Energies renouvelables: La loi 13-09 sera amendée
De source sûre, Médias24 apprend qu'un amendement de la loi 13-09 est envisagé. L'objectif est de réorienter le cadre règlementaire de production d’énergie renouvelable. Si le Masen estime prioritaire le développement d’une filière industrielle, les professionnels du secteur affichent pour leur part un certain scepticisme.
Les acteurs du secteur seront probablement invités fin mars 2018, à discuter des différentes propositions visant à opérer une refonte de la loi 13-09, apprend Médias24 de source sûre.
Pour rappel, la loi 13-09 autorise la production d’électricité, d’origine renouvelable, par des producteurs publics mais aussi privés, ainsi que la possibilité de revendre l’énergie produite à un groupement de consommateurs – voire à l’ONEE s’il y a excédent de production.
Son périmètre d’application comprend la haute, moyenne, ainsi que la basse tension depuis son amendement par la loi 58-15. Un amendement qui visait notamment "le développement de la filière industrielle de petites et moyennes installations, notamment pour le photovoltaïque et la création de l’emploi dans le secteur des énergies renouvelables’’ peut-on lire dans le texte de loi.
Lors d’une rencontre avec la presse qui s’est tenue il y a quelques semaines, le président du Masen, Mustapha Bakkoury, s’était prononcé en faveur de l’émergence d’une industrie renouvelable 100% made in Morocco, avec une série de mesures incitatives et un accompagnement des professionnels. Sauf que ces derniers ne partagent pas actuellement cet enthousiasme…
‘’Nous avons appris que des discussions étaient en cours en vue d’un possible amendement de la loi 13-09. Mais à ce jour, aucune partie ne nous a sollicités,’’ regrette Khalid Semmaoui, président de l’Amisole (Association marocaine des industries solaires et éoliennes).
Association professionnelle de référence dans le secteur, l’Amisole – créée il y a plus de 30 ans déjà, regroupe une centaine d’opérateurs, majoritairement des PME. Son président fustige la complexité et la lourdeur des procédures encadrant la production d’énergie de source renouvelable.
Complexité et lourdeurs administratives
‘’Nous avons rencontré le ministre de l’Energie et des Mines en janvier 2018, afin de soumettre les doléances du secteur. Rabbah s’est montré très attentif, et a donné des instructions à ses équipes en vue d’organiser - fin février, un atelier réunissant les professionnels. A ce jour, rien n’a été fait…’’
S’il déplore la non-implication des professionnels dans la refonte de la loi 13-09, Khalid Semmaoui reconnaît toutefois la nécessité d’amender cette loi "très contraignante’’.
"Au sein de notre association professionnelle, nous estimons qu’il faut lever des barrières si l’on veut faire émerger une industrie forte et compétitive. Or le décret d’application relatif à la moyenne tension (MT) est extrêmement complexe, presque inapplicable. Même les gestionnaires de réseau m’ont confié être dans le flou’’.
La complexité qui entrave le développement de la production MT semble également toucher les segments de la haute et basse tension (HT-BT).
La BT fera très probablement l’objet d’un amendement dans la future version de la loi 13-09. Si elle est correctement ficelée, cette loi permettra à des particuliers de produire leur propre électricité à partir d’énergie renouvelable – ainsi que d’en revendre le surplus en le réinjectant dans le réseau domestique.
‘’Les premières réunions portant sur la BT remontent à deux ans déjà, sans qu’on n’ait réalisé d’avancées significatives. Principalement en raison de la complexité de notre système de distribution et ses trois gestionnaires: l’ONEE, les régies de distribution et les délégataires privés. Lors de notre rencontre de janvier dernier, Rabbah a reconnu la difficulté à mettre en place la BT, car cela nécessite justement l’adhésion des différents gestionnaires de réseau. Or les intérêts peuvent être divergents, surtout parmi les gestionnaires privés qui assimilent la production et l’injection dans le réseau d’électricité BT à une perte de chiffre d’affaires’’.
Quel est le réel taux d’intégration ‘renouvelable’ ?
L’autre préoccupation est d’ordre technique. L’ONEE, selon le président de l’Amisole, voit d’un mauvais œil la prolifération d’installations privées BT, en raison de risques de perturbation du réseau national.
Des projets de production d’électricité propre à haute tension n'ont pas été autorisés, "le refus étant motivé par la capacité restreinte du réseau national, qui ne permet pas l’implantation de nouveaux projets HT. C’est un argument qui peut se comprendre, mais il aurait été judicieux de prévenir les investisseurs en amont, avant d’entamer de coûteuses démarches’’.
Les professionnels estiment que les projets HT sont hors de portée des PME marocaines, là où, paradoxalement, les discours officiels mettent en avant l’apport de ces structures en termes de croissance et de création d’emplois.
"Il faut se demander ce que l’on veut vraiment. Réaliser d’importantes capacités de production renouvelables, ou profiter de l’impulsion royale pour aussi bâtir une industrie et un savoir-faire. Masen peut donner l’exemple en dédiant 5% de ses projets aux PME nationales,’’ estime Semmaoui. "Nous sommes conscients des éventuels problèmes de qualité des PME, sur ce type de projets. C’est la raison pour laquelle l’Amisole a initié un projet de labellisation, qui sera un gage de qualité de service. Ceci parallèlement au démarrage d’études visant à contrecarrer l’argument de l’ONEE sur une éventuelle déstabilisation du réseau électrique’’.
Khalid Semmaoui va plus loin et remet en question les taux d’intégration communiqués par Masen – 30% sur Noor 1 et 35% sur Noor 2 et 3. "Les taux affichés sont quelque peu trompeurs. La vraie question étant: sur un taux d’intégration de 35%, quelle est la part de savoir-faire ‘renouvelable’? Faire travailler des PME sur des chantiers de génie civil est une bonne chose, mais c’est un savoir-faire qui existe déjà au Maroc. Si l’on déduit ce type de travaux, que resterait-il comme taux d’intégration réellement renouvelable?’’.
Ce qui est certain, c’est que les professionnels comptent bien avoir leur part du gâteau. Les multiples projets structurants, s’ils sont correctement mis à profit, viendraient favoriser l’émergence d’une industrie locale renouvelable, disposant d’un réel savoir-faire exportable.
‘’La période que nous vivons est extrêmement propice au développement des énergies renouvelables. Avec un engouement réel au Maroc, aussi bien de la part des particuliers que des professionnels. Dans les années 90, le PERG (Programme d’électrification rurale global) a permis de bâtir une solide industrie électrique, qui a su exporter son savoir-faire en Afrique subsaharienne. Aujourd’hui, nous disposons de la même opportunité, à condition de savoir la saisir…’’ conclut Khalid Semmaoui.
Le 12 mars 2018
Source Web : Médias 24
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