Les frais bancaires ont augmenté d’environ 30% en 8 ans !

Les banques ont engrangé plus de 7,3 milliards de DH de commissions en 2018. Les commissions sur le package, la tenue de compte et la carte bancaire pèsent 80% du total. Chaque banque fait payer à sa clientèle une centaine de prestations. En dehors des prestations rendues obligatoirement gratuites par BAM, très peu de services ont vu leurs tarifs baisser ou ont été rendus à titre gracieux.
En 2018, les banques ont engrangé, encore, 7,3 milliards de DH de commissions, en hausse de 5,3% par rapport à 2017 après une hausse de 9,4%. D’après les indicateurs d’activité et de rentabilité des premiers six mois de l’année en cours, cette rubrique de produits continue de collecter des milliards de DH !
En remontant un peu plus loin, le secteur s’est fait 3,3 milliards de DH de recettes additionnelles au cours des huit dernières années, sur les frais bancaires, notamment ceux liés au fonctionnement des comptes et moyens de paiement. En 2010, les commissions ne rapportaient pas plus de 4 milliards. Désormais, elles contribuent à hauteur de 15% dans le produit net bancaire contre 12% en 2010.
Certes, cette tendance haussière des revenus des commissions est à lier à l’augmentation du nombre de comptes et des cartes en circulation. Mais pas que cela! Les banques, dont quelques responsables l’expriment ouvertement, ont eu clairement la main lourde sur les différentes commissions facturées à la clientèle. Leur démarche était claire et assumée. «Face à la décélération du crédit et l’amenuisement des marges sur intérêt, qui représentent le gagne-pain du secteur (72% du PNB en 2018), les établissements de crédit se sont mis à rattraper le manque à gagner sur les frais bancaires», rappelle-t-on dans le secteur.
De plus, il ne faut pas perdre de vue que l’activité consolidée des groupes bancaires, qui couvre les métiers relevant de leur activité au Maroc et celle réalisée à l’étranger à travers des filiales ou succursales, les métiers d’assurance et de gestion d’actifs ainsi que les financements spécialisés, reste dominée par la composante bancaire qui contribue pour près de 91% à l’ensemble. «Ce qui veut dire que la marge d’intérêt et la marge sur commissions de la banque conditionnent la rentabilité de tout le groupe», relève un directeur dans une société d’intermédiation financière.
Hormis la baisse des bénéfices sur l’activité de crédit et sur les opérations de marché, un autre facteur a poussé les banques à revoir leurs tarifs à la hausse : l’obligation de rendre gratuits 22 services bancaires instaurée par Bank Al-Maghrib, en deux temps. Après cette cure d’amaigrissement forcée, en 2010 et en 2016, suivie des arrêtés des ministères de l’industrie et des finances (complétant la loi sur la protection des consommateurs) qui ont introduit de nouveaux plafonds pour les indemnités de remboursement anticipé du crédit immobilier (un mois d’intérêts, sans dépasser 2% du capital restant dû), et les frais de dossier pour ce même financement (limités à 0,1% du montant du crédit), les opérateurs du secteur ont dû prendre d’une main ce qu’ils ont donné de l’autre. L’on assiste alors depuis à des augmentations successives des frais ! Plusieurs établissements ont revu 2 à 3 fois leurs grilles en une année pour s’assurer que les comptes ont été bien faits et que toutes les niches de commissionnement ont été exploitées… En face, force est de constater qu’en dehors des opérations rendues gratuites obligatoirement, très peu de services ont vu leurs tarifs baisser ou ont été offerts à titre gracieux.
Même sur la liste des opérations gratuites, les spécialistes font remarquer qu’il s’agit de services peu courants qui pèsent très peu dans les revenus des commissions. «Pour aller de pair avec l’esprit de l’initiative de BAM, les banques ont dû faire des concessions sur la tarification des opérations les plus courantes et les plus rémunératrices, notamment les frais sur le fonctionnement du compte et les moyens de paiement et les dates de valeur qui dans beaucoup de cas n’ont pas lieu d’être facturées», estime un directeur financier. Or, sur l’ensemble de ces rubriques stratégiques, la tendance observée est à l’augmentation des tarifs.
Une revue sommaire statique (sans comparaison dans le temps) des grilles tarifaires des différentes banques actuellement en vigueur donne une idée sur l’étendue des opérations payantes. En moyenne, chaque banque fait payer à sa clientèle une centaine de prestations, y compris celles des plus élémentaires.
Dans le détail, les prix pratiqués sont proches, voire identiques quand il s’agit de package, fonctionnement du compte, monétique et moyens de paiement. Par contre, des écarts parfois substantiels sont observés dans la tarification des opérations à l’international, les frais liés aux demandes de crédit, et les commissions sur les opérations de titres. En l’absence d’une vision claire sur les grilles précédentes et celles actuellement en vigueur (sachant que les banques ont été, toutes, approchées pour nous fournir les recueils de leurs tarifs anciens), l’analyse dynamique (évolution des commissions dans le temps) sera impossible d’un point de vue méthodologique. Toutefois, l’Indice des prix des services bancaires (IPSB), basé sur les reportings communiqués chaque année depuis 2011 par les banques à BAM, donne une idée exacte sur l’évolution des frais bancaires.
A en juger par les calculs de la banque centrale, les banques ont fait augmenter leurs tarifs des services bancaires d’environ 27% depuis 2011. A fin 2018, l’IPSB s’est établi à 126,76, enregistrant ainsi une hausse de 26 points par rapport à l’année de référence 2011. Cette tendance haussière par rapport à l’année de référence traduit le renchérissement des services bancaires qui composent le panier, notamment du «Package», des «Frais de tenue de compte» et de la «Carte bancaire». Les commissions perçues sur le package, la tenue de compte et la carte bancaire continuent de représenter plus de 80% du total des commissions depuis 8 ans.
Cela dit, plusieurs banquiers affirment qu’après les hausses successives opérées sur les cinq dernières années, les banques ont très peu de marges pour augmenter davantage leurs tarifs. L’IPSB de 2018 confirme les propos de ces banquiers. Il ressort en quasi-stagnation par rapport à 2017.
De plus, la reprise progressive du crédit et de la marge d’intermédiation qui en découle, fait en sorte que les banques y vont avec plus de douceur. En 2018, le produit net d’intérêt sur les opérations avec la clientèle, composante prépondérante de la marge d’intérêt, s’est accru de 6,3% à 31,8 milliards de DH, sous l’effet d’une hausse des intérêts perçus sur les crédits de 4,1% à 40,3.
Aussi, la concurrence entre les différents établissements de la place les pousse à surveiller davantage leurs grilles tarifaires pour ne pas décourager des clients, notamment les petits revenus, très sensibles aux frais bancaires. Dans le même registre, le démarrage d’activité des établissements de paiement constitue une source de concurrence d’un nouvel entrant sur le marché pour les banques. D’après les dernières données de BAM, il est désormais possible pour un individu de détenir un compte et une carte auprès de ces entités, moyennant 10 à 20 DH le mois.
Les comptes de paiement, des concurrents redoutables pour les banques ?
Le compte de paiement, conformément à l’article 16 de la loi n°103-12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, signifie tout compte détenu au nom d’un utilisateur de services de paiement et qui est exclusivement utilisé aux fins d’opérations de paiement. Il existe trois types de comptes de paiement :
• les comptes de paiement de niveau1: dont le plafond maximum ne doit, à aucun moment, dépasser un montant de 200 dirhams. L’ouverture de ces comptes requiert que le client dispose d’un numéro national de téléphonie mobile actif ;
• les comptes de paiement de niveau2: dont le plafond maximum ne doit, à aucun moment, dépasser un montant de 5 000 dirhams. L’ouverture de ces comptes nécessite, suite à un entretien, de remplir une fiche d’ouverture de compte au nom du titulaire, sur présentation d’un document d’identité officiel, en cours de validité, délivré par une autorité marocaine habilitée ou une autorité étrangère reconnue et portant la photographie du client et dont une copie est annexée à ladite fiche d’ouverture de compte ;
• les comptes de paiement de niveau3: dont le plafond maximum ne doit, à aucun moment, dépasser un montant de 20 000 dirhams. L’ouverture de ces comptes se fait suite à un entretien avec le titulaire du compte, en vue de recueillir tous les renseignements nécessaires pour vérifier son identité, notamment le document d’identité officiel fourni pour l’identification, ses revenus, ainsi qu’un justificatif de son domicile.
Les autres sources de commissions également en hausse !
Les commissions sur ventes des produits d’assurance se sont accrues de 10,4% à 343MDH en lien avec la hausse des primes collectées au titre de la bancassurance de près de 8% et celles perçues sur les prestations des services de crédit ont augmenté de 1,9% à 552 MDH pour une progression du crédit de 6,5%. Les commissions sur opérations de change ont également augmenté de 21,4% à 390 MDH, reflétant aussi la hausse des engagements sur cette activité. En revanche, les commissions perçues sur titres en gestion et en dépôt ont reculé de 9,6% à 429 MDH, en relation avec la faiblesse des transactions sur le marché boursier.
Le 03.11.2019
Source web Par la vie eco
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