Créances en souffrances des banques: le FMI appelle BAM à accélérer le projet de création d’un marché secondaire
La création d’un tel marché, qui prendra la forme au Maroc d’une structure de défaisance, devrait permettre aux banques marocaines de se délester d’une partie des créances en souffrance qu’elles détiennent et d’augmenter leur capacité à distribuer des crédits. Toutefois, le projet, complexe, tarde à voir le jour.
Le Fonds monétaire international remet sur la table le projet de création au Maroc d’un marché secondaire des créances en souffrance. Abordant l’état de santé du secteur bancaire marocain, dans le cadre des consultations de 2021 avec les autorités marocaines au titre de l’article IV, le FMI a dans un premier temps réalisé un diagnostic plutôt rassurant du secteur: «les banques marocaines ont bien résisté à la crise, grâce à la rapidité et à l’ampleur de l’appui que leur a apporté Bank Al-Maghrib».
Toutefois, la question des crédits impayés, qui ont beaucoup augmenté à cause des effets de la crise sanitaire, requiert toujours la plus grande vigilance. Le Fonds a ainsi indiqué que «BAM devra continuer à veiller à ce que les banques continuent de constituer des provisions pour créances douteuses, tout en accélérant, avec les autorités concernées, le lancement des réformes pour la création d’un marché secondaire des créances en souffrance».
Par «marché secondaire des créances en souffrance», le FMI fait référence au projet de création d’une structure de défaisance, également appelée «bad bank» ou «banque poubelle». Un projet sur lequel les autorités monétaires du Royaume travaillent depuis plusieurs années, mais qui tarde à voir le jour.
L’utilité d’une telle structure n’est pourtant plus à démontrer. Elle a pour vocation à racheter les créances impayés des banques, ces dernières étant confrontées à une hausse sans précédent des créances en souffrance depuis le début de la crise sanitaire (plus de 17 milliards de dirhams supplémentaires en deux ans). Une fois les créances en souffrance transférées à la structure de defaisance, celle-ci a pour mission de liquider au meilleur prix les actifs repris.
En définitive, en isolant les actifs à risque qui pèsent sur le bilan des banques et sur leurs fonds propres, la «bad bank», ou structure de défaisance, permet aux établissements bancaires de consentir davantage de nouveaux crédits et de répondre aux forts besoins de financement de l’économie nationale.
Elle donne aussi la possibilité d’attendre que de meilleures conditions soient remplies pour recouvrir les créances douteuses et les impayés. Une telle structure a déjà fait ses preuves en Espagne lors de l’explosion de la crise immobilière en 2008, et en Belgique, lors du sauvetage de la Banque Dexia en 2011.
Si le projet de création d’une structure de défaisance tarde autant, c’est que sa mise en œuvre est loin d’être simple. Dès 2020, Bank Al-Maghrib a lancé une étude avec l'appui de la Société financière internationale (la SFI, une filiale du groupe de la Banque mondiale) pour examiner les options et les freins aux plans légal, réglementaire et opérationnel. Les résultats de cette étude ont conclu que ce projet était complexe, eu égard à ses nombreux aspects légaux, fiscaux et institutionnels, qu’il faudra résoudre, et à la multitude des intervenants concernés par ces aspects.
Il va falloir réviser un certain nombre de dispositions du Code des obligations et des contrats (DOC) mais également du code de commerce, avait souligné le wali de Bank Al-Maghrib (BAM), Abdellatif Jouahri, lors d’un précédent point de presse.
Sur le volet institutionnel, il faudra se pencher sur toute la législation qui concerne le transfert des créances à une entité et aussi les moyens et les règles du recouvrement.
Le côté fiscal doit également être traité, notamment en ce qui concerne le traitement fiscal des provisions déjà constituées par les banques pour couvrir les créances en souffrance. Des discussions avec le fisc ont été engagées dans ce sens par la Banque centrale auxquelles ont été associés les ministères des Finances et de la justice.
En outre, le Secrétariat général du gouvernement (SGG) a été saisi pour piloter l'ensemble de ces aspects avec les départements ministériels concernés et ce, en vue d'en résoudre les problématiques dans les meilleures conditions.
Toujours est-il que ce chantier n’a toujours pas été concrétisé, et a pris du retard. La piqûre du rappel du FMI devrait inciter les différents intervenants à accélérer la cadence, d’autant que le stock des créances en souffrance détenu par les banques atteint des sommets: plus de 85 milliards de dirhams à fin octobre 2021, selon les données de la Banque centrale, en hausse de 6,9% sur un an.
Le 12/12/2021
SOURCE WEB PAR Sputniknews
Les tags en relation
Les articles en relation
Chakib Benmoussa succède à Ahmed Lahlimi au Haut-Commissariat au Plan et relève de nouveaux défi
Après 21 ans à la tête du Haut-Commissariat au Plan (HCP), Ahmed Lahlimi a pris sa retraite, laissant derrière lui un héritage important au sein de cette i...
Abdellatif Jouahri – Aziz Akhannouch : la guerre froide
Profondes divergences de vue entre une Banque centrale attachée à la stabilité des prix et un gouvernement qui veut soigner ses statistiques. Une confére...
Loi-cadre fiscale: Le FMI met la pression sur le Maroc
Le chantier fiscal fait partie des réformes demandées par le FMI. «L’équipe du FMI note avec satisfaction que les autorités comptent accélérer les réf...
FMI: L’Afrique du Nord doit surveiller sa dette
La progression du niveau de la dette publique pourrait représenter un facteur de vulnérabilité en Afrique du Nord, selon le FMI qui tient cette semaine ses r...
Jouahri dément les rumeurs
Le gouverneur de Bank Al-Maghrib (BAM), Abdellatif Jouahri, a démenti les rumeurs concernant sa possible nomination comme conseiller du roi Mohammed VI. "Aucun...
Bab Ighli: visite au cœur du site qui abrite les Assemblées annuelles de la BM et du FMI
Le site de Bab Ighli, qui s’étend sur une superficie de 45 hectares au cœur de Marrakech, a été spécialement aménagé en un campus sophistiqué pour abr...
Crypto-monnaies: Bank Al-Maghrib (BAM) bâtit un socle solide
C’est une nouvelle étape pour l’e-dirham au Maroc. Lors du point de presse qui a suivi le premier conseil d’administration de Bank Al-Maghrib (BAM) de 20...
Dominique Strauss-Kahn lance un vaste projet hôtelier au Maroc
Dominique Strauss-Kahn (DSK), ex-directeur général du Fonds monétaire international (FMI), également ancien ministre français de l’Économie, des finance...
Assemblées annuelles FMI/BM : Mme Fettah s’entretient avec le SG de l’OCDE
Marrakech – La ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah, a eu des entretiens, jeudi à Marrakech, avec le secrétaire général de l’Organisa...
Incidents de paiement : Hausse vertigineuse de l’encours
Les incidents de paiement poursuivent leur hausse depuis 2014. Selon Bank Al-Maghrib, les incidents de paiement sur chèques non encore régularisés se sont é...
Vidéo. Situation économique et monétaire du Maroc: voici l'analyse du Wali de Bank Al-Maghrib
Le Conseil de BAM qui vient de maintenir inchangé son taux directeur reste toutefois préoccupé par le niveau de l’inflation qui devrait s’accélérer en ...
Maroc : Progrès Significatifs dans la Résilience Climatique et la Décarbonation, Selon le FMI
Le Maroc continue de progresser dans le renforcement de sa résilience climatique et exploite les opportunités de la transition vers une économie bas-carbone,...