Le détournement du trafic téléphonique international crève le plafond !
Le manque à gagner est estimé à 400 MDH pour les opérateurs nationaux en 2013. L'ANRT a mené 12 enquêtes suite à des plaintes des opérateurs. L'évolution du secteur des télécoms au Maroc et le contexte économique difficile à l'étranger expliquent l'augmentation de la fraude.
Le détournement du trafic téléphonique international (DTI) atteint des proportions inquiétantes. Pour preuve, les pertes accusées par les trois opérateurs à fin 2013 sont estimées à plus de 400 MDH. Soit trois fois plus que les dommages enregistrés en 2011 (150 millions de DH). En clair, «cette activité frauduleuse a connu une nette augmentation durant ces deux dernières années», explique-t-on chez Méditel., L’évolution du secteur des télécommunications au Maroc et le contexte économique difficile à l’étranger sont des facteurs qui favorisent la multiplication des fraudes qui se font selon des méthodes de plus en plus sophistiquées car ces pratiques sont, dans la plupart des cas, menées par des experts en télécoms. Bénéficiant d’une assise financière solide, ces fraudeurs (des nationaux et des ressortissants étrangers) ouvrent des entreprises dans le pourtour de la Méditerranée, notamment en Espagne, et recrutent des agents au Maroc. Equipés de matériels de haute technologie, ils reçoivent les appels transmis de l’international puis les acheminent via internet à leurs partenaires locaux. Ces derniers reprennent les appels et les transfèrent grâce à un accès internet vers le réseau mobile marocain. Toutefois, ils «peuvent utiliser des accès internet (WIFI sans code) appartenant aux voisins, impliquant ainsi des citoyens innocents», déplore un professionnel.
Comme leurs entreprises sont déclarées, ces fraudeurs recouvrent facilement leur dû auprès des opérateurs étrangers, vu que ce sont eux qui ont reçu et transféré l’appel. D’où un manque à gagner pour les opérateurs nationaux. Il est important de préciser que les dommages causés par le DTI ne se limitent pas au chiffre d’affaires. «Il entache l’image de marque des opérateurs nationaux», commentent les équipes de Inwi. Et pour cause, les communications détournées sont toujours de mauvaise qualité.
Le parquet et la Police judiciaire sont mis à contribution
En 2012, l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) a procédé uniquement à 11 enquêtes pour détournement de trafic téléphonique international (DTTI) suite à des plaintes déposées par les opérateurs. Douze plaintes ont été instruites en 2013 et ont donné lieu à des enquêtes et contrôles. «L’ANRT n’a pas les moyens humains pour détecter ces fraudes», fait savoir un professionnel. Contactées à ce sujet, les équipes du régulateur expliquent que «l’agence agit sur la base de plaintes qui lui sont adressées par les opérateurs qui soupçonnent ces pratiques illicites grâce aux dispositifs et techniques de détection qu’ils ont mis en place».
Ainsi, sur la base des éléments d’information et de justification qui lui sont présentés, l’agence procède à une mission de contrôle et d’enquête en étroite collaboration avec le parquet et la Police judiciaire. «Nous accordons une grande importance au traitement et au suivi des dossiers DTI. Nous procédons aux enquêtes requises dans le respect de la procédure légale prévue en la matière», assure-t-on à l’ANRT.
Les opérateurs mutualisent leurs efforts
Pour limiter la casse, les opérateurs ont décidé de mutualiser leurs efforts. En effet, ils identifient ce traffic moyennant différents dispositifs. Sur le territoire marocain, ils utilisent la technique du profiling. Au vu d’un certain nombre de «comportements», une carte SIM peut être identifiée dans le réseau comme pouvant être utilisée dans le cadre d’une fraude DTI. Il s’agit d’une carte SIM qui ne reçoit pas des SMS et des appels, et qui émet des communications à des heures tardives.
La deuxième méthode est appelée le tracking. «A travers des partenaires basés à l’étranger et moyennant leurs sondes installées sur certaines routes internationales, des appels test (importants en volume) sont réalisés vers des numéros des opérateurs marocains, permettant de ‘‘tracer’’ les routes empruntées par l’appel et donc d’identifier les cartes utilisées pour le DTI», confie un professionnel.
Sur la base des lignes identifiées et d’autres informations, les opérateurs constituent un dossier pour l’ANRT qui examine les éléments de preuve. Si les preuves sont jugées suffisantes, l’agence sollicite un mandat auprès du procureur pour rendre «visite» à la société visée en compagnie des éléments de la Police judiciaire. Suite à cette visite, l’ANRT informe les opérateurs des résultats de la visite et de l’existence ou non d’équipements ayant pu servir pour le DTI. Ceux-ci engagent ou non une action en justice sur la base des résultats de l’enquête.
La procédure suivie par le régulateur
Dès la réception de la plainte par l’ANRT, une commission composée d’agents assermentés de l’ANRT est désignée pour procéder à l’examen et à l’instruction de ladite plainte. La première étape consiste à prendre attache avec le ministère public compétent en vue de solliciter l’autorisation de saisie éventuelle des équipements qui pourraient être utilisés dans les infractions ainsi que l’assistance des agents de la Police judiciaire. Une fois les démarches administratives accomplies, le processus du contrôle est entamé par la visite des lieux soupçonnés d’abriter une activité de DTI. Sur les lieux, les agents de l’ANRT, avec le concours des agents de la Police judiciaire, procèdent à la recherche de tous les indices qui aident à confirmer ou à infirmer les éléments d’informations contenus dans la plainte déposée auprès de l’ANRT. Quel que soit le résultat des enquêtes effectuées, des PV sont établis par les agents de l’ANRT, séance tenante, et sont remis au procureur du Roi compétent en la matière.
SOURCE WEB Par Imane Trari. La Vie éco_2014-02-03
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