LUFTHANSA ESTIME QU’IL DEVRA CONSOMMER LA MOITIÉ DE L’ÉLECTRICITÉ ALLEMANDE POUR VOLER VERT
Le mythe de l'avion vert est une nouvelle fois mis à mal. Le patron de la Lufthansa, le premier transporteur européen, reconnaît lui-même que la conversion de sa flotte aux carburants de synthèse va nécessiter l'équivalent de la moitié de l'électricité produite en Allemagne. De quoi mettre en avant les limites de la décarbonation du secteur.
La grande désillusion (ou pas). Lors d’une conférence nationale sur l’aviation à Hambourg, lundi 25 septembre, Carsten Spohr, le patron de Lufthansa, premier transporteur européen, a estimé que la compagnie "aurait besoin d'environ la moitié de l'électricité allemande pour convertir en carburant synthétique toute sa flotte actuelle". De quoi mettre à mal le mythe de l’avion vert, sur lequel se repose le secteur pour atteindre la neutralité carbone.
Les carburants de synthèse, également appelés e-fuels, combinent de l'hydrogène et du CO2 capté dans l'air ou dans les fumées industrielles. Pour être considéré comme verts, ils doivent être produits à partir de sources décarbonées comme les énergies renouvelables. Ces carburants de synthèse font partie de la famille des carburants aériens durables (ou "sustainable aviation fuels", SAF en anglais), aux côtés des biocarburants, les seuls utilisés aujourd’hui, et de l’hydrogène vert encore au stade de prototype.
"Acheter ce carburant à l'étranger"
Et cette quantité astronomique d’électrique, l'agence fédérale des réseaux et le ministre fédéral de Économie Robert Habeck (Verts) "ne me la donneront pas", reconnaît, lucide, Carsten Spohr, qui ne baisse pas pour autant les bras. Selon lui, la solution "réaliste" passe par l'achat de ce combustible synthétique "à l'étranger, là où l'énergie éolienne ou solaire est disponible en quantités pratiquement illimitées", a-t-il ajouté, sans citer de pays précis. Ce chemin sera "long, mais c'est le bon", s'est dit convaincu Carsten Spohr.
"Le constat qu'il dresse est correct, la conclusion qu'il en tire ne l'est pas", commente sur Linkedin l’ingénieur Maxence Cordiez. Selon ce spécialiste de l’énergie, "la priorité est de décarboner l'électricité pour ses usages actuels, avant de la convertir en carburants de synthèse". Il souligne également que la plupart des pays qui se positionnent sur la production d'hydrogène pour l'exportation sont "des pays dont le bouquet électrique a une intensité carbone très élevée et/ou où l'ensemble de la population n'a pas accès à l'électricité et/ou où il y a des contraintes d'accès à l'eau (nécessaire pour produire de l'hydrogène)".
Il semble de fait assez peu réaliste que ces pays parviennent à répondre à cette triple exigence : décarboner leur électricité, offrir l'accès à l'électricité pour tous, et produire assez d'électricité pour produire des carburants de synthèse destinés à l'exportation, dans un délai relativement court. "Finalement, la conclusion - difficilement acceptable - que le PDG de la Lufthansa aurait dû tirer est que la décarbonation du trafic aérien passera aussi et surtout par une forte réduction d'usage", conclut Maxence Cordiez.
Une obligation de SAF dans l'UE
Mais cette question de la réduction du trafic reste taboue. Pour arriver à zéro émission nette d’ici 2050, le principal levier envisagé est la compensation, au travers du mécanisme Corsia. Ce système, adopté en 2016, doit permettre au secteur de compenser la hausse de ses émissions afin de les maintenir à leur niveau moyen de 2019-2020, sur une base volontaire à partir de 2024 puis obligatoire à partir de 2027. Seulement, le système a une nouvelle fois été revu à la baisse lors de la réunion de l’Oaci. Si bien que selon les calculs de Transport & Environment (T&E), seulement 22% des émissions internationales totales seraient compensées d'ici 2030.
L’autre levier repose sur les carburants aériens durables, dont on voit les limites (auxquelles il faut ajouter une envolée des coûts). L’Union européenne va ainsi imposer à partir de 2025 d'incorporer en moyenne 2% de SAF dans le kérosène des vols en Europe et au départ de l'Europe. En 2030, ce pourcentage passera à 6 %, puis progressivement à 20 % en 2035, 34 % en 2040, 42 % en 2045, pour monter à 70 % d'ici à 2050, date à laquelle le transport aérien s'est engagé à attendre la neutralité carbone.
Ce volume de SAF sera essentiellement composé de biocarburants. Mais à partir de 2030, il devra aussi comprendre une partie de carburants synthétiques. Elle sera de 1,2% en 2030, puis 5% en 2035, et 35% en 2050. Si cette trajectoire est respectée, ces carburants synthétiques représenteront alors la moitié des carburants durables en Europe. Reste à produire assez d’électricité décarbonée pour que nos avions volent vraiment vert…
Le 28/09/2023
Source web par : novethic
www.darinfiane.com www.cans-akkanaitsidi.net www.chez-lahcen-maroc.com
Les tags en relation
Les articles en relation
Développement humain Le Maroc salue l’appui technique et financier de l’Union européenne à l�
Le soutien de l’UE a porté sur 60 millions d'euros au titre de la phase I et 25 millions d'euros au titre de la phase II. Fin du programme d’app...
Une directive européenne menace la présence des banques marocaines sur le sol de l’UE
Les banques marocaines seront-elles chassées du sol de l’Union européenne? Un projet de directive, actuellement en discussion au parlement européen, menace...
Tunnel Maroc-Espagne : une étude relance le mégaprojet
Le projet de tunnel sous-marin reliant le Maroc à l’Espagne franchit une nouvelle étape avec le choix de l’entreprise allemande Herrenknecht pour mener un...
Le contraste de la faconde anti-marocaine en France
Saisissant est le contraste entre les déclarations mielleuses au parfum boisé de certains officiels français et la faconde anti-marocaine menée -dans une th...
Election de Trump : L’UE déterminée à ‘’consolider les ponts’’ entre Bruxelles et Washi
L’Union européenne a souligné, mercredi, la nécessité de ‘’consolider les ponts’’ entre Bruxelles et Washington, invitant Donald Trump, élu prés...
World Power-to-X Summit : hydrogène vert, un positionnement d’avenir pour le Maroc
L’hydrogène vert a été au cœur des débats lors de la deuxième édition du « World Power-to-X Summit ». L’événement, qui a démarré mercredi 22 ju...
Pétrole: bientôt une contre-Opep, rassemblant les pays importateurs en Europe et aux Etats-Unis?
Et si les Occidentaux instituaient, en quelque sorte, leur propre organisation des pays importateurs de pétrole? Des discussions préliminaires entre les Etats...
Jénine : tirs israéliens visent des diplomates étrangers
L'armée israélienne a ouvert le feu en direction d'une délégation de diplomates étrangers en visite au camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordani...
Le Maroc prend part au Forum mondial «City Week 2016»
Le Forum mondial des services financiers «City Week 2016» s’est ouvert lundi dans la capitale britannique avec la participation de plusieurs représentants ...
Une eurodéputée appelle la Commission européenne à garantir la sécurité juridique des accords
L'eurodéputée française, Rachida Dati a appelé, jeudi, la Commission européenne à garantir la sécurité juridique de ses accords avec le Maroc. ...
Financement de la Cop22. Mezouar sollicite le monde des affaires
Le budget de la Cop22 est estimé à quelque 800-850 millions de DH, dont 300 MDH proviennent du budget de l’Etat. Le tissu économique est sollicité pour y ...
COP28 : Soutien aux énergies propres et à la décarbonation accordé au Maroc
Un financement de l’Union européenne d’environ 50 millions de dollars a été accordé au Royaume. Etalé sur 5 ans, il comprend un montant de 43,6 milli...


lundi 2 octobre 2023
0 
















Découvrir notre région