Etats-Unis: un populiste à la Maison blanche, onde de choc dans le monde
A l'issue d'une folle nuit de suspense, les urnes ont rendu leur verdict. Donald Trump est élu Président des Etats Unis. Toute la nuit, les marchés, les politiques, le monde entier, n'avaient d'yeux que pour l'élection américaine.
Le républicain populiste Donald Trump, sans aucune expérience politique, a remporté l'élection présidentielle américaine, un séisme politique sans précédent, qui plonge les Etats-Unis et le monde dans une incertitude vertigineuse.
Les marchés avaient dévissé avant même l'annonce de sa victoire, scellée mercredi à l'issue d'une soirée électorale déjouant tous les sondages.
Huit ans après l'élection de Barack Obama, premier président noir qui avait suscité une immense vague d'espoir à travers le pays, Donald Trump, 70 ans, taxé de sexisme et de xénophobie par ses adversaires, l'a emporté sur la démocrate Hillary Clinton, qui espérait devenir la première femme présidente des Etats-Unis.
Il avait fait campagne comme l'outsider déterminé à mettre fin à la corruption des élites politiques, qui ont, selon lui, "saigné le pays à blanc". Il avait promis de "rendre à l'Amérique sa grandeur", son slogan et de la protéger de l'extérieur.
Ce milliardaire imprévisible, que personne n'avait vu venir, avait annoncé lundi un "Brexit puissance trois", référence au vote surprise des Britanniques pour sortir de l'Union européenne.
Il a durant toute sa campagne galvanisé un électorat blanc modeste, se sentant laissé pour compte face à la mondialisation et aux changements démographiques, auquel il décrivait un avenir sombre pour les Etats-Unis.
Sa victoire choc intervient à l'issue de 18 mois d'une campagne électorale qui a profondément divisé les Etats-Unis et stupéfié le monde par ses outrances et sa violence.
Colère et frustration
Plus de 60% des Américains pensaient que Donald Trump n'avait pas le caractère pour devenir Président. Mais il a réussi à capter la colère et les frustrations d'une partie de l'électorat.
Ses propositions restent vagues dans un certain nombre de domaines, comme la politique étrangère. Et elles suscitent l'inquiétude dans d'autres, comme l'économie.
Tôt mercredi matin, l'équipe d'Hillary Clinton estimait encore que le résultat final restait incertain. "Le décompte se poursuit et chaque vote compte", a déclaré John Podesta, directeur de campagne, annonçant que la candidate ne s'exprimerait pas, comme prévu, devant ses milliers de supporteurs réunis dans un centre de conférences au toit de verre, le Javits Convention Center.
Secousses sur les marchés
Sans attendre la confirmation de sa victoire, la présidente du Front national Marine Le Pen a adressé mercredi matin sur Twitter ses "félicitations au nouveau président des Etats-Unis Donald Trump et au peuple américain, libre".
La possibilité d'une présidence Trump a violemment secoué les marchés. Le dollar a chuté, alors que les investisseurs se précipitaient sur les valeurs refuges comme l'or et les marchés obligataires.
Au fil de la soirée, le chemin vers la Maison Blanche s'est fait de plus en plus étroit pour Hillary Clinton, qui depuis des mois était la favorite des sondages.
L'homme d'affaires milliardaire, en qui personne ne croyait lorsqu'il a lancé sa candidature en juin 2015, n'a jamais occupé le moindre mandat électif.
Outre la Floride, la Caroline du Nord et l'Ohio, deux autres Etats cruciaux, étaient tombés dans son escarcelle plus tôt dans la soirée.
Preuve de son optimisme, le magnat de l'immobilier avait tweeté quatre heures avant sa victoire une photo de lui avec son colistier Mike Pence, son équipe et sa famille regardant les résultats depuis la Trump Tower sur la Ve avenue à Manhattan, où il a ses bureaux et son appartement, un luxueux triplex aux allures de mini-Versailles.
"Je pense que nous allons gagner!", jubilait Brendon Pena, 22 ans, supporter de Trump, dans l'hôtel new-yorkais où l'équipe de campagne du milliardaire avait prévu "une fête de victoire". "J'y ai toujours cru. Je pense que Donald Trump est un type très intelligent".
'Le pays veut du changement'
"C'est incroyable! Je pense qu'il va aller jusqu'au bout", soulignait de son côté Glenn Ruti, 54 ans. "Le pays veut du changement".
Et au fil des résultats, les mines se sont allongées à l'intérieur de la soirée électorale d’Hillary Clinton, 69 ans.
Certains supporters choqués, venus parfois de très loin, sont partis en pleurant sans attendre le résultat final.
"C'est tout simplement incroyable", se désolait Anabel Evora, 51 ans. "Je prie et je ne suis pas croyante... Nous avons besoin d'un miracle. Je suis triste, je sens que je vais pleurer".
Mme Clinton a regardé les résultats dans un hôtel de New York avec son mari Bill Clinton et leur fille Chelsea, accompagnée de son mari et de leur deux enfants.
Plus de 200 millions d'Américains étaient appelés aux urnes mardi pour choisir le successeur de Barack Obama, extrêmement populaire, qui quittera la Maison Blanche le 20 janvier après huit années au pouvoir.
Sa première élection, en 2008, avait nourri l'espoir d'un pays plus uni. La campagne 2016 l'a profondément divisé.
Hillary Clinton comptait pour l'emporter sur les minorités, les jeunes, les électeurs blancs diplômés et sur les femmes qui constituent la majorité de l'électorat (environ 52% lors des précédentes présidentielles).
Celle qui a été tour à tour Première dame, sénatrice de New York puis chef de la diplomatie américaine, présentait un CV impressionnant, mais sa personnalité suscite peu d'enthousiasme.
"J'espère qu'il y a plus d'Américains sains d'esprit que fous", y disait Sharon Jones, 50 ans, venue de Chicago, avant le résultat final. Et si Donald Trump l'emportait mardi soir ? "Il paraît que le Canada c'est très beau au printemps", plaisantait-elle, évoquant avant les résultats la possibilité de quitter le pays.
La campagne, particulièrement violente, faite souvent d'attaques personnelles, a laissé un goût amer et a accru la méfiance des Américains envers leur classe politique.
Les Américains ont aussi voté mardi pour renouveler 34 des 100 sièges du Sénat à Washington et la totalité de la Chambre des représentants, dont les républicains ont conservé la majorité mardi.
Douze des 50 Etats américains élisaient aussi de nouveaux gouverneurs, et des dizaines de référendums locaux étaient organisés.
La Californie est ainsi devenue le cinquième Etat américain à légaliser la marijuana à usage récréatif.
"Barrer l’entrée des musulmans aux Etats-Unis“
Le 7 décembre 2015, Donald Trump appelait à barrer l'entrée des musulmans aux États-Unis, proposition applaudie par ses partisans, mais dénoncée à droite comme à gauche.
"J'ai des amis musulmans, ce sont des gens très bien, mais ils savent qu'il y a un problème, et on ne peut plus le tolérer", avait expliqué Donald Trump, ovationné au cours d'un meeting en Caroline du Sud, quelques heures après avoir annoncé dans un communiqué qu'il souhaitait fermer les frontières des États-Unis aux musulmans "jusqu'à ce que nous soyons capables de déterminer et de comprendre ce problème".
Le milliardaire se justifie en affirmant que de nombreux musulmans sont favorables au jihad violent contre les Américains ou qu'ils préfèrent vivre en vertu de la charia (loi islamique) plutôt que de la Constitution américaine, citant un sondage commandé par un centre marginal dirigé par Frank Gaffney, qualifié d'islamophobe par le Southern poverty law center, une organisation antiraciste.
"La haine dépasse l'entendement", a lancé Donald Trump, évoquant le couple de tueurs de San Bernardino qui a fait 14 morts quelques jours auparavant et les auteurs des attentats de Paris. "Ça ne fait qu'empirer et on va avoir un autre World trade center", a-t-il prévenu.
Même à l'échelle des déclarations incendiaires du milliardaire, la proposition est extraordinaire.
Donald Trump n'a jamais caché sa méfiance envers les musulmans, comme d'autres candidats républicains. En septembre, son rival Ben Carson avait suggéré que la fonction présidentielle était incompatible avec l'islam. Donald Trump avait aussi laissé filer quand un partisan avait affirmé que Barack Obama était musulman.
Après les attentats de Paris en novembre, il a appelé -comme le reste de son parti- au rejet des réfugiés syriens. Il avait aussi approuvé l'idée de forcer les musulmans à se déclarer sur un registre afin d'être surveillés, déclenchant un premier malaise dans son camp.
Il a précisé que les soldats américains musulmans basés à l'étranger pourraient revenir. Et que les musulmans déjà ici pourraient rester, mais "nous devons être très vigilants, car des gens ont des bombes", a-t-il dit sur Fox News, en référence aux tueurs de San Bernardino.
La campagne de Trump avait démarré en juin 2015 par une diatribe contre les clandestins mexicains, comparés à des violeurs et des criminels.
“Le monde serait meilleur avec Saddam et Kadhadi“
"Sans nul doute!", a répondu le milliardaire américain à la question posée par un journaliste de CNN au cours de la campagne électorale.
Saddam Hussein et Mouammar Kadhafi ont été renversés en 2003 et 2011 respectivement, lors d'interventions militaires menée ou soutenue par les Etats-Unis.
"Regardez la Libye. Regardez l'Irak. Avant il n'y avait pas de terroristes en Irak. Il (Saddam Hussein) les tuait immédiatement. (L'Irak) est maintenant devenu l'université d'excellence du terrorisme", a justifié M. Trump.
"Franchement, désormais il n'y a plus d'Irak ni de Libye. Ils ont volé en éclats. Il n'y a plus aucun contrôle. Personne ne sait ce qui se passe", a-t-il poursuivi.
Il a jugé que l'Amérique était confrontée à un retour à "l'époque médiévale", avec des violences au Moyen-Orient d'une brutalité inédite "depuis des milliers d'années".
"Les gens sont décapités, les gens sont noyés dans des cages", a-t-il insisté. "C'est pourquoi je veux renforcer notre armée. Nous en avons besoin aujourd'hui bien plus que par le passé". Selon lui, "la doctrine Trump est simple: c'est la force".
"La Libye est une catastrophe. L'Irak est une catastrophe. La Syrie est une catastrophe. Tout le Moyen-Orient. Cela a complètement explosé sous Hillary Clinton et sous Obama", a-t-il énuméré, dans une critique directe de la politique étrangère de l'administration Obama et de la candidate démocrate, qui fut secrétaire d'Etat de 2009 à 2013.
Toujours concernant l'Irak, il a estimé que les Etats-Unis n'auraient jamais dû se retirer sans "prendre le pétrole".
"Désormais on sait qui a le pétrole et c'est la Chine qui l'achète. Ils n'ont pas dix centimes devant eux et ils sont les plus gros clients", a affirmé le milliardaire, apparemment peu au fait de la puissance financière de Pékin.
"Le pétrole part vers le groupe Etat islamique (EI), le pétrole part vers l'Iran, et l'Iran finira par en récupérer la plus grosse part. Et l'EI en aura plein aussi. Ils ont beaucoup d'argent car ils ont beaucoup de pétrole et car nous sommes stupides", a-t-il martelé.
Le 08 Novembre 2016
SOURCE WEB Par Médias 24
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