Le désarroi des étudiants rentrés d’Ukraine
«L’avenir de nos enfants semble incertain». Mohammed Akcha, président de l’Association Joussour pour les étudiants d’Ukraine, paraît pessimiste quant à l’avenir des étudiants marocains qui ont été contraints de fuir les affres de la guerre en Ukraine.
«Le ministère de l'Enseignement supérieur, en la personne du ministre lui-même, avait fait des promesses pour que nos enfants puissent réintégrer les universités et les instituts marocains. Nous étions très optimistes», a souligné Mohammed Akcha dans une déclaration à Libé. Et d’ajouter d’un ton amer : «Mais au fil du temps, ces promesses se sont évaporées et des difficultés sont apparues. On nous a dit que la capacité des facultés de médecine au Maroc est limitée, en particulier celles de pharmacie et de médecine dentaire. Mais, pour les étudiants en ingénierie et en architecture, nous nous attendions à ce qu'ils soient intégrés, d'autant plus que leur effectif était peu nombreux».
Cette solution initialement préconisée par le ministre de l’Enseignement supérieur a provoqué un tollé notamment chez les étudiants en médicine qui s’y sont fermement opposés.
«La Commission nationale des étudiants en médecine, médecine dentaire et en pharmacie suit de près la situation en Ukraine ainsi que les dernières informations qui circulent autour de l’intégration de nos confrères qui ont quitté le territoire ukrainien», a fait savoir cette commission dans un communiqué rendu public en mars dernier. Et de préciser : «La difficile situation actuelle au sein des universités publiques et des hôpitaux universitaires, et les difficultés que rencontrent les étudiants en formation, nous incitent à exclure cette possibilité et à envisager de discuter d'autres solutions qui n'affectent pas négativement la qualité de la formation».
«L'année universitaire touche à sa fin. Certains universitaires ont donné des cours à distance depuis l'Ukraine, mais quelles sont les perspectives d'avenir pour nos enfants ? Vont-ils y retourner ? Selon les informations venant de l’Ukraine, les infrastructures de ce pays ont été complètement détruites et nos enfants ont peur d'y retourner.
Le ministère leur a proposé de poursuivre leurs études dans des pays proches de l'Ukraine, comme la Roumanie et la Bulgarie, mais nous avons carrément rejeté cette solution parce que les coûts des études dans ces pays sont très élevés et qu'il y a une grande différence au niveau des programmes entre ces pays et l'Ukraine», a précisé le président de l’Association Joussour pour les étudiants d’Ukraine.
Par la suite, de nouvelles contraintes ont été imposées pour que les étudiants d’Ukraine soient intégrés (concours et rétrogradation d'une année). «Ce sont des solutions totalement inacceptables», nous a déclaré Mohammed Akcha, affirmant que plusieurs demandes ont été adressées au ministère de tutelle pour débattre de cette situation, mais sans aucune suite.
Devant l’absence de toute solution pouvant mettre fin au calvaire des étudiants d’Ukraine, l'Association nationale des parents des étudiants marocains en Ukraine (ANPEM, fondée le 20 mars 2022) observe ce samedi matin un sit-in devant le siège du ministère de l’Enseignement supérieur, a affirmé un membre de cette association dans une déclaration à Libé.
Par ailleurs, le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation a annoncé, mercredi dernier, via un communiqué, la mise en place d’une nouvelle plateforme pour le dépôt des pièces justificatives attestant leurs cursus de formation dans les universités ukrainiennes. Le délai de dépôt des dossiers s’étend du 18 au 31 mai courant, ajoutant que cette opération se fera par étapes, à savoir l’inscription, le téléchargement de la déclaration sur l’honneur et le chargement des documents demandés.
Bien que la mise en place d’une telle plateforme soit saluée comme étant une bonne initiative pour résoudre ce problème, il n’en demeure pas moins qu’il y a des étudiants d’Ukraine qui n’ont pas ramené leurs documents.
«Le problème réside dans le fait qu'il y a des étudiants qui ont laissé leurs dossiers et documents dans les universités où ils étudiaient en Ukraine», a fait savoir Mohammed Akcha. Et de préciser : «Par exemple, mon fils étudiait dans une université à Vinnytsia et y a laissé ses documents. Il y a un autre problème, à savoir qu'il existe des intermédiaires en Ukraine qui demandent de l'argent aux étudiants pour obtenir leurs documents. Lors du sit-in auquel nous participerons ce samedi, nous discuterons de ce problème».
D’après les dernières données du ministère de tutelle, plus de 7.283 étudiants marocains d'Ukraine se sont inscrits sur la plateforme en ligne instaurée pour leur recensement, dont 75% sont inscrits en cycle de médecine, de pharmacie, ou de médecine dentaire, au moment où 21% sont issus de formations d’ingénieurs et de sciences vétérinaires, et 4% en langues, en économie et gestion, ou en droit.
Le 20 Mai 2022
Source web par : libération
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