#MAROC_RACHID_BENHARROUSSE_EDUCATION: "Il faut intégrer l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires"

Chercheur au Centre d’études Homme et Espace dans le Monde Méditerranéen de l’Université Mohammed V de Rabat
Rachid Benharrousse, chercheur au Centre d’études Homme et Espace dans le Monde Méditerranéen, de l’Université Mohammed V de Rabat, et au Centre d’études culturelles marocaines, de l’Université de Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès, a récemment publié une étude intitulée “Education sexuelle: la perception de la jeunesse marocaine entre la globalité et l’Islam” au Journal of Contemporary Studies of the Global South, de l’Université de Floride. Il y plaide, notamment, l’intégration de l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires au Maroc pour permettre aux jeunes d’éviter certaines dérives. Explications.
Quelles sont les raisons qui ont motivé la réalisation de cette étude?
Les raisons sont, bien sûr, nombreuses puisque la culture mondiale imprègne déjà la culture des jeunes. Cependant, deux raisons principales doivent être mentionnées. Premièrement, le gouvernement et l’intérêt des jeunes s’éloignent de plus en plus l’un de l’autre, le fossé se creuse à mesure que le PJD s’attache à certaines opinions que les jeunes n’ont plus. Il en résulte une disparité entre le gouvernement et ceux qu’il représente.
Deuxièmement, les réseaux sociaux ont révélé un intérêt croissant des jeunes pour les relations sexuelles avant le mariage. A travers notre étude, nous avons voulu mettre en exergue ces disparités culturelles et sociétales et plaider l’intégration de l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires pour leur permettre d’éviter les risques des relations hors mariage.
Durant vos recherches, vous avez réalisé une enquête auprès de jeunes Marocains âgés de plus de 18 ans. Comment perçoivent-ils l’éducation sexuelle?
Les jeunes qui ont participé à l’enquête appartiennent à différentes professions et habitent différentes localités du Maroc. La majorité d’entre eux souhaitent l’inclusion de l’éducation sexuelle dans les programmes d’études.
Selon vous, l’intégration de l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires au Maroc pourrait-elle permettre de lutter contre cette pratique?
L’objectif premier de l’éducation sexuelle est d’empêcher que les fausses représentations ne soient crues. Actuellement, beaucoup de jeunes perçoivent la pornographie comme une réalité. C’est le coeur du problème. L’éducation par l’abstinence seule ne suffit plus, car ils sont de plus en plus exposés à ces tentations. Ensuite, la réponse gouvernementale actuelle manque d’efficacité et de contemporanéité. L’éducation sexuelle est actuellement une réponse adéquate dans un pays «conservateur».
Justement, cette perception fictive, voire dangereuse, de la sexualité via Internet ne risque-t-elle pas d’avoir des conséquences négatives sur ces futurs parents?
Oui, effectivement. Les futurs parents continueraient à fonctionner et à utiliser des formes culturelles archaïques qui ne sont pas adaptées. Les conséquences négatives vont au-delà des rapports sexuels et concernent les relations affectives, la reproduction, le consentement et l’égalité des sexes. Ainsi, puisque l’éducation à l’abstinence est institutionnalisée, elle n’est axée que sur les relations sexuelles, les notions liées aux relations humaines sont écartées, ce qui entraîne des attitudes négatives comme la violence domestique, le viol, les relations toxiques, etc.
La sexualité est toujours perçue comme un tabou dans la société marocaine. Beaucoup de parents ne souhaitent même pas aborder cette question avec leurs enfants. Cela ne constitue-t-il pas un obstacle majeur pour sa vulgarisation?
Le fossé générationnel entre les parents et les enfants s’est élargi. Les réseaux sociaux ont exposé la jeunesse marocaine au mode de vie occidental dans lequel le sexe, les relations, le consentement, etc., sont normalisés. Au Maroc, les parents sont encore prisonniers de l’idée de «Hachouma», qui structure tout ce qui concerne l’éducation sexuelle. Ils la considéreraient, dans un premier temps, comme une formation immorale et contraire à l’éthique. L’inclusion de l’éducation sexuelle permettrait de changer cette attitude.
Le gouvernement marocain n’a toujours pas intégré ce module dans les écoles en dépit des appels de plusieurs ONG de la société civile. Qui est-ce qui pourrait expliquer un tel blocage, selon vous?
Je ne dirais pas qu’il s’agit d’un blocage, mais plutôt d’une volonté politique du PJD, qui défend une idéologie islamique et conservatrice qui, selon eux, contraste avec l’éducation sexuelle.
Quelles solutions proposez-vous pour une meilleure éducation sexuelle des jeunes Marocains?
Le gouvernement doit élaborer un programme d’éducation sexuelle appropriée pour la société marocaine, en mettant surtout l’accent sur les relations hommes-femmes. Des enquêtes approfondies doivent être réalisées à l’échelle nationale pour connaitre la perception de la sexualité chez les jeunes afin d’éviter les taux croissants de MST et de grossesses non désirées. L’éducation sexuelle n’éradiquerait bien sûr pas ces phénomènes, mais les réduirait progressivement.
Le 11 février 2021
Source web Par : maroc-hebdo.press
Les tags en relation
Les articles en relation

Liaison maritime Agadir-Dakar : Un nouveau corridor pour le transport de marchandises
Une entreprise britannique, en partenariat avec le gouvernement marocain, a annoncé le lancement d'une nouvelle liaison maritime entre Agadir et Dakar. Ce ...

Lutte contre les Fraudes dans la Reconstruction à Al Haouz
Renforcement de la transparence dans la reconstruction des zones sinistrées Face aux défis de la reconstruction après le séisme d'Al Haouz, le gouver...

Essaouira : 2,3 milliards de dirhams pour relancer la station Mogador
Une nouvelle ère s’ouvre pour la station touristique Mogador à Essaouira. Une convention, signée le jeudi 19 décembre, prévoit un investissement colossal...

Recensement 2024 : Démographie, Urbanisation et Distribution Régionale de la Population Marocaine
Le gouvernement marocain a validé jeudi le décret fixant la population légale du Royaume par régions, provinces, préfectures et communes, selon les donnée...

Création d’Entreprises en Ligne : La Plateforme OMPIC
L'OMPIC a étendu à tout le Maroc sa plateforme de création d’entreprises en ligne, accessible via www.directentreprise.ma. Cette initiative permet aux ...

Fermeture des frontières: TUI Fly organise des vols de rapatriement
La compagnie aérienne TUI Fly organise des vols de rapatriement entre le Maroc et la Belgique à la suite de la fermeture des frontières marocaines. Ces de...

Investissements étrangers au Maroc : Nadia Fettah, la méthode gagnante
Un profil technique, un discours sincère et programmatique... : comment la méthode Nadia Fettah a séduit les investisseurs étrangers à l'occasion des A...

#MAROC_JEUNESSE_EDUCATION_SEXUELLE: Etude : Comment les jeunes marocains perçoivent-ils l’éducat
Le débat sur l’éducation sexuelle est sans cesse remis sur la table. S’il est vrai qu’à chaque fois des arguments sont avancés, des idées écartées ...

Le chômage des diplômés universitaires au Maroc atteint un niveau record : un défi pour l'écono
Selon un récent rapport du Haut-Commissariat au Plan, le taux de chômage des diplômés universitaires en 2023 a atteint son niveau le plus élevé depuis deu...

Maroc: les parents d’élèves appellent au report des épreuves du Bac
La Fédération nationale des associations des parents d’élèves du Maroc (FNAPEM) a appelé le gouvernement à reporter les épreuves du baccalauréat 2021....

Taxer ou interdire ? Le dilemme marocain sur la consommation d'alcool
L'augmentation des taxes sur les boissons alcoolisées ne fait pas l'unanimité au parlement marocain. Alors que certains deputes y sont favorables, d...

Iozera et le gouvernement marocain s'associent pour créer un hub d'IA durable à Tétouan
La start-up technologique américaine Iozera, en partenariat avec le gouvernement marocain, annonce une initiative ambitieuse visant à révolutionner le secteu...