Deux textes de loi qui foulent au pied la Loi suprême

Au Maroc, les choses sont on ne peut plus claires.
La Constitution de 2011 a énoncé dans son article 6 que «la loi est l’expression suprême de la volonté de la nation. Tous, personnes physiques ou morales, y compris les pouvoirs publics, sont égaux devant elle et tenus de s’y soumettre.
Les pouvoirs publics œuvrent à la création des conditions permettant de généraliser l’effectivité de la liberté et de l’égalité des citoyennes et des citoyens, ainsi que de leur participation à la vie politique, économique, culturelle et sociale.
Sont affirmés les principes de constitutionnalité, de hiérarchie et d’obligation de publicité des normes juridiques.
La loi ne peut avoir d’effet rétroactif».
On a beau lire et relire la dernière phrase de ce paragraphe, elle est d’une clarté aveuglante.
La loi ne peut avoir d’effet rétroactif. Point. Il n’est pas question d’établir un quelconque distinguo entre les différentes lois quelle qu’en soit la hiérarchie des normes juridiques comme c’est le cas sous certains cieux; mais de loi, quelle qu’elle soit. Telle est notre Constitution. Peut-on lui faire dire le contraire?
Ni le gouvernement, ni le juge ne peuvent porter atteinte à cet état de fait en admettant des exceptions au principe, fussent-elles justifiées par ce que l’administration peut présenter comme participant de l’intérêt général. A vrai dire, on ne peut ni comprendre ni admettre que le gouvernement Benkirane ait fait fi de ce principe intangible. La décision du Conseil constitutionnel du 31 décembre 2001 ayant établi que le principe de non-rétroactivité des lois peut connaître des exceptions par la loi de Finances, pourrait-elle justifier ce qui est advenu dans le cas des enseignants stagiaires ? Nullement. Particulièrement si l’on fonde l’analyse sur le référentiel islamique du parti qui mène l’actuelle majorité gouvernementale.
En effet, le verset 15 de la Sourate du voyage nocturne : «Nous ne sévissons pas sans que nous ayons envoyé un Prophète» (Coran). C’est dire qu’au-delà de tout texte confectionné par les êtres humains, c’est un principe divin qui devrait s’imposer dans un pays où l’islam est la religion de l’Etat et constitue une composante essentielle de notre bloc de constitutionnalité. Par conséquent, l’application rétroactive et au forceps des deux décrets séparant la formation des enseignants stagiaires de leur recrutement direct au sein des établissements scolaires publics et réduisant de moitié leurs bourses d’études ne peut être que nulle et de nul effet.
A moins que le gouvernement n’ait voulu, en appliquant sa décision, faire en sorte que le droit n’ait plus aucune vertu protectrice et qu’il devienne, de ce fait, cette source d’inquiétudes et de déboires qui caractérise si bien les situations de déni de justice et d’Etat de non-droit.
Le 08 Février 2016
SOURCE WEB Par Libération
Les tags en relation
Les articles en relation

Maroc : Le prochain gouvernement sous l’influence de super-ministres technocrates
A l’heure où le PJD et le PAM se disputent la première place du podium aux législatives du 7 octobre, le prochain chef du gouvernement aura des prérogativ...

#MAROC_Nouveau_modèle_de_développement: la CSMD pour une réforme de la Constitution?
Le débat sur l'amendement de la Constitution refait surface. Cette fois, ce ne sont plus les partis qui le revendiquent. La question devrait faire, en effe...

Discours royal: un nouveau modèle de développement pour le Maroc
Ce fut l'un des points d'orgue du discours du roi à l'occasion de la rentrée parlementaire: le Maroc doit concevoir un nouveau modèle de dévelop...

Maroc: toujours pas de nouveau gouvernement un mois après les élections
Un mois après sa victoire aux législatives au Maroc, le Premier ministre islamiste Abdelilah Benkirane poursuit ses consultations pour la formation de sa futu...

Rentrée politique: un calendrier chargé
Le 7 octobre 2016 marquera la fin de la législature et de facto celle du gouvernement. L’agenda des mois précédant et suivant le scrutin législatif est do...

Conflit d’intérêts : la station de dessalement critiquée
L'attribution du marché de la future station de dessalement de Casablanca, estimé à 6,5 milliards de dirhams, soulève des interrogations sur l’éthiqu...

Maroc: le boycott ferait-il tomber le gouvernement?
La campagne de boycott, initiée sur Facebook, a remporté un succès inouï et a eu l’adhésion de nombreux citoyens. Cela a eu des répercussions sur le chi...

REPRISE DU DIALOGUE DE SOURDS ENTRE BENKIRANE ET AKHENOUCH
Les mauvaises habitudes et le blocage ont la peau dure pour repousser une nouvelle fois l’issue des tractations pour la formation du nouveau gouvernement aux ...

Vidéo. Matières scientifiques en langues étrangères: Ayouch recadre Benkirane
Une rencontre a été organisée, hier samedi 6 avril à Fès, sous le thème "Quelle langue enseigner au Maroc?". Ladite rencontre intervient suite à la polé...

Gouvernement politique fort et stabilité sociale (Par Bilal Talidi)
A. Benkirane et S. El Othmani, l’ancien et l’actuel chef du gouvernement islamistes : Le PJD ou le mythe de la paix sociale Comme attendu, le discours du...

La réforme de l'Education sera lancée par... Abdelilah Benkirane
Le chef du gouvernement a rencontré mercredi le président du Conseil supérieur de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique, Omar Azz...