ÉCLAIRAGE – « Maroc: crise politique ou crise d’Etat? » se demande Ahmed Assid**

Le Maroc traverse une situation difficile à tous les niveaux, ce qui nous pousse à la qualifier d’impasse réelle pour les raisons suivantes :
– La réticence des gens à l’égard de la politique et leur manque de confiance en ses hommes et dans les institutions.
– La permanence des structures de corruption et d’oppression dans la gestion de la relation entre le pouvoir et la société.
– L’absence de confiance entre les différentes parties de la classe politique, entre les partis politiques, entre les partis et le pouvoir, entre le parti majoritaire et le Palais et son entourage, entre le parti majoritaire et les forces vives réfractaires de la société, entre l’Etat et la majorité réelle qui a atteint un haut degré de désespoir quant à la réforme et au changement.
– L’échec des acteurs partisans (ou leur mise en échec) à s’entendre pour constituer un gouvernement après des élections qui ont montré touts les symptômes d’une crise, à travers les plans adoptés par toutes les parties précitées, et qui sont des plans démontrant de manière claire, non seulement le manque de confiance, mais aussi l’inexistence d’un contrat réel entre les différentes parties et l’absence d’un projet unifié et d’objectifs communs.
Les contours de la situation difficile que traverse le pays apparaissent de la manière suivante :
– En haut lieu, on ne veut pas que le Parti justice et développement (PJD) continue d’occuper le devant de la scène électorale en dehors des plans du pouvoir et de ses normes.
Tout comme elle ne supporte plus sa présence tentaculaire au sein des rouages de l’Etat.
– Le PJD, malgré qu’il ait réussi à faire montre de servilité et de soumission à l’égard de la haute autorité, surtout à travers les discours de Benkirane, n’est toujours pas parvenu à gagner la confiance du Palais à cause de son échec à dissimuler son plan véritable visant l’affaiblissement de la monarchie par le biais de la mise en place de lobbies administratifs, économiques et sociaux parallèles à ceux du Makhzen, ainsi que par le biais d’attaques contre l’entourage royal, voire contre la personne du roi sur Facebook.
– Les autres partis sont devenus divisés en deux camps : les partis dépendant du PJD pour bénéficier de sa réussite électorale et s’assurer de postes à ses côtés, dont le Parti du progrès et du socialisme devenu presque un « serviteur » du parti de la lampe, et le Parti de l’Istiqlal qui, malgré sa longue histoire, a choisi d’entrer sans aucune condition au gouvernement parce qu’il n’a pas tiré aucun profit de son rôle dans l’opposition et de son retrait du précédent gouvernement ainsi qu’en raison de sa peur de s’exposer encore davantage à l’affaiblissement au cas où il ne reçoit pas de postes au gouvernement dans la phase actuelle.
L’autre camps est celui des partis du pouvoir qui se sont alliés pour imposer au chef du gouvernement des conditions insurmontables ce qui pourrait conduire à l’une des deux choses : soit affaiblir le chef du gouvernement et le pousser à former son cabinet en position de faiblesse malgré la majorité électorale qu’il a emportée, ou soit entraver la constitution du gouvernement et le pousser à la démission ce qui remettra de fait cette question entre les mains du roi que la constitution qualifie de garant de la pérennité des institutions. (Le recours à de nouvelles élections n’est pas envisageable et ne servira à rien car il aboutira à la même situation).
A la lumière de cette situation, il paraît que les forces démocratiques qui ne sont pas entrées dans le cercle des négociations n’ont confiance en aucune des deux parties en compétition, en plus du fait qu’elles désespèrent des partis politiques à cause de leur faiblesse, elles ne croient pas en l’existence d’une volonté politique réelle de réforme chez les dirigeants, tout comme elles ne peuvent accorder leur confiance au Parti de la lampe dont le rendement politique au cours des dernières cinq années était contraires aux droits de l’homme et aux valeurs démocratiques en ce sens qu’il donne l’impression d’œuvrer à son propre renforcement pour mettre en place son propre Etat plus qu’il ne soit préoccupé par la participation à la gestion des affaires publiques.
Dans tous les cas, il paraît que le prochain mandat gouvernemental ne sera pas joyeux pour Benkirane qui a surestimé l’utilité du nombre des sièges et de la présence électorale de son parti dans le cadre d’un système politique qui ne consacre pas encore les règles de l’action démocratique, de même que les erreurs qu’il a commises en recourant à l’idée de « Attahakoum » (hégémonisme) et en jouant le rôle de la victime comme il l’a fait à l’occasion des élections de 2011, ont eu un impact négatif sur sur ses relations avec le Palais et les dirigeants véritables après cinq ans à la tête du gouvernement, comme elles ont rendu manifeste la lutte, qui était dissimulée, au point de ressembler à celle qui a éclaté entre les « frères » et le régime militaire en Egypte.
Si ce dernier a profité de la sortie massive des populations dans la rue pour se débarrasser du pouvoir des « frères » et les jeter en dehors des institutions, le régime marocain ne semble pas avoir besoin d’en faire autant en raison des alternatives dont il dispose.
Le 07 Décembre 2016
SOURCE WEB Par Article19
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