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Sit-in des voyagistes à Rabat : une montée au créneau à l'insu de la Fédération

Sit-in des voyagistes à Rabat : une montée au créneau à l'insu de la Fédération

Sur 1.234 agences, 10 à 15% ont déjà mis la clé sous le paillasson. Ph. Aicpress

Il parait qu’un vent de dissension a soufflé au sein de la communauté des voyagistes. Le sit-in, qui a rassemblé en début de semaine à Rabat près de 180 agences de voyages, s’est tenu sans l’aval de la Fédération nationale de la profession, la FNAVM. L’action de protestation a, en effet, été portée par l’Association nationale des agences de voyages du Maroc qui a décidé de prendre les choses en main, pointant du doigt l’inertie de la Fédération, allant même jusqu’à créer son propre syndicat.

Près de 400 personnes ont répondu présent à l’appel au sit-in lancé par l’Association nationale des agences de voyages du Maroc. Les professionnels qui ont afflué, mardi dernier, aux abords du siège du ministère du Tourisme à Rabat ont souhaité ainsi attirer l’attention de la tutelle sur la situation désastreuse que vit la profession. Sauf que cette montée au créneau a été menée à l’insu de la Fédération nationale des agences de voyage du Maroc (FNAVM) qui, d’après les informations recueillies par «Le Matin» auprès des protestataires, ne se démène pas assez à leur goût.

«Depuis deux ans, hormis le contrat-programme 2020-2022 signé avec l’État pour la relance du secteur touristique, rien ne s’est fait. Nous avons un président par intérim et 3 ou 4 membres au bureau de la Fédération. C’est tout !», signale Omar Belhachmi, dirigeant de l’agence Voyages Paradis basée à Casablanca.

Pour les voyagistes, le bilan est lourd avec un chiffre d’affaires en baisse de 90% par rapport à 2019, ceci quand il n’est pas quasiment nul. «La meilleure agence est à 20% du chiffres d’affaires de 2019 !», se lamente le professionnel qui faisait partie des 400 personnes ayant pris part au sit-in, faisant savoir que sur 1.234 agences, 10 à 15% ont déjà mis la clé sous le paillasson.

Un chiffre qui sera amené à augmenter dans les mois à venir, précise-t-il. Les professionnels sont par ailleurs convaincus que tant que les frontières resteront fermées, aucun espoir n’est possible. C’est d’ailleurs l’une des principales revendications qu’ils ont exprimées mardi, rappelant à ce titre que les transactions internationales constituent la majorité de l'activité des agences de voyages. Les tours opérateurs veulent aussi des mesures de soutien plus généreuses pour les entreprises touchées.

«Je demande à l'État de faire un effort. Il a déjà fait un effort dans le passé en effaçant les dettes des jeunes promoteurs. Pour sauvegarder le tissu économique des agences de voyage, il doit faire la même chose, ou du moins effacer 50% de l’ardoise», déclare-t-il. «Autrement, nous serons contraints de fermer et de mettre pas moins de 10.000 collaborateurs au chômage», alerte-t-il.

«Il faudra que mon chiffre d’affaires triple en 2023 pour que je puisse honorer mes dettes envers la banque, sachant qu’il sera en baisse de 40 à 60% cette même année !», explique-t-il. «À partir du mois de septembre, je dois débourser 270.000 DH de traites trimestrielles. Je dois aussi payer une charge salariale d’à peu près 90.000 DH, les impôts, le loyer et les charges diverses.

Si on fait le compte, je dois gagner autour de 5 millions de dirhams par an. Or, même en 2018 et 2019, je ne réalisais que 3 millions de DH de gains !», détaille-t-il. Il fait remarquer que la fermeture des frontières a entamé la confiance des partenaires internationaux et les compagnies aériennes. «Comment peut-on alors espérer retrouver nos chiffres d’avant-Covid ? Au meilleurs des cas, on pourra peut-être en récupérer 80% en 20225 ou 2026», lance-t-il.

Les professionnels de voyages ne comptent pas s’arrêter là, ils se préparent à créer leur propre syndicat pour porter leur voix et défendre leur cause. La nouvelle organisation qui portera le nom de l’«Union nationale des agents de voyages» sera créée, demain jeudi, sous la bannière de l’UGEP (Union générale des entreprises et des professions).

Ce que répond la FNAVM

«La FNAVM n’a pas été saisie pour l’organisation de ce sit-in. Personne ne nous en a parlé», déclare d’emblée Mohamed Semlali, président de la FNAVM. «Et puis un sit-in pour quelle raison exactement ?», s’interroge-t-il. «Nous avons eu vent d’un communiqué publié par une association qui prétend être nationale et qui parle au nom de toutes les agences de voyages au Maroc, alors que la seule institution représentative de la profession habilitée à parler en leur nom, selon la loi, est la Fédération nationale des agences de voyage du Maroc, martèle-t-il.»

«Si ce sit-in a été organisé pour présenter ces doléances, eh bien je vous dis que la FNAVM a déjà fait le travail et nous sommes satisfaits du retour de la ministre de tutelle et de ses engagement envers le secteur en général et les voyagistes en particulier», note le responsable. «Mais si ce sit-in a été tenu juste pour tenir un sit-in, il y a de quoi se poser des questions !», ajoute-t-il, balayant d’un revers de main les accusations d’inertie. «Ces agences n’ont rien à reprocher à la Fédération de la profession», assure-t-il.

Ceux qui disent que la FNAVM ne porte pas la voix des professionnels, ils le font soit de mauvaise foi, soit ils ne sont pas au courant de ce que fait la Fédération», se défend-t-il.

«D’ailleurs, quand on passe ne revue les participants à ce sit-in, nous remarquons que 70% d’entre eux sont des agences de la région Rabat-Salé-Kénitra. Ce qui m’amène à me poser la question suivante : est-ce que l’Association régionale des agences de voyages de Rabat-Salé-Kénitra ne fait pas son travail d’encadrement et de communication auprès de ses membres ?», s’interroge-t-il, expliquant que la FNAVM communique sur ses actions à travers des synthèses et des rapports qu’elle remet à toutes les associations régionales qui sont sensé les partager à leur tour avec leurs membres.

«Ceci dit, nous reconnaissons, comme tous les confrères, que nous sommes dans une situation alarmante et nous avons besoin d’un accompagnement du gouvernement pour éviter les conséquences désastreuses de la pandémie sur la profession, le secteur et le tissu économique en général», admet le président de la FNAVM.

Interpellé au sujet de l’ouverture des frontières, le responsable a répondu : «Vous savez, on aimerait tous que les frontières soient ouvertes, nous le souhaitons de tout cœur ! Mais soyons objectifs : est-ce que cette décision dépend du ministère du Tourisme ? C’est une décision souveraine, une décision à haut niveau qui a été prise pour une raison précise. Nous ne sommes pas en mesure d’imposer quelque chose qui dépend de la politique d’un Etat souverain», affirme-t-il.

«Ce que nous reprochons peut-être à ce gouvernement, où au Comité scientifique, c’est d’avoir décidé, du jour au lendemain, de fermer les frontières sans préavis», poursuit-il.

Le président de la FNAVM a tenu à souligner que l’instance s’active vivement depuis le début de la crise, rappelant pour ceux qui l’aurait oublié que la Fédération a été de toutes les réunions du Comité de veille économique (CVE). Il rappelle également que l'instance avait pris part à la première rencontre ayant réuni la ministre du Tourisme avec les professionnels, et au cours de laquelle ont été exposées toutes les difficultés que vit le secteur, dont celles des voyagistes. La Fédération a également été présente à la réunion de travail tenue par les mêmes parties le 22 décembre dernier et qui a abouti à un engagement de la part de la ministre de tutelle pour la concrétisation d’une série de mesures de soutien en faveur du secteur.

«Le communiqué publié par le ministère à l’issue de cette réunion de travail traduit l’engagement du gouvernement, à travers son ministère, pour venir en aide au professionnels et réaliser les 10 doléances formulées par la Confédération nationale du tourisme (CNT) et les différentes fédérations métiers», relève-t-il.

De plus, poursuit-il, des comités techniques ont été mis en place au lendemain de cette rencontre et ont déjà commencé à travailler sur les 10 propositions de la CNT, dont la prorogation de l’indemnité forfaitaire jusqu’au mois de juin 2022, un moratoire fiscal, la révisions des majorations et des intérêts des crédits bancaires, la création d’un fond spécial pour le tourisme…

Le 05/01/2022

SOURCE WEB PAR Le Matin

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