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Le Maroc, entre paroles et actes

Le Maroc, entre paroles et actes

Le Maroc mise et ouvre ses portes aux grandes écoles françaises pour former ses élites et attirer les étudiants africains, et c'est très bien. Mais d'un autre côté, sa population compte (officiellement) plus de 30% d'analphabètes, 25% des 5-16 ans sont non-scolarisés, et son système éducatif public est à bout de souffle.

Le Maroc construit de magnifiques cliniques suréquipées, de chirurgie esthétique et autres, des centres de remises en forme dernier cri, et finance des hôpitaux en Afrique. Mais le secteur de la santé est en crise, les hôpitaux publics manquent de tout et sont dans un état lamentable, les effectifs sont mal formés, sont sous-payés et manquent pertinemment de moyens, le matériel est vétuste, voire inexistant dans certains cas, l'hygiène est déplorable, il n'y a pas assez d'ambulances et elles sont mal équipées. Les seuls hôpitaux aux normes et à la qualité irréprochable (Cheikh Khalifa Zaïd par exemple) pratiquent des prix de cliniques privées.

Le Maroc bâtit des projets pharaoniques de marinas, corniches, complexes hôteliers et résidences grand luxe dans ses grandes villes et dans ses stations balnéaires "fantômes", mais n'est même pas capable de loger ses citoyens les plus démunis dans des habitations dignes, et quand il le fait, c'est parfois pire. Le relogement des bidonvilles s'établit dans des ghettos, un modèle désastreux qui est un échec aux Etats-Unis comme en France, parqué dans les banlieues, et qui creuse encore plus les fossés sociaux, accentue la stigmatisation et par conséquent la haine de soi et de l'autre.

Le Maroc s'équipe de systèmes informatiques dans les administrations, de programmes de télédéclaration pour les entreprises afin de faciliter les contrôles et les flux, fait d'énormes efforts et met des moyens considérables dans sa lutte contre les fraudes. Mais la corruption est toujours aussi présente qu'avant, à petite comme à grande échelle, aucun secteur n'est épargné: système judiciaire, policier, administratif, politique, industriel... Et même si quelques têtes tombent de temps en temps pour l'opinion internationale et pour calmer les tensions sociales, cela continue de gangrener et de ralentir considérablement l'économie du pays.

Le Maroc met en place des réseaux d'infrastructures ferroviaires de grande envergure: LGV, tramway dans les métropoles... mais peine à gérer correctement les réseaux de transport existants. Les usagers ONCF se plaignent à longueur de journée de l'état déplorable des trains ainsi que des constants retards, les bus publics sont surtout des dangers publics aussi bien pour les passagers que pour les autres automobilistes et les piétons, les taxis (grands et petits) sont une mafia arrogante qui fait sa loi, fixe ses règles et ne connaît pas la notion de service.

Le Maroc est précurseur dans sa vision à long terme sur les énergies renouvelables. En organisant la COP22, il a voulu montrer au monde entier l'image d'un pays sensible à l'impact du développement durable sur les écosystèmes et l'importance que cela a sur les générations futures, mais ses villes sont des décharges publiques géantes avec un système de traitement des déchets quasi-inexistant et des organismes de gestion inefficaces. Zéro Mika pour nous endormir, mais c'est surtout le Zéro Kelma qui est entrain de réveiller les consciences.

Le Maroc est un modèle incontestable dans le domaine des renseignements généraux, dont les différents services ont montré une efficacité exemplaire pour démanteler des cellules terroristes, tant au niveau intérieur qu'international. Mais paradoxalement, la plupart des terroristes de ces dernières années opérants en Europe sont Marocains ou d'origine marocaine. Et même si je suis toujours aussi admiratif de ce grand homme visionnaire qui a dit un jour qu'à défaut d'exporter ses tomates, le Maroc exportera ses terroristes.

Le Maroc est un état religieux, qui a parfaitement su s'imposer comme un leader spirituel modéré et tolérant en parfaite harmonie avec ses convictions, ses traditions, ses valeurs, et son passé multiculturel, subtil mélange et bon dosage de conservatisme et de modernisme. Mais parmi son peuple, certains se prennent pour une assemblée élue dotée d'une vertu divine et pure, ayant pour devoir de juger son prochain et clouant au pilori tous ceux et surtout celles qui, de leur point de vue, s'écartent du droit chemin, et dont l'unique procès est un châtiment immédiat et violant. Cette assemblée souffre de maux intérieurs profonds, une sorte de frustration engendrée par des codes fondamentalistes, par une certaine forme de peur ainsi que par un manque incontestable d'instruction, qui se manifeste maladroitement par de la haine.

Bref, on pourrait en parler des heures, s'étaler sur la manière dont les autorités traitent les migrants, sur l'incivisme et l'insécurité grandissants, sur l'hypocrisie du cannabis, sur l'7ogra infligé au peuple par ceux qui se pensent au-dessus des lois et se croient tout permis parce qu'ils ont un semblant de galon sur l'épaule, sur le fléau de la mendicité de métier, manipulé par des truands, sur les marchands ambulants qui envahissent les villes car ils n'ont aucun autre moyen de survivre et plus rien à perdre,

sur l'endoctrinement et l'abrutissement religieux dans les quartiers défavorisés, sur nos élites intellectuelles qui se sont embourgeoisées et qui vivent leur "marocanité occidentale" avec vue sur mer et vue sur kariane, loin des réalités actuelles de leur pays, sur ces ouled l'fchouch et autres filles et fils d'arrivistes qui pensent que tout leur est dû et que tout le monde bosse pour leur père, puisque ce dernier les a éduqués comme ça, ou ne les a pas éduqués du tout d'ailleurs, en parler des heures oui, et puis se taire.

Signé un étranger de corps, mais Marocain de coeur, qui se fait du mauvais sang.

Le 30 août 2017

SOURCE WEB Par La Depeche

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