Amnesty: "L’interdiction des rapports sexuels hors mariage doit être abrogée"

Amnesty international a publié, ce vendredi 20 mai, une déclaration publique où elle appelle à revoir le projet de loi marocain contre la violence faite aux femmes, de manière à y inclure des garanties plus fortes.
L'organisation pointe en particulier "l’absence de définitions exhaustives pour certaines formes de violence, la perpétuation de stéréotypes de genre péjoratifs, ainsi que la persistance de certains obstacles à la justice et à l’octroi de services aux victimes."
Selon l'ONG, le projet de loi définit la violence contre les femmes comme «tout acte résultant d’une discrimination liée au genre et causant aux femmes un préjudice sur le plan physique, psychologique, sexuel ou économique».
Une définition relativement similaire à l’article premier de la Déclaration des Nations-Unies sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes de 1993, mais qui élude les précisions contenues dans l’article 2 de la Déclaration. Lequel article ajoute, en effet, "une liste non exhaustive de formes de violence contre les femmes survenant au sein de la famille et de la société et perpétrées ou cautionnées par des agents de l’État."
De plus, précise Amnesty, une grande partie des infractions nouvellement définies concernent la protection des femmes mariées ou divorcées. En revanche, "aucune nouvelle infraction n’est définie en ce qui concerne d’autres catégories de femmes, qui sont disproportionnellement exposées à la violence, notamment les femmes et les filles migrantes, les femmes et les filles ayant des enfants hors mariage et les femmes et filles souffrant d’un handicap."
Agressions sexuelles et viols
La déclaration d'Amnesty se penche sur l'épineux problème du viol, regrettant notamment que le projet ne modifie pas l’article 486 du code pénal, lequel ne considère pas le viol conjugal comme une infraction pénale à part entière.
Il est recommandé, en outre, que le projet de loi précise que les viols commis par des représentants de l’État dans le cadre de leurs fonctions relèvent de la torture, y compris les policiers. Ce type de viol est défini "sans équivoque comme des actes de torture par la justice pénale internationale, ainsi que par les organes de protection des droits humains au niveau régional et aux Nations-Unies", indique l'ONG.
Le code pénal actuel considère "la violence sexuelle comme une atteinte à l’«honneur», à la «réputation» ou à la «virginité» d’une personne", ce qui a tendance à perpétuer des stéréotypes, tout en encourageant encourage la culpabilisation de la victime, explique la même source. La déclaration indique que "les femmes et les filles ont des droits fondamentaux intrinsèques, et les actes de violence à leur égard doivent être définis comme des crimes contre la personne et des atteintes à l’intégrité physique, et non pas en fonction de leur virginité, de leur statut matrimonial ou de leur situation familiale."
Harcèlement sexuel
L'actuel Code pénal définit le harcèlement sexuel comme un abus d’autorité dans l’objectif de «[harceler] autrui en usant d'ordres, de menaces, de contraintes ou de tout autre moyen, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle».
Pour Amnesty, cette définition est "particulièrement problématique", car elle qualifie "des contacts sexuels forcés de «faveurs», terme vague et ambigu brouillant la question du consentement. Tout contact sexuel forcé, y compris lorsque des ordres ou des menaces ont été proférés, constitue un viol selon les normes internationales en matière de droits humains."
L'ONG recommande "de clarifier cet article ou de l’abroger, afin de garantir que des cas de viol ne donnent pas lieu à des poursuites en vertu de cette disposition moins sévère relative au harcèlement sexuel et que les viols et menaces de viol dont se rendent coupables des représentants de l’État soient explicitement reconnus comme des actes de torture."
Libéraliser les rapports sexuels hors mariage
Dans sa forme actuelle, le projet de loi continue à considérer le mariage, plutôt que le consentement, comme le critère central des relations sexuelles légales, en conservant l’interdiction des relations sexuelles entre adultes consentants hors mariage, y compris les rapports homosexuels. L’avant-projet de loi modifiant le code pénal va plus loin, cherchant à étendre cette interdiction aux «contacts sexuels illicites».
A ce titre, Amnesty rappelle qu'en 2015, "le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations-Unies a demandé aux autorités marocaines de dépénaliser les relations sexuelles entre adultes consentants en dehors du mariage, y compris entre personnes du même sexe."
De même, "des groupes marocains de défense des femmes ont déclaré à Amnesty International que le fait d’ériger en infraction les relations sexuelles entre adultes consentants, en particulier dans les lois sur l’adultère, dissuade les personnes ayant subi un viol de porter plainte, de crainte d’être elles-mêmes poursuivies si les autorités ne croient pas leurs allégations. La criminalisation de relations sexuelles entre adultes consentants enfreint par ailleurs les droits à la vie privée et à la liberté d’expression, et doit être abrogée", souligne l'ONG.
Par ailleurs, "le projet de loi ne prévoit par ailleurs pas l’abrogation de dispositions existantes qui cautionnent les crimes dits d’«honneur» en appliquant des peines réduites aux personnes agressant un-e conjoint-e adultère ou des membres de leur famille dont le comportement sexuel est considéré comme répréhensible." Selon Amnesty International, ces dispositions doivent être abrogées, car elles "encouragent la violence et la possibilité de se faire justice soi-même et accordent l’impunité à des auteurs de violences."
Le 22 Mai 2016
SOURCE WEB Par Médias 24
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