Le diagnostic sans détour de Jouahri sur l’économie nationale
Sans langue de bois et avec la lucidité d’un grand expert, Abdellatif Jouahri, gouverneur de Bank Al-Maghrib, dresse un diagnostic franc et dûment appuyé de l’économie nationale. Réformes du marché du travail aux résultats peu convaincants, tissu productif peu compétitif et moins transparent sur le plan fiscal, secteur public peu efficient avec une gouvernance à améliorer, chantiers sociaux complexes et nécessitant des ressources humaines et financières conséquentes…L’analyse de la Banque centrale.
C’est un diagnostic on ne peut plus pragmatique que celui dressé par le gouverneur de Bank
Al-Maghrib (BAM) sur les maux de l’économie nationale, dans le rapport annuel de 2020. Dans son analyse du marché du travail, Abdellatif Jouahri affirme que les stratégies de relance de l’emploi ont eu jusqu’ici des résultats peu convaincants. D’où la nécessité impérieuse d’une véritable refonte des lois et règlementations régissant le marché de l’emploi, notamment le Code du travail et la loi sur le droit de grève. Des réformes envisagées depuis plusieurs années déjà, rappelle Jouahri. L’emploi est intimement lié au tissu productif national et ce dernier pâtit, lui aussi, de plusieurs contraintes, avec des effets négatifs sur la compétitivité de l’économie nationale. Il s’agit principalement, selon le gouverneur de BAM, de la concurrence déloyale, l’évasion fiscale et le manque de transparence, en plus des subventions économiquement et socialement non rentables souvent transformées en véritables niches de rente. Plusieurs chantiers lancés devraient permettre de progresser et méritent une attention particulière. Pour Jouahri, il faudrait notamment veiller à l’application rigoureuse de la loi relative à l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption, récemment adoptée, et assurer la mobilisation des acteurs institutionnels, du secteur privé et de la société civile pour la déclinaison des objectifs de la stratégie nationale en la matière.
Secteur public : gouvernance et efficience font défaut
Le secteur public a fait également l’objet d’une analyse de la Banque centrale. En effet, souligne Jouahri, les établissements et entreprises publics doivent rehausser leur efficience économique. L’administration se doit d’être d’une plus grande efficacité. C’est d’ailleurs ce à quoi aspire la réforme globale du secteur public. Pour le gouverneur de BAM, si certains des chantiers initiés dans ce cadre, tels que la simplification des procédures administratives, progressent à des rythmes satisfaisants, d’autres d’envergure, comme les réformes de la fonction publique ou des EEP, vont devoir requérir une plus grande attention pour les faire aboutir. Il est impératif, selon lui, en particulier, que la gouvernance de ces EEP, leur mode de gestion et la pertinence de leur choix soient soumis à des critères de rendement et de reddition des comptes bien plus exigeants qu’auparavant. L’aboutissement de l’ensemble des chantiers de réforme demeure, selon Jouahri, tributaire de l’émergence d’une élite capable de mener de façon simultanée autant de projets d’envergure et qui doit être dotée du leadership indispensable afin d’assurer la cohérence et la coordination des chantiers à l’œuvre.
Généralisation de la protection sociale : un chantier complexe
L’aboutissement du chantier de la généralisation de la protection sociale reste, pour les autorités publiques et pour toutes les parties prenantes, un grand défi à relever. Selon Jouahri, au vu du niveau du déficit social et de l’insuffisance des infrastructures sanitaires, les ressources financières et humaines ainsi que la mobilisation que ce chantier requerra sont sans précédent. À cela s’ajoute la complexité de sa mise en œuvre au regard de ses implications et de ses imbrications avec tous les volets de la politique publique. Les expériences vécues avec des chantiers de bien moindre envergure tels que la mise en place du Ramed, du registre social unifié ou encore de la réforme largement inachevée des caisses de retraite publiques illustrent le niveau de difficulté auquel il faudrait s’attendre, alerte le wali de BAM.
Par ailleurs, ajoute-t-il, il est clair compte tenu de l’état des Finances publiques que les ressources de l’État seraient largement insuffisantes pour assurer le financement de ce chantier, d’autant plus que l’endettement public a déjà atteint un niveau préoccupant.
Le 02.08.2021
Source web Par : le matin
Les tags en relation
Les articles en relation
Devant le roi, Jouahri appelle à revoir les politiques publiques
Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib./DR À la veille de la Fête du Trône, Abdellatif Jouahri, wali Bank Al-Maghrib, a présenté le rapport annuel ...
Global Finance: Jouahri parmi les 10 meilleurs banquiers centraux
Le Wali de Bank Al-Maghrib (BAM), Abdellatif Jouahri, figure dans le top 10 des meilleurs banquiers centraux, selon le dernier classement du magazine américain...
Réforme du CMI : Baisse des commissions et cession de contrats, vers un nouveau paysage du paiement
Le Centre Monétique Interbancaire (CMI) a réagi aux récentes recommandations du Conseil de la concurrence, formulées à la suite d’une plainte déposée p...
Les principales annonces d’Abdellatif Jouahri à l'issue du conseil de BAM de décembre
Prévisions d'inflation et de croissance, déficits, LPL, réserves de change, banques participatives..., le wali de Bank Al-Maghrib fait le point sur la co...
Le Maroc, meilleur pays du Maghreb pour faire des affaires selon Forbes
Le magazine américain Forbes a dressé son classement 2016 des meilleurs et pires pays où faire des affaires. Le Maroc se situe en 51e position sur les 137...
Le dirham s’envole par rapport à l’euro
Le dirham s’est apprécié de 1,34% vis-à-vis de l’euro et de 2,31% face au dollar américain durant la période du 21 au 27 décembre, selon Bank Al-Maghr...
Chômage, corruption, croissance, etc.: voici les nouvelles recommandations du FMI
Le Fonds Monétaire International salue les efforts entrepris par le Maroc en matière de gestion des finances publiques et d’amélioration du climat des affa...
Augmentation des réserves du FMI: quel intérêt pour le Maroc ?
Devise qui devraient atteindre 328,5 milliards de dirhams (MMDH) à fin 2021 et 338,6 MMDH à fin 2022, soit l’équivalent de plus de 7 mois d’importations ...
La croissance devrait ressortir à 3,3% en 2018 Bank Al-Maghrib maintient inchangé son taux direct
Le Conseil de Bank Al-Maghrib a décidé de ne pas toucher à son taux directeur. La décision de maintenir le taux s’explique par l’évolution récente ...
#MAROC_CORONA_ETAT_D_URGENCE: Sera t-il maintenu ce 10 Octobre 2020 : oui ou non ?
L’état d’urgence sanitaire pourrait être levé définitivement le 10 octobre afin de relancer l'économie nationale, le secteur du tourisme en particu...
«L’objectif de la ZLECAf est d’ériger l’Afrique en zone de libre-échange»
Le Royaume du Maroc apportera sa contribution à bien des égards, que l’on ne saurait résumer à sa seule situation géographique avantageuse, carrefour ent...
Agriculture : la saison est sérieusement compromise
Les indicateurs qui se dégagent sont mitigés. Certains éléments laissent présager une évolution favorable. Mais tout dépendra du mois de janvier. Cet art...