Dépistage en entreprises : les assureurs refusent de rembourser les frais
Sollicités par la CGEM pour couvrir une partie des frais liés à la campagne de dépistage de Covid lancée dans le secteur privé, les assureurs ont opposé un niet catégorique. Ils considèrent que cette démarche de dépistage massif est préventive et ne relève donc pas du domaine de l’assurance.
Lancée le 3 juin sur instructions royales, la campagne de dépistage massif de Covid dans le secteur privé continue de susciter des interrogations, notamment sur son coût et sur la partie qui doit en supporter les frais.
Si certaines entreprises et grands groupes ont annoncé qu’ils prendront en charge les tests effectués à leurs collaborateurs, la majorité des entreprises n’est pas en mesure de supporter les frais d’une telle opération.
Une entreprise de BTP par exemple, qui emploie 1.000 personnes devra théoriquement payer 500.000 DH pour tester ses effectifs (sauf échantillonnage et/ou pooling des prélèvements), à raison d’un prix par test de 500 DH. Et ce n’est que la première partie de la campagne, car ces tests devront être effectués de manière régulière tant que le virus n’a pas totalement disparu. La facture totale peut être donc salée, surtout pour des entreprises fragilisées par la crise, et souffrant de grands creux de trésorerie.
A cette question du financement de la campagne de dépistage, la CGEM, coordinateur de cette opération, n’a pas encore trouvé une solution finale. On parle de plusieurs montages, scénarios, création de fonds public-privé, mais aucun plan n’a été acté pour l’instant.
Une des solutions qui étaient mises sur la table : faire porter une partie des frais de dépistages aux compagnies d’assurances. Piste qui a été proposée par la CGEM aux assureurs et qui a rencontré un niet catégorique de leur part, selon une source de haut niveau dans le secteur de l’assurance, consultée par Médias24.
« Le préventif ne relève pas du domaine de l’assurance »
La solution proposée par la CGEM paraît de prime abord logique, légitime. Le métier d’un assureur étant, en partie, de couvrir les risques sanitaires et les frais liées aux charges médicales et hospitalières des assurés.
« C’est vrai », confirme notre source. « Notre métier est d’assurer nos clients en cas de survenance du risque. Si une personne souffre de symptômes du Covid, et qu’elle est dépistée sur prescription médicale, on la rembourse. Mais pour cette campagne de dépistage, on ne parle pas de couverture d’un risque de santé, mais de paiement de frais d’opérations préventives. On n’est plus dans le domaine de l’assurance pour le coup », tient-elle à nuancer.
La proposition de la CGEM ne cadre pas non plus, ajoute notre source, avec un des principes de base du métier de l’assurance : la mutualisation des risques.
« Le principe de l’assurance est simple. Vous collectez les cotisations d’une population d’assurés pour couvrir les risques que subira une partie de cette population. C’est le principe de la mutualisation des risques, qui permet à la fois à la compagnie de tenir ses engagements vis-à-vis de ses assurés et d’assurer ses équilibres financiers. Avec la campagne de dépistage, il s’agira pour nous de couvrir toute la population du secteur privé. Ce qui est juste impossible », précise-t-elle.
Les assureurs, non solidaires ?
Pour notre source, il ne s’agit pas donc d’un refus de participer à l’effort de solidarité, mais juste d’une question de logique et de principes du métier.
« Le secteur s’est montré très solidaire avec ses clients et la société depuis la déclaration de la pandémie par ses contributions au Fonds anti-Covid, mais aussi par l’accompagnement de ses clients, la renégociation des contrats, des remises sur les primes d’assurances, ainsi que le remboursement des frais liés au Covid même si les pandémies ne sont pas en principe couvertes par les contrats d’assurance », signale à titre d’exemple notre source pour illustrer l’effort de solidarité fourni jusque-là par le secteur.
Les assurances ont été, il faut le dire, au centre des critiques depuis le début de la pandémie, car considérées par une large frange de l’opinion publique comme un des grands gagnants de la crise du fait notamment de la baisse de la sinistralité automobile.
Une idée qu’avait largement réfutée, dans une interview accordée à Médias24/Le Boursier, le directeur général de la Fédération des assureurs, Bachir Baddou, en expliquant que les assurances ont été touchés doublement : la baisse des encaissements et des nouveaux business, et le krach boursier qui impacte directement la valeur et le rendement de leur gros portefeuilles actions.
Le 10/06/2020
Source Web Par Médias 24
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