Administration malaise dans l'administration
Cabinards, directeurs, responsables..., L'activité tourne au ralenti dans les ministères en attendant la formation du nouveau gouvernement. La décision du PJD de réduire le nombre de ministères entraînera la disparition de plusieurs postes de responsabilité. La victoire du Parti de la justice et du développement (PJD) aux élections législatives du 25 novembre 2011 est en passe d’installer une nouvelle donne dans l’Administration. Le choix de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) et du Rassemblement national des indépendants (RNI) de passer à l’opposition implique que les 11 départements dirigés par des membres de ces deux partis changeront de couleurs et de patrons. Idem pour le ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, ainsi que pour son secrétariat d’Etat. Et le doute plane sur les huit départements à la tête desquels sont installées des personnalités sans étiquette politique, dont ceux dits de souveraineté. En y ajoutant les deux postes occupés par des quadras du Parti du progrès et du socialisme (PPS), dont la participation au gouvernement n’est pas encore tranchée, et surtout la promesse du nouveau chef du gouvernement de réduire le nombre des ministères tout en donnant la priorité à «de nouveaux et jeunes visages», on est certain qu’il y aura un sacré remue-ménage dans l’Exécutif. Pour le moment, tout le monde attend la fin des tractations engagées par Abdelilah Benkirane pour former son gouvernement. Mais déjà, la présence des ministres à leurs bureaux, en particulier ceux qui sont sûrs de ne pas figurer sur la liste du prochain gouvernement et/ou qui ne siégeront pas au Parlement, se fait de plus en plus rare. Certains ont revu leur agenda et réduit considérablement leurs activités pour pouvoir se consacrer à leur avenir. «Qu’on le veuille ou non, on ne peut pas se concentrer sur nos missions tellement nos têtes sont ailleurs. Après tout, nous sommes des êtres humains et la question à laquelle on pense avant tout en ce moment est de savoir où va-t-on être demain», confie un ministre USFPéiste. Les contractuels des cabinets obligés d’aller chercher du travail ailleurs La nouvelle donne ne concerne pas seulement les ministres, mais aussi tous les membres de leurs cabinets. Elle semble plus préoccupante pour les contractuels qui sont obligés de libérer leurs postes. Quant aux membres qui sont des fonctionnaires, ils regagneront tout bonnement leur administration d’origine. Cependant, ils vont perdre les avantages liés à leur fonction de «cabinard» tels les primes, la voiture de service ainsi que le prestige et le pouvoir qui vont avec. Normal donc que cette ambiance de fin de cycle se répercute sur le fonctionnement des ministères. «L’activité tourne au ralenti car la plupart des fonctionnaires sont conscients que le bateau est en quelque sorte sans pilote», résume un cadre dans un ministère stratégique. «Personne n’ose prendre d’initiative de peur d’être sévèrement sanctionné par la nouvelle équipe, si elle n’est pas contente de l’intervention», commente un cadre supérieur d’un ministère voué à changer de patron. Bref, les équipes en place ne font que gérer les affaires courantes et les cadres partants préoccupés par les préparatifs qui précèdent tout départ. «On prépare les “valises»”, et on est mobilisé à faire les cartons et à réunir les documents», confie un chef de cabinet assuré du départ de son ministre. Pas seulement. «On procède surtout à une opération de nettoyage qui consiste à régulariser, par mesure de précaution, tous les dossiers, notamment les plus épineux, et à détruire les documents qui peuvent paraître compromettants et qui risquent d’être utilisés plus tard par la nouvelle équipe, surtout si celle-ci entretient des rapports tendus avec le ministre sortant ou avec son parti». Les broyeuses tournent donc à plein régime, comme c’est le cas d’ailleurs dans tous les pays du monde, en de pareils moments. Espérons que l’attente ne sera pas longue car plusieurs dossiers importants sont en stand-by, en particulier la Loi de finances. Les doublons seront traqués Au-delà des cabinets ministériels, de grands changements, pour ne pas dire bouleversements, sont attendus dans la haute administration et autres démembrements de l’Etat. La décision annoncée par le nouveau chef du gouvernement de réduire le nombre des ministères de 34 à 25 a suscité davantage d’inquiétudes, principalement dans les «petits» départements qui sont condamnés à être intégrés dans de grands ministères. La culture, le commerce extérieur, l’artisanat, l’eau, les MRE et la communication sont parmi les victimes potentielles. Et cette probabilité tracasse sérieusement leurs hauts cadres. «Où me retrouverai-je si notre ministère est intégré à un autre qui a déjà son inspecteur général ?», s’interroge non sans inquiétudes ce haut cadre nommé à cette fonction, il y a juste une année. Et ce n’est pas l’appel des dirigeants du PJD pour l’adoption de la rigueur dans l’économie et la gestion des dépenses publiques qui apporte une réponse rassurante à ce genre d’inquiétudes. Et pour cause, comme l’assure le parti islamiste, tous les doublons seront traqués. Le renforcement des prérogatives du chef du gouvernement dans le domaine de la nomination des hauts cadres de l’administration et des organismes publics accentue leurs craintes, notamment celles des hauts responsables qui doivent leur poste à leur proximité avec leur ministre de tutelle ou à leur appartenance aux partis alors au pouvoir. Certes, tout ne sera pas chamboulé du jour au lendemain et ceux qui ont fait montrent de compétence pourront sauver leur tête. Mais il est clair qu’à moyen terme, il y aura bien un jeu de chaises musicales à la tête de beaucoup d’organismes et sociétés publics. Focus : Environ 250 cabinards dans l'expectative Les cabinets ministériels comptent environ 250 personnes. A la Primature, qui en abrite le plus grand nombre, on estime le staff mis à la disposition du chef de gouvernement à plus de 25 membres entre conseillers et chargés d’études ou de mission. Abbas El Fassi avait hérité de près de la moitié de ce personnel des anciens premiers ministres, notamment de l’époque de Abderrahmane Youssoufi et Driss Jettou. En principe, le Premier ministre (le texte réglementant cette fonction date de 1975) a droit à un chef de cabinet et sept conseillers techniques. Le ministre a, lui, droit à un chef de cabinet et 5 conseillers en plus d’un chef du secrétariat particulier. Quant au secrétaire d’Etat, il dispose d’une équipe plus réduite, composée d’un chef de cabinet et de deux conseillers techniques. Mais tous les membres du gouvernement ont la possibilité de faire appel, sans limite, à des chargés de mission ou chargés d’études. SOURCE WEB Par Hakim Challot. La Vie éco