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Croissance française: ça sent le roussi

Croissance française: ça sent le roussi

Alors que l'exécutif peaufine ses derniers arbitrages budgétaires, les signes d'un freinage de la croissance se multiplient.

Que les flonflons le soir de la victoire des bleus au Mondial de Football paraissent loin. Il y a un mois et demi à peine, Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie rêvait même d'un effet "ballon rond" sur le moral des ménages et donc sur la croissance. Las, le retour à la réalité en cette fin d'été est brutal tandis que l'affaire Benalla a largement écorné l'image du Président. 

Si on ne peut pas vraiment parler d'un coup de froid sur l'activité, la tendance est clairement au freinage. D'après les derniers pronostics recueillis par Consensus Economics auprès d'une vingtaine d'économistes, la croissance en France atteindrait seulement 1,7 % cette année et autant l'année suivante... loin des 2,3% enregistrés l'an passé. Des prévisions inférieures aux chiffres avancés par Bercy au printemps, à savoir 2 % cette année et 1,9 % l'an prochain, et qui devront être révisés dans le projet de loi de finances présenté fin septembre.

Même l'ex-ministre des Finances et proche de François Hollande, Michel Sapin, y est allé jeudi matin sur France 2 de son petit coup de pied estimant qu'il serait "extrêmement difficile" pour la France d'atteindre son objectif de 1,8% de croissance en 2018, en raison de "mauvaises décisions" du gouvernement.

Commerce, industrie, bâtiment, ça freine partout

Dans la foulée, l'Insee a publié toute une batterie d'enquêtes confirmant le ralentissement en cours. Que ce soit dans le commerce, la réparation automobile, l'industrie et même le bâtiment, le climat des affaires se dégrade. Plus inquiétant, les industriels interrogés par l'Institut ont même révisé à la baisse leurs perspectives d'investissement pour cette année : 4% de hausse seulement contre une progression de 5% prévue en avril dernier. Et les économistes de l'Insee d'enfoncer le clou en écrivant "que depuis 2004, ces anticipations faites au coeur de l'été sur-estiment systématiquement la réalité". En clair, ça pourrait être pire...

Evidemment, ce ralentissement arrive au plus mauvais moment pour l'exécutif alors qu'il peaufine les derniers arbitrages budgétaires. Dans les dernières prévisions du gouvernement, le déficit public devait redescendre à 2,3 % du PIB cette année comme l'an prochain (où le surcoût constitué par la transformation du CICE en baisse de charges pèsera). Mais Joël Giraud, le rapporteur du budget à l'Assemblée nationale, avait prévenu en juillet : "La cible de déficit public pour 2019 pourrait être relevée à 2,6 % du PIB en cas de fléchissement de la croissance à 1,7 % en 2018 et 2019".

Le dérapage de l'inflation grignote le pouvoir d'achat

A Bercy, on veut croire à un sursaut en fin d'année. Après tout, la suppression de la taxe d'habitation pour bon nombre de Français et la deuxième phase de la baisse des cotisations sociales devraient naturellement rajouter un peu de beurre dans les épinards. Le pouvoir d'achat pourrait progresser de 1,5% sur le seul dernier trimestre 2018, d'après les dernières projections de l'Insee.

À condition évidemment que l'inflation ne continue pas de déraper et de grignoter ces maigres gains. Or, en juillet, celle-ci a atteint son plus haut niveau depuis 2012 (2,3% sur un an). Essence, tabac, alimentation, le coup de chaud sur les étiquettes est visible. L'effet "canicule" est passé par là : par rapport à la même période de l'an passé, les prix des produits frais affichent un bond de 6,4%. Et d'après le dernier relevé de l'association Famille Rurale, manger 5 fruits et légumes par jour coûte à une famille de 4 personnes 160 euros par mois, soit 4,5% de plus qu'en 2017...

Pas certain que dans ces conditions les Français perçoivent un réel mieux sur leur porte-monnaie d'ici la fin de l'année. "Le risque, c'est que la croissance française tombe dans un régime de croisière très mou. D'autant que l'investissement des entreprises est décevant et que la productivité est faible. Aujourd'hui, les difficultés de recrutement de personnel qualifié sont telle que la croissance des entreprises est bridée", s'inquiète l'économiste de la Banque Postale Stéphane Déo. Pas vraiment le scénario qu'avait imaginé Emmanuel Macron pour sa rentrée 2018.

Le 23 août 2018                                

Source web par : lexpress                  

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