Plan Azur: Chronique d’un fiasco annoncé

A peine 3% de taux de réalisation en capacités touristiques
Défaut de pilotage, surdimensionnement…
En dépit de la mobilisation de 85% de la réserve foncière dédiée à la réalisation des projets, seuls 40% ont été mis à disposition des investisseurs
On ne s’y méprend plus: le plan Azur, sous sa mouture actuelle, est synonyme de fiasco. Ce sont les derniers chiffres de la tutelle, elle-même, qui viennent confirmer ce constat. A fin juin, le programme n’en était encore qu’à 6% de ses objectifs en capacité litière à l’horizon 2020 sur le segment résidentiel, et à peine 3% sur la partie touristique. Cela correspond respectivement à un total réalisé de 1.576 lits, contre près de 58.000 prévus dans la Vision 2020, et 1.828 lits sur un total visé d’un peu plus de 28.000 unités sur cette même échéance. Ces statistiques en marge d’une séance au Parlement, en début juillet. Comment en est-on arrivé là? Tout le monde y va de son argumentaire. Mais c’est chez les opérateurs que la langue de bois s’exerce le moins. «Indépendamment des vicissitudes de la conjoncture internationale de ces dernières années, nous avons pêché par excès de volontarisme, d’autant que les instruments de pilotage et de gouvernance nous ont fait cruellement défaut», explique d’entrée un opérateur du secteur. «Faire trop trop vite et simultanément! L’absence de pilotage est venue aggraver les effets de la conjoncture internationale. Au lieu de les atténuer», poursuit la même source.
En attendant, dans le détail de l’état des lieux, les acquis son en effet extrêmement maigres pour les six destinations du programme, même pour celles qui étaient les mieux parties. A Taghazout, sur les 7.450 lits visés en termes de capacités touristiques pour 2020, seuls 720 lits ont été réalisés (360 pour chacun des segments hôteliers et RT/RIP et VVT). Ce qui équivaut à quelque 10% des objectifs initiaux. Ce chiffre est de 6% à Lixus, au niveau de laquelle le groupe Alliances, en pleine restructuration, est près de jeter l’éponge. La tutelle n’exclut pas de trouver un repreneur si le promoteur ne parvient pas à redimensionner et relancer ses projets sur ce site. A la station Mogador, à composante essentiellement hôtelière, les acquis sont estimés à 7% des objectifs fixés pour 2020 pour 406 lits réalisés sur une ambition de 5.450. La situation n’est guère plus reluisante sur les stations Mazagan, Saïdia et Plage Blanche. Aucune capacité hôtelière n’a été concrétisée jusque-là sur le premier site, sur les 2.700 lits visés pour 2020. Le gros des acquis est sur le résidentiel avec juste 6% des objectifs réalisés. Sur Saïdia et Plage Blanche, l’on est aussi bien loin des 12.430 et 22.000 lits respectivement attendus pour 2020, en termes de capacités touristiques. Aucune réalisation sur ce segment. Pourtant, les réserves foncières ont été largement mobilisées pour chacun des sites, si l’on en croit les chiffres de la tutelle. Sur Saïdia, par exemple, les 713 hectares mobilisés ont été entièrement mis à disposition des investisseurs. Ce chiffre est de 201 hectares mis en valorisation sur Lixus, contre un total mobilisé de 468 hectares. Sur Mazagan, c’est 240 hectares qui ont été valorisés sur les 504 hectares mobilisés, et 316 pour Mogador sur les 583 mobilisés. Pour les investisseurs, les limites du programme Azur ne se limitent pas au volet stratégique. Les critiques touchent aussi la structuration de l’offre en elle-même. «Sur certaines stations, Taghazout en particulier, il y a un risque récent de révision des plans d’aménagement par l’introduction subreptice d’immobilier en front de mer!» s’étonne un opérateur majeur du secteur. «Cela, en lieu et place des programmes de Ripts, et sous prétexte que le marché ne suit pas l’offre en résidences touristiques», complète la même source. S’y ajoute une crise de confiance générale de la part des investisseurs et des banquiers, qui n’a pas été assez traitée dans le fond. Cette crise est l’un des défis prioritaires du jour. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon Bank Al-Maghrib, le crédit bancaire mobilisé en faveur du secteur du tourisme a connu une baisse de 9,5% pour totaliser un encours de 16,4 milliards de DH à fin 2015. La part de ce secteur dans le total des crédits a reculé de 0,3 point pour se fixer à 2%. Plus précisément, le segment de la résidence secondaire et touristique connaît une baisse du financement bancaire de l’ordre de 18%. La remontée de la pente sera dure...
Créances en souffrance…
La frilosité des banques est bien réelle pour le secteur. Elle est surtout alimentée par l’importance des créances bancaires en souffrance, ainsi que le manque d’attractivité et de crédibilité des projets, illustrés par les stations inachevées et d’autres en mal de positionnement. Pour la contourner, la tutelle a lancé en janvier dernier un Fonds de garantie de 400 millions de DH pour débloquer le financement. Les opérateurs, pour leur part, parlent plutôt de la nécessité de disposer d’un Fonds de restructuration pour une relance des projets au ralenti. Quant à la Société marocaine d’ingénierie touristique (SMIT), elle veut trouver 20 milliards de DH sur les 5 prochaines années.
Le 31 Août 2016
SOURCE WEB Par L’économiste
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