Une région ne peut pas se construire uniquement sur des lois ou des finances, il lui faut aussi, pour réussir, un socle culturel et historique Mustapha Jmahri, initiateur des Cahiers d’El Jadida
Encouragé par Abdelkébir Khatibi et Guy Martinet, Mustapha Jmahri avait lancé en 1993 son projet éditorial « Les Cahiers d’El Jadida », série de publications dédiées à sa ville. Lauréat du 3ème cycle de l’Institut Supérieur de Journalisme à Rabat, il a d’abord exercé en tant que journaliste pendant une courte période à la RTM à la fin des années 1970 avant d’entamer une carrière d’attaché de presse, pendant une vingtaine d’années, au sein d’un établissement public à El Jadida. Aujourd’hui retraité, il poursuivit inlassablement son travail d’écriture autour de la ville d’El Jadida et sa région. Son autobiographie a été publiée en 2012 chez L’Harmattan.
Entretien : Mais la motivation essentielle m’est venue un jour quand je poursuivais mes études supérieures à Rabat dans les années quatre-vingt du siècle dernier. Dans cette capitale universitaire et culturelle par excellence, j’ai constaté alors et de visu que les centres d’intérêts des lecteurs n’étaient pas forcément littéraires ou artistiques. Pour de multiples raisons sociales, culturelles et politiques, d’autres tendances plus pragmatiques captaient l’intérêt telles l’histoire, la sociologie, le témoignage, les mémoires et l’étude monographique qui prit un certain intérêt. D’autres raisons renforceront ce constat quand, à la fin de mes études, je retournais vivre et travailler à El Jadida. Dans cette cité, à l’origine bourg agricole et port naturel, alliant ruralité et citadinité à la fois, la tradition de l’oralité primait très amplement sur l’écrit. La génération précédente qui a connu le Protectorat commençait à disparaitre et avec elle disparaissait un pan de notre histoire dont il fallait, au moins, sauver quelques bribes. Autre élément, après la création de la faculté des lettres d’El Jadida en 1984, les étudiants qui préparaient leur mémoire de licence, sur des aspects de l’histoire de la ville, rencontraient énormément de difficultés pour dénicher une source ou une référence disponible. Enfin, il y a lieu d’évoquer aussi un choix tout à fait personnel lié à mon attachement affectif à cette ville de mes ancêtres.
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Quelles sont les principales difficultés rencontrées dans vos travaux de
recherche?
Je
peux résumer ces difficultés en quatre ordres. D’abord au niveau
archivistique avec absence d’un fonds documentaire local exploitable. Et
malgré mes contacts avec certaines institutions locales, telle la Chambre de
Commerce et d’Industrie, il était quasiment impossible d’accéder aux archives
abandonnées dans les sous-sols fermés. Ce travail de localisation des
archives locales et régionales est encore inexistant. Ensuite au
niveau documentaire : Pour la documentation non disponible dans le
commerce, il fallait déployer un certain effort de recherche dans les différents
endroits où elle se trouve comme la Bibliothèque Nationale à Rabat,
l’Institut d’Etudes Arabes à Rabat, l’ex Centre documentaire La
Source et la bibliothèque de la Chambre de commerce
à Casablanca. En troisième lieu au matériel avec
l’absence d’aides publiques pour soutenir ce genre de publications et de
travaux, supposés d’intérêt général. En quatrième lieu au niveau
organisationnel : N’étant pas chercheur à plein temps, il fallait
concilier entre la mission quotidienne du fonctionnaire (jusqu’en fin 2012)
et celle dédiée à l’écriture. D’autant plus que faire connaitre l’histoire locale c’est pratiquement faire connaitre et enrichir l’Histoire du Maroc en général dans sa diversité et ses spécificités. Cette idée d’ailleurs n’est pas nouvelle, elle a été auparavant affirmée par des intellectuels de la trempe de Mokhtar Soussi, Germain Ayache et Paul Pascon.
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Quelles perspectives pour vos travaux et pour l’histoire locale en général?
Faut-il
rappeler, à titre d’exemple, que certaines de mes investigations m’ont permis
de mettre à jour la visite d’Antoine de Saint-Exupéry à caïd Tounsi dans la
kasbah de Boulaouane en 1927, la révélation de la liste des 80
consuls étrangers à El Jadida en traquant les archives, l’installation de
l’écrivaine suisse Grethe Auer à Mazagan en 1898, l’idée d’un musée d’El
Jadida qui remonte aux années quarante, etc..
À mon
avis, les travaux en histoire locale, sont à même d’éclairer les politiques
de développement locales et peuvent constituer des perspectives en matière de
tourisme culturel, d’échange et de partage d’expérience avec les peuples du
monde. 1/8/2014 |
SOURCE WEB Par S A L’OPINION
Tags : Encouragé par Abdelkébir Khatibi et Guy Martinet, Mustapha Jmahri avait lancé en 1993 son projet éditorial « Les Cahiers d’El Jadida »- les différents chercheurs marocains qui s’investissent dans l’effort de la recherche locale sont des bénévoles qui aiment leur pays et leur région- les différents chercheurs font ce travail par conviction sincère et par engagement et non pas pour la fortune ou pour l’obtention d’un grade-