac brun, qu’ils enregistrent comme des brunes, pour les vendre moins cher. En quelque sorte, des blondes au prix des brunes.
Le gouvernement avait déjà décidé de définir le tabac brun comme contenant au moins 80% de tabac brun.
Mais comme les contrôles ne sont pas aisés, notamment en raison de la présence possible d’adjuvants, il a été décidé sur proposition de la majorité, d’aligner progressivement la TIC sur les brunes, sur celle des blondes. Ce rattrapage se fera sur trois années. En d’autres termes, le 1er janvier 2019, les cigarettes brunes coûteront aussi cher que les blondes. Bonne nouvelle pour ceux qui détestent la fumée ou veulent arrêter.
Le tableau de cette augmentation progressive de la TIC sur le tabac brun est le suivant, tel qu’il a été adopté en commission des finances, en première lecture:
-2017 (à la parution au B.O.) : Taxe ad valorem 315 DH par 1.000 cigarettes. Minimum perçu par l’Etat 386 DH pour 1.000 cigarettes.
-1er janvier 2018 : Taxe ad valorem 388 DH par 1.000 cigarettes. Minimum perçu par l’Etat 476 DH pour 1.000 cigarettes.
-1er janvier 2019 : Taxe ad valorem 462 DH par 1.000 cigarettes. Minimum perçu par l’Etat 567 DH pour 1.000 cigarettes.
Nous publierons les amendements détaillés lorsqu’ils seront disponibles.
Le 10 Mai 2017
SOURCE WEB Par Médias 24
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