Climat : un courant océanique majeur de l'Atlantique menace de se détraquer, et c'est inquiétant

Souvent confondue avec le Gulf Stream, la circulation méridienne de retournement atlantique joue le rôle de thermostat mondial. Et, selon une nouvelle étude, ce dernier est sur le point de disjoncter.
On l'appelle "circulation méridienne de retournement atlantique" (Amoc). Ce courant marin, qui joue un rôle de thermostat au niveau du climat mondial, est en train de se détraquer, s'alarme une nouvelle étude parue jeudi 5 août dans la revue Nature Climate Change*. Un chercheur du Potsdam Institute for Climate Impact Research, en Allemagne, rapporte avoir observé les premiers signes d'une déstabilisation de ce système qui fait la pluie et le beau temps sur la planète.
"Je ne m'attendais pas à ce que des signes de déstabilisation soient déjà visibles, et je trouve cela effrayant", a réagi Niklas Boers, auteur de l'étude, cité par The Guardian*, pour qui cela pourrait présager d'un effondrement de l'Amoc. "Nous ne pouvons pas laisser cela arriver", prévient-il. Car si les scientifiques attribuent ces dérèglements au réchauffement climatique causé par l'activité humaine, l'écroulement de ce système viendrait encore accélérer la hausse des températures, plongeant notre planète dans un terrible et imprévisible cercle vicieux.
Qu'est-ce que l'Amoc et à quoi sert-elle ?
La circulation méridienne de retournement atlantique décrit le fonctionnement complexe de la circulation de l'eau dans l'océan Atlantique. En fonction de sa salinité, de sa masse, de sa densité ou encore de sa température, l'eau se déplace en effet différemment dans ce vaste système, générant un flux jusqu'alors stable et constant. En transportant d'énormes quantités d'eau de la surface aux profondeurs – et inversement –, l'Amoc contribue à réguler le climat tel que nous le connaissons.
Mais depuis les années 1960, ce flux s'est considérablement affaibli, atteignant son niveau le plus faible depuis un millénaire, selon une étude scientifique parue dans la revue Nature Geoscience* (PDF) en mars dernier.
En étudiant le comportement de l'Amoc au cours des 100 000 dernières années, les scientifiques ont constaté que cette dernière avait deux modes de fonctionnement, résume The Guardian : l'un, rapide et puissant, tel qu'observé au cours des récents millénaires, et un autre, lent et faible. Or, une dernière étude assure que la hausse des températures pourrait précipiter une bascule rapide d'un état à l'autre. "La perte de stabilité dynamique impliquerait que l'Amoc a atteint un seul critique, au-delà duquel une transition possiblement irréversible vers son mode de fonctionnement faible pourrait avoir lieu", a détaillé Niklas Boers à l'agence Reuters*. A ce stade, l'état des connaissances ne permet toutefois pas de savoir si ce basculement est imminent, ou s'il surviendrait dans plusieurs siècles.
Quelles seraient les conséquences de son effondrement ?
L'effondrement de l'Amoc constitue ce que les experts du climat appellent un "seuil de rupture" ("tipping point" en anglais), à savoir un moment où le climat basculerait soudainement et de manière irréversible dans un état complètement différent de celui que nous connaissons.
Les conséquences de cette bascule seraient en effet immenses sur le climat. Les températures deviendraient beaucoup plus fraîches dans l'hémisphère nord, avec une augmentation du nombre de tempêtes, tandis que le niveau de l'océan Atlantique connaîtrait une forte hausse. Les moussons en Afrique et en Amérique du Sud se déplaceraient, exposant encore davantage de populations à d'importantes sécheresses. Interrogé en mars par franceinfo sur le ralentissement de l'Amoc, Didier Swingedouw, chercheur au CNRS et spécialiste de la variabilité du climat, évoquait également "une perturbation des écosystèmes marins et une baisse de production de tous les produits de la mer".
Il pointait enfin "une baisse de l'absorption du CO2, et donc une hausse de la concentration de ce gaz dans l'atmosphère, puis une accélération de la montée de la température sur Terre et une hausse de la température des océans". Soit une accélération du changement climatique.
Quelle est l'origine de cette déstabilisation ?
Parce qu'il absorbe et stocke la chaleur beaucoup plus efficacement que les terres et l'atmosphère, l'océan s'est considérablement réchauffé au cours des 50 dernières années en raison des émissions de gaz à effet de serre d'origine anthropique, relève Météo France. Or, cela a "des conséquences sur les propriétés et la dynamique de l'océan, sur ses échanges avec l'atmosphère et sur les habitats des écosystèmes marins", note l'institut.
Outre cette hausse de la température des océans, l'arrivée massive d'eau douce – plus légère que l'eau salée – issue de la fonte des glaces, là aussi causée par le changement climatique, perturbe la circulation des flux marins. "Je ne m'attendais pas à ce que l'excès d'eau douce ajouté au cours du dernier siècle cause déjà un tel retournement de la circulation, a réagi Niklas Boers dans The Guardian. Il est urgent que nous revoyions nos modèles à la lumière de ces observations afin d'estimer dans quelle mesure l'Amoc est sur le point de franchir ce seuil."
En attendant, les scientifiques préconisent de lutter contre le phénomène à la source, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Et ce, de manière drastique.
Le 06 Août 2021
Source web Par : France tv info
Les tags en relation
Les articles en relation

Le FMI table sur une croissance de l’économie nationale de 3% en 2023
La poursuite de politiques macroéconomiques prudentes restera essentielle pour la résilience de l’économie marocaine, selon l’organisation internationale...

À Abidjan, le Roi Mohammed VI réitère l’engagement du Royaume dans la lutte contre la sécheres
Le Roi Mohammed VI a adressé, ce lundi 9 mai, un discours lors du sommet des chefs d’État et de gouvernement consacré à la sécheresse et à la gestion du...

La baisse de la fécondité mondiale : une étude alarmante et ses implications
Une étude publiée aujourd'hui confirme la tendance à la baisse du taux de natalité dans le monde entier, signalant un phénomène presque mondial. Seuls...

Il y a seulement 5% de chances de limiter le réchauffement climatique à 2°C
Seulement 5. Il y a 5% de chances de limiter le réchauffement climatique à 2°C, soit l'objectif fixé par l'accord de Paris scellé par la communaut�...

GIEC, UN MODÈLE À BOUT DE SOUFFLE ?
Le sixième rapport d’évaluation du Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, vient d’être publié. Un évènement pha...

Nouvelles technologies : les agriculteurs marocains sont à la traîne
Les agriculteurs marocains sont à la traîne sur les nouvelles technologies, qui sont pourtant essentielles pour l’amélioration de la productivité. L‘...

GUIDE METHODOLOGIQUE POUR L’ELABORATION D’UN PLAN TERRITORIAL DE LUTTE CONTRE LE RECHAUFFEMENT C
GUIDE METHODOLOGIQUE POUR L’ELABORATION D’UN PLAN TERRITORIAL DE LUTTE CONTRE LE RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE Vous pouvez cliquer sur l’image pour voir...

Gestion de l’eau au Maroc : Entre évaporation massive et surexploitation, 22 milliards de mètres
Le Maroc, avec une pluviométrie annuelle estimée à 140 milliards de mètres cubes, fait face à des défis majeurs dans la gestion de ses ressources en eau. ...

Réchauffement climatique : changement de paradigme en Nouvelle-Zélande ?
Après le vote historique instaurant l'objectif "zéro carbone" dans la loi, le ministre du changement climatique a annoncé cette semaine la création d...

Le coût des catastrophes naturelles atteint des sommets... et inquiète les assureurs
Les événements climatiques du premier semestre 2021 auront causé près de 40 milliards de dollars de dommages assurés, selon une étude de Swiss Re. L’enc...

COP16 Biodiversité : Écosystèmes en Déclin, Urgence d’Agir
La dégradation des terres, la destruction des habitats naturels et la disparition accélérée des espèces menacent l’équilibre écologique mondial. À l�...

Une délégation européenne visite Tanger Med et l’usine Renault
Une délégation européenne a effectué ce vendredi une visite au complexe portuaire Tanger Med et à l’usine Renault de Tanger, dans l’objectif de valoris...