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DEBAT L’effet boomerang de l’exploitation du gaz de schiste algérien

DEBAT L’effet boomerang de l’exploitation du gaz de schiste algérien

L’Algérie a effectué avec succès son premier forage pilote de gaz de schiste dans le bassin d’Ahnet à In Salah (photo DR)

 

Le refus des autorités algériennes d’un débat préalable sur la question de l’exploitation du gaz de schiste a fini par placer cette dernière au centre de la vie politique du pays. A l’inquiétude sur d’éventuelles retombées négatives en matière de pollution et de santé publique et aux interrogations sur le degré réel de rentabilité d’une future production massive est venue s’ajouter l’indignation d’une population placée devant le fait accompli.

ALGÉRIE. La population du Tidikelt se mobilise, massivement et pacifiquement, depuis deux semaines pour s’opposer à l’exploitation du gaz de schiste dans le bassin d’Ahnet où a été creusé le premier forage pilote de gaz de schistes en Algérie. 

Hommes, femmes et enfants, jeunes et vieux, tous les habitants d’In Salah (1300 km au sud d’Alger) et d’autres localités de la région sont sortis dans la rue pour exprimer leur refus à la suite de l’annonce par le ministre de l’Énergie, Youcef Yousfi, le 27 décembre 2014, du  "succès de la première opération réelle de l’exploration de gaz de schiste dans le bassin d’Ahnet" . 

Ces marches s'accompagnent d’une grève des écoles, des commerces et de l’administration. Une revendication fédère toute la population de cette région riche mais déshéritée : la fin des forages de gaz de schiste  et le nettoyage du site. 

Des mouvements de solidarité relaient, dans tout le Sud algérien, cette mobilisation. De Tamanrasset à Ouargla, en passant par Adrar, Ghardaïa et Laghouat, des rassemblements de protestation et des conférences-débats sur le sujet s'organisent.

 

Le gouvernement n’entend pas reculer

Face à ce front du "Non au gaz de schiste" , le gouvernement semble déterminé à passer en force. D’importants renforts de police et de gendarmerie ont été envoyés dans la région alors que les forages se poursuivent. 

Les officiels se veulent rassurants, à l’instar de la ministre algérienne de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement, Dalila Boudjemaa, qui a déclaré le 11 janvier 2015 que l’exploitation du gaz de schiste "n’a pas d’impact négatif sur l’environnement." Intervenant le même jour sur les ondes de la radio algérienne, le PDG par intérim de Sonatrach, Saïd Sahnoune, admettait tout au plus n'avoir "pas suffisamment communiqué sur ce sujet." 
Le gouvernement considère que la population du Sud est mal ou insuffisamment informée. Refusant toujours l’organisation d’un débat préalable, il promet plusieurs milliers d’emplois dans les années à venir.

Le choix algérien du schiste

La fracturation hydraulique recèle des dangers selon certains experts (photo DR)

La fracturation hydraulique recèle des dangers selon certains experts (photo DR)

Il apparaît clairement que le gouvernement s'engage à fond dans l’exploitation du gaz de schiste. En septembre 2013 déjà, l’Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures (Alnaft) annonçait que l’Algérie devrait mobiliser 300 mrds$ sur cinquante ans pour produire 60 milliards de m3/an de gaz de schiste. 

Le scénario de l’Agence prévoit le forage de 12 000 puits sur cette période, soit 240 puits par an. Ce scénario reposait sur une estimation des réserves algériennes de gaz de schiste évaluées, au printemps 2013 par le département américain de l’Énergie, à 19 800 milliards de m3 soit quatre fois les réserves conventionnelles de l’Algérie. Ce même département classait l’Algérie au 3e rang mondial en termes de réserves de gaz non conventionnels, derrière la Chine et l’Argentine.

Les voix de la prudence

Des voix, opposées ou non, à l’exploitation du gaz de schistes suggèrent aux autorités de ne pas ignorer les inquiétudes de la population du Sud algérien. 

Pour l’économiste Abdelatif Rebah, interrogé par Econostrum.info,  "Il apparaît bien que cela soulève également un problème de démarche. L'implication des populations concernées doit être un élément-clé de celle-ci. Les populations adhèrent d'autant à un projet qu'elles peuvent en mesurer concrètement les retombées positives multiples sur leur présent et pour leur avenir en matière d'emplois, de formation de revenus, de développement local, d'une manière générale". 
Abdelatif Rebah estime que c'est la leçon à retenir de l’expérience d’In Salah, "Il est évident que nous souscrivons plus fortement aux règles d'un jeu quand nous participons à ce jeu et y trouvons profit."

Contacté par Econostrum.info, Chems Eddine Chitour, Professeur à l’École Polytechnique d’Alger, soutient que "la majorité des études montre que le gaz de schiste est une technique dangereuse avec les techniques actuelles", 

Il propose donc une démarche prudente fondée sur un modèle de croissance rompant avec le modèle de consommation actuel pour préparer une société post énergies fossiles. Il ne se prononce pas pour autant contre l’exploitation du gaz de schiste. Mais celui-ci aura toute sa place " le moment venu, quand la technologie sera moins brutale et ne nécessitera pas d’eau et surtout de produits chimiques.

Lire aussi : « Le Sahara n'est pas un désert, c'est un écosystème qu'il faut respecter »



15 Janvier 2015

SOURCE WEB Par Acia Kaci, à ALGER  ECONOSTRUM

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