Maroc. Ces entreprises qui basculent dans l’informel
Au Maroc, la question fait délier les langues, même si très peu d’opérateurs économiques acceptent d’en parler à visage découvert. C’est que l’informel demeure un sujet tabou, une pratique parfois tolérée, mais jamais assumée.
L’existence de l’informel n’est pas un phénomène nouveau. Mais de l’avis de nombreux décideurs économiques, il connaît une accélération sans précédent, depuis quelques années, notamment dans sa composante de l'informel d’entreprise, par opposition à l’informel social (ferracha…).
Pire encore, de nombreuses entreprises, évoluant par le passé dans le secteur organisé, ont fini par céder aux chants des sirènes de l’informel.
Dans les secteurs organisés, on s'alarme de cete accentuation du basculement dans l'informel.
Le phénomène touche tous les secteurs d’activité, mais le textile demeure incontestablement le plus affecté. Les chiffres -non officiels- donnent le tournis. Dans le secteur du textile, 200.000 entreprises opèrent dans l’informel. Autant que dans le formel, affirme une source autorisée.
Le textile, premier secteur concerné par l’informel
«Aujourd’hui, toutes sortes d’informel existent, vu l’impunité qui règne», lance tout de go un grand textilien de la place. Il s’agit de l’informel de production, de matières premières et de distribution. L’informel de matières premières ou de contrebande demeure le plus visible, de l’avis de nombreux opérateurs.
Et d’ajouter que «les industriels n’ont plus aucun intérêt à travailler dans le formel et être continuellement dans les radars de la direction des impôts ou de la CNSS…».
Tout en gardant un pied dans le secteur structuré, certaines entreprises en mettent un autre dans l’informel, en acceptant des commandes de donneurs d’ordres opérant totalement dans le circuit parallèle, en déclarant partiellement leurs employés, en rognant sur les impôts…
Le passage vers l’informel se fait progressivement. C'est un migration, un glissement. Ce n'est pas une rupture brutale, toujours délicate, nous affirment des opérateurs interrogés par Médias 24.
«Il faudra oublier notre ancienne vision de l’informel. Ce dernier s’est perfectionné et s’est imposé. En matière de contrefaçon par exemple, il est capable de produire des pièces ressemblant à l’identique aux authentiques, à des prix nettement inférieurs. Il n’y a qu’à faire un tour dans les quartiers de Koréa ou de Bab Marrakech à Casablanca, pour s’en convaincre».
A l’intérieur même du textile, une branche en particulier est minée par l’informel. Il s’agit de la confection des pyjamas et des fameux «djellabas-manteaux». «Ces entreprises constituent une puissance économique et sociale incroyable. 50 millions de pièces sont produites dans leurs ateliers annuellement. Ils emploient des milliers de personnes», précise notre source. Et d’ajouter: «il est impossible à une entreprise structurée de les concurrencer. Elle n’a d’autre choix que de les rejoindre dans l’informel, si elle ne veut pas baisser le rideau. C’est la triste réalité».
Le transport réagit mal à la restructuration
Autre secteur cité en exemple, celui du transport. Le président de la Fédération sectorielle, Abdelilah Hifdi, le confirmera.
"Il ne suffit pas d'être enregistré dans le Registre du transport, tenu par le ministère de l'Equipement, pour intégrer le secteur structuré. Toutes les pratiques de fuite en avant relèvent de l'informel. Et je n’ai pas honte à dire qu’un pan entier de la filière a migré vers l’informel». Et de poursuivre: «à trop vouloir réorganiser le secteur, on a fini par pousser de nombreuses entreprises à basculer de l’autre côté».
Un avis partagé par Hakim El Marrakchi, président de la Commission de coordination des conseils d’affaires au sein de la CGEM. «Durant les 5 à 10 dernières années, il y a eu une augmentation des charges patronales et du coût du travail (+40% sur 10 ans). Pour sa part, le Dirham a été réévalué. Le pays a connu une forte désindustrialisation. La prolifération de l’informel en constitue l’un des symptômes», déclare-t-il.
Pour ce membre de la confédération patronale, «dans l’industrie, l’informel est la dernière soupape de sûreté avant la disparition. On ne peut pas être industriel, basculer dans l’informel et y vivre éternellement, car l’industriel est amené à renouveler son outil de production, recourir au crédit bancaire, chose que ne permet pas l’informel.»
Il ajoute: «La migration vers l’informel est un indicateur de non compétitivité et non de manque de moralité. Ce n’est pas une zone de confort, mais un terrain de précarité».
Une étude sur les effets de l’informel sur la compétitivité est en cours d’élaboration par la CGEM. Le cabinet Roland Berger a été mandaté pour la réaliser. Elle sera bouclée vers septembre 2016.
«Le phénomène mérite d’être analysé, afin d’en comprendre les mécanismes. Cela permettra de mettre en place une approche pertinente, structurée, inclusive et progressive, afin de proposer des mesures concrètes et réalisables, pour ne pas tomber dans les recettes générales», précise une source patronale.
Pour appuyer l’étude, la CGEM fera des benchmarks de pays ayant identifié des solutions pour contourner l’informel. En Chine par exemple, pour encourager les achats auprès d’entreprises structurées, les factures donnent droit à un numéro de loterie, comme encouragement. «Ce sont certes des petites initiatives, mais qui pourront donner des résultats plus importants que les sanctions», conclut notre source.
Le 06 Avril 2016
SOURCE WEB Par Médias 24
Les tags en relation
Les articles en relation
Nouvelle livraison d’armes US au Maroc dans le cadre du programme EDA
Les Forces armées royales ont reçu, la semaine dernière, une nouvelle livraison d’armements américains, notamment des canons M 5A 109 et 70 chars dernier ...
Le Maroc rétablit ses relations diplomatiques avec Cuba
Un Communiqué Conjoint a été signé, à cet effet, entre les Missions Permanentes des deux pays auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York, pr...
Le Maroc perd chaque année 174 millions de dollars à cause des risques climatiques (étude)
Le Maroc est classé 124e parmi les pays confrontés à des risques climatiques, selon l’ONG allemande Germanwatch. Ainsi, le pays perd annuellement 174 milli...
Maroc, Terre de Football : l’ONMT promeut la CAN 2025
À l’approche de la CAN 2025, que le Maroc s’apprête à accueillir, l’Office National Marocain du Tourisme (ONMT) lance une tournée promotionnelle en Eu...
Nouvelle Charte de l’Investissement pour les TPME au Maroc
Gouvernance, structure et mise en œuvre : ce qu’il faut savoir Le Maroc franchit une nouvelle étape dans le renforcement de son attractivité économique...
Nouveau Plan d’Action pour la conservation de la grande outarde au Maroc
Bien que la grande outarde (Otis tarda) soit une espèce protégée par la législation Marocaine, sa population a connu un important déclin (d'au moins 55...
Maroc-France-Afrique : une coopération trilatérale à bâtir
« Le Maroc est un arbre dont les racines plongent en Afrique et qui respire par ses feuilles en Europe ». Cette citation de feu Sa Majesté Hassan II n’a ja...
Schengen: L'Espagne prolonge la fermeture de ses frontières. Le Maroc concerné
Dans le cadre des accords Schengen, l'Espagne a décidé de prolonger la fermeture de ses frontières y compris pour le Maroc. Le Maroc ne figure pas dan...
5.000 milliardaires ont visité le Maroc en 2016
En Afrique, le Maroc est la deuxième destination de prédilection des gens les plus fortunés au monde, avec une préférence pour Casablanca et Marrakech. Les...
Maroc – France : Froid polaire
Les relations entre le Maroc et la France s’apparentent à celles d’un couple sur le point de divorcer : elles sont froides, distantes, tendues, voire même...
Maroc-Israël: coopération commerciale entre l´ONMT et
Le 26 juillet 2021 Source web Par : YouTube ...
Un fonds maroco-américain pour les zones industrielles durables au Maroc
Le Fonzid, visant à lever la contrainte d'accès au foncier industriel au Maroc, est le fruit d'un partenariat entre le gouvernement marocain et la Mil...


mercredi 6 avril 2016
0 
















Découvrir notre région