Paléontologie : Une nouvelle espèce de grenouilles découverte au Maroc
Dans une nouvelle étude, deux chercheurs décrivent «Cretadhefdaa taouzensis», une nouvelle espèce de grenouilles découverte grâce à des fossiles des monts Kem-Kem, qui constitue «les plus anciens néobatraciens d'Afrique».
Que les monts Kem-Kem, dans le Sud-est du Maroc, soient une mine d’or pour les paléontologues est un secret de polichinelle. Ce constat vient d’être encore une fois renforcé grâce à une nouvelle étude publiée par deux chercheurs du Centre de recherche en paléontologie de la Sorbonne et du Département d'histoire naturelle de l’Université de Floride.
Cette étude annonce l’identification d’un nouveau genre et une nouvelle espèce de grenouilles, sur la base de fossiles collectés en 1995 lors d'une expédition organisée par l'Université de Chicago et le Service géologique du Maroc dans quatre localités différentes près de Taouz et Oum Tkout. L’étude précise que ces fossiles proviennent de la Formation de Douira du Kem Kem, et sont ainsi datés du Cénomanien moyen, soit environ 96 à 95 millions d’années. Les fossiles d'anoures sont conservés dans la collection de recherche sur la paléontologie des vertébrés de l'Université de Chicago, précise l’étude acceptée le 17 juin dernier et publiée le 15 juillet.
Une nouvelle analyse de spécimens d'anoures des lits de Kem Kem
L’étude explique que les chercheurs pensent que les Neobatrachia, sous-ordre d'amphibiens de l'ordre des anoures représentant la majorité de la diversité des anoures existants, a émergé et s'est diversifié au cours du Crétacé. «La majeure partie de la diversification précoce des néobatraciens s'est produite dans le sud du Gondwana, en particulier dans les régions qui sont aujourd'hui l'Amérique du Sud et l'Afrique», rappelle-t-elle.
Mais alors que cinq néobatraciens éteints du Crétacé d'Amérique du Sud ont été découverts au cours de la dernière décennie, un seul est connu d'Afrique. Un constat expliqué notamment par le manque de spécimens bien conservés, la sous-étude des vestiges fragmentaires et le manque de sites connus du Crétacé en Afrique. «L'étude des restes fragmentaires d'anoures d'Afrique pourrait permettre l'identification de néobatrachiens jusque-là inconnus, permettant une meilleure compréhension de leur diversification précoce», expliquent les deux chercheurs.
Ceux-ci ont ainsi analysé à nouveau plusieurs spécimens d'anoures précédemment décrits provenant des lits de Kem Kem, y compris en utilisant la tomodensitométrie, un examen radiologique qui capte des images détaillées en trois dimensions. Grâce à leur étude ostéologique, ils ont déterminé que plusieurs os crâniens et vertèbres représentent un nouveau taxon hyperossifié.
Les plus anciens néobatraciens d'Afrique
La comparaison avec d'autres anoures hyperossifiés a révélé des similitudes et des affinités de ce nouveau taxon avec les néobatrachiens Beelzebufo, une espèce éteinte d'amphibiens de la famille des Ceratophryidae surnommée «grenouille de l'enfer», et Ceratophrys (existant). Les analyses phylogénétiques ont soutenu cette affinité, plaçant la nouvelle espèce dans la sous-famille des Neobatrachia, dans un clade non résolu de Ceratophryidae. «Ce taxon est le plus ancien néobatracien d'Afrique», se félicitent les deux chercheurs.
«Notre étude confirme la thèse selon laquelle au moins trois taxons d’anoures sont présents dans les lits de Kem Kem au Maroc. Le nouveau Cretadhefdaa taouzensis décrit peut être attribué aux Neobatrachia, ce qui en fait la plus ancienne occurrence du clade en dehors de l’Amérique du Sud et seulement la deuxième occurrence dans le Crétacé d’Afrique.»
Extrait de l’étude
Les deux experts ajoutent que plusieurs os postcrâniens indiquent également une affinité avec Neobatrachia, mais ne peuvent être associés de façon définitive ni à Cretadhefdaa (l’espèce nouvellement découverte) ni à un autre taxon. Ils ajoutent, plus loin, que la présence d’un néobatracien dans le Kem Kem du cénomanien (premier étage stratigraphique du Crétacé supérieur et qui s'étend entre -100,5 et -93,9 millions d’années) démontre que les néobatraciens étaient déjà répandus dans tout le sud du Gondwana au cours du Crétacé supérieur.
Le 21 juillet 2022
Source web par : yabiladi
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