Sid Ahmed Ghozali Ensemble, le Maroc et l’Algérie peuvent devenir une start-up mondial
EXCLUSIF. De passage au Maroc, l’ancien premier ministre algérien du défunt président Mohamed Boudiaf nous a entretenus sur sa vision idéale des relations maroco-algériennes et maghrébines. Une approche prudente et politiquement correcte?
Sid Ahmed Ghozali a longtemps dirigé la major africaine Sonatrach, avant de devenir plusieurs fois ministre puis chef du gouvernement du président Mohamed Boudiaf, assassiné dans des conditions troubles.
L'homme au célèbre noeud papillon s'est aussi présenté deux fois sans succès à l'élection présidentielle contre Abdelaziz Bouteflika, actuel locataire du palais El Mouradia depuis 1999.
Cet ami du Maroc se livre à une analyse des blocages empêchant la construction maghrébine et le rapprochement algéro-marocain.
Médias 24: Certaines déclarations récentes en Algérie plaident pour une détente des relations maroco-algériennes et appellent à un redémarrage du processus maghrébin?
Sid Ahmed Ghozali: Vous me posez une question délicate sur laquelle je ferai l’impasse, car j’ai toujours évité de commenter les déclarations de la classe politique algérienne.
- Dans ce cas, quelle est votre analyse actuelle de la situation de blocage de l’UMA?
- Je ne doute pas de l’attachement de nos dirigeants, morts ou vivants, à la cause maghrébine, mais ils n’ont choisi ni la bonne voie, ni la bonne méthode.
A eux seuls, le Maroc et l’Algérie représentent 80% de la superficie, de la population et des finances du Maghreb. Ils ont donc une responsabilité énorme dans le retard de l’édification du grand Maghreb.
Pour y arriver, il faut instaurer un climat de confiance mutuelle, reposant sur des relations institutionnelles et pas simplement sur des hommes qui passent, car au final, seules les institutions perdurent.
- La réouverture des frontières entre les deux pays n’est-elle pas la première étape?
- Les Algériens et les Marocains sont un même peuple, séparé par des frontières politiques, mais pour être franc, je ne pense pas que le seul fait de les rouvrir règlera les problèmes.
Ces frontières ont déjà été ouvertes dans le passé, grâce à la signature d’un accord international qui a fini par être violé par les deux parties. Cela démontre que nous n’avons malheureusement pas encore la culture de la loi qui doit primer.
Rétablir les visas unilatéralement comme l’a fait le défunt ministre de l'Intérieur Driss Basri était une violation de cet accord et la tentative algérienne de se faire justice en fermant ses frontières en était une autre.
Pour que cela ne se reproduise pas, il faut s’organiser pour rendre impossible ce genre de scénario.
- N’est-ce pas au fond un problème d’inimitié entre hommes ou de rancunes tenaces?
- Le Maroc et l’Algérie sont liés par des milliers d’années d’histoire commune et contrairement à l’Allemagne et la France, ils n’ont jamais été des ennemis biologiques.
Quand je vois les échanges récurrents et réciproques d’insultes entre le Maroc et l’Algérie, il apparaît clairement que ce ne sont pas les peuples qui sont derrière, même si cela peut influer sur leurs sentiments.
Je me rappelle d’un dîner avec le président Mitterrand, qui me disait que le père de Roland Dumas avait été fusillé par les Allemands, ce qui n’avait pas empêché son fils, ministre des Affaires étrangères français, de travailler sans rancune pour l’amitié franco-allemande.
- Que préconisez-vous pour dépasser les "malentendus" entre l’Algérie et le Maroc?
- Sans vouloir faire de jeu de mots, je pense à une méthode royale, qui consiste à ce que chacun d'entre nous mette d’abord de l’ordre dans sa maison pour atteindre un SMIC institutionnel.
Essayons d’abord de devenir des Etats de droit, mettant la loi au-dessus de tout et de tous, après quoi nous serons capables d’aborder nos problèmes communs, car les relations internationales ne doivent pas se baser sur les sentiments.
- Vous voulez dire que le blocage algéro-marocain se base trop sur les sentiments?
- Malheureusement, les relations actuelles entre nos deux pays se suffisent des sentiments, ce qui n’est pas viable, car la raison en fait les frais.
Mathématiquement, nous ne pourrons pas servir l’intérêt de nos peuples si nous ne trouvons pas de terrain d’entente. Notre voix serait bien plus forte si nous nous unissions, car la mondialisation ne pardonne pas aux faibles et aux divisés.
Nous ne sommes rien tout seuls, alors que nous pourrions être une vraie puissance régionale à cinq.
- Le temps du leadership national à l'échelle maghrébine ou africaine est donc dépassé et il faut passer au leadership régional...
- Nous ne devons pas continuer à pratiquer la politique de l’autruche en restant chacun de notre côté. Nous serions coupables et comptables devant nos peuples.
Si chacun de nous commence par nettoyer ses écuries, nous aurons résolu 80% des problèmes et pourrons entrer de plain-pied dans l’Etat de droit et donc dans la modernité.
Les cinq pays maghrébins unis, c’est un coefficient multiplicateur décuplé alors qu’à l’heure actuelle, cette entité théorique ne représente que la somme de 5 forces nationales déclinantes.
- Pensez-vous que l’on finira par y arriver?
-Nous n’avons pas le choix, car quand les nouvelles générations, qui ont d’autres priorités que les anciennes, arriveront au pouvoir, elles agiront différemment de leurs aînés.
J’espère que cela arrivera rapidement et si ce n’est pas le cas, il faut faire en sorte de leur laisser au moins des fondations solides pour leur faciliter la tâche.
- Faut-il attendre les calendes grecques, alors que le blocage du Maghreb dure depuis des décennies?
- C’est la question que je ne cesse de me poser, aussi bien pour la construction du Maghreb que pour mon pays. Quand vous vous obstinez dans la mauvaise voie, cela peut même durer plusieurs siècles.
Au Maroc et en Algérie, nous parlons beaucoup de développement durable, mais le jour où nous passerons du discours à l’action concrète et concertée, ce développement deviendra une opportunité extraordinaire pour le Maghreb, car à eux seuls, nos deux pays constituent le plus grand gisement solaire au monde.
De plus, le pétrole algérien et les phosphates marocains peuvent faire de nous une start-up mondiale.
La construction d'une communauté politique maghrébine doit s'inspirer du processus d'union maritale. Tout comme les futurs mariés qui meublent leur chambre à coucher avant la nuit de noces, nos pays doivent établir des fondations solides pour l'avenir, mais encore faut-il que nos dirigeants soient à la hauteur!
Le 14 Décembre 2015
SOURCE WEB Par Médias 24
Tags : ancien premier ministre algérien du défunt président Mohamed Boudiaf– relations maroco algériennes et maghrébines– Sid Ahmed Ghozali– Abdelaziz Bouteflika, actuel locataire du palais El Mouradia– déclarations de la classe politique algérienne– finances du Maghreb– frontières politiques– histoire commune et contrairement à l’Allemagne et la France- ministre de l'Intérieur Driss Basri- les relations actuelles entre nos deux pays–5 forces nationales déclinantes- construction d'une communauté politique maghrébine–
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mardi 15 décembre 2015
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