Développement de la TPE : les secrets de la recette turque
Elles représentent 93% du total des entreprises dans le pays, assurent 35% des emplois globaux de l'économie, génèrent 25% du chiffre d'affaires agrégé du secteur privé et particpent à hauteur de 14,5% à la valeur ajoutée du pays. Comment le pays d'Erdogan a réussi à faire de ses petites entreprises une locomotive du développement ? Les réponses de Murat Gursoy, Associate Partner à McKinsey et spécialiste de l'économie turque.
Ce 13 février à Casablanca, lors du Forum des Très Petites Entreprises organisé par Attijariwafa Bank, l'expérience turque dans le développement et l’accompagnement des petites entreprises a été exposée par Murat Gursoy, Associate Partner à McKinsey et spécialiste du marché turc.
Le modèle a été présenté pour inspirer les décideurs marocains.
En Turquie, comme un peu partout dans le monde, le nombre de TPE est important. Elles représentent un peu plus de 93% du total des entreprises à fin 2017. Sur 3,1 millions entreprises turques, 2,9 millions sont des TPE.
Sur la même année, ce sont plus de 35% des emplois globaux de l’économie turque qui ont été fournis par les TPE, avec en moyenne 2 salariés par entreprise.
Les TPE de Turquie ont également réalisé un chiffre d’affaires global dépassant les 384 milliards d’euros sur la même période, soit 25,1% du chiffre d’affaires réalisé par l’ensemble des entreprises turques. Elles ont également contribué à 14,5% au total de la valeur ajoutée du pays.
Des chiffres conséquents certes, mais Murat Gursoy tient toutefois à préciser que les TPE, même en Turquie, restent également fragiles et font face à de nombreux challenges, qui menacent leur expansion et parfois même leur survie.
Il explique que les TPE turques pâtissent d’un accès limité au marché local, et que 75% de leur volume d’affaires reste restreint au commerce et aux travaux de construction.
Un écosystème public-privé autour de la TPE
Il évoque également des soucis de financement, et un accès restreint aussi bien à l’infrastructure qu’aux outils technologiques. Ce dernier point en particulier fait que la productivité du travail chez les TPE ne dépasse pas le quart de celle affichée par les grandes structures.
Face à ces difficultés, c’est un véritable écosystème autour de la TPE, aux contours bien précis, qui a été mis en place par les autorités turques, avec six intervenants principaux : le gouvernement, les grandes entreprises, les associations professionnelles, les banques et institutions financières, et les "talent providers", ou fournisseurs de talents.
Dans cette boucle, chacun tient un rôle précis. Le gouvernement orchestre toute la chaîne de valeur, et balise le terrain pour garantir un accès plus souple et privilégié au financement, à l’infrastructure, et à la formation...
Pour leur part, les grandes entreprises sont encouragées à investir dans des programmes de développement pour leurs petits fournisseurs, afin de développer la base de talents locaux. Les associations professionnelles sont tenues de défendre les intérêts des TPE au moment de l'élaboration des politiques publiques ; les fournisseurs de talents livrent des programmes sur mesure pour les besoins spécifiques des TPE ; et les banques assouplissent leurs conditions d’octroi de financement selon les différentes conventions conclues dans le cadre de cet écosystème.
Au niveau des pouvoirs publics, Murat Gursoy énumère trois principaux acteurs dont les mesures ciblent la population des TPE : une agence nationale spécialisée dans le développement des PME, dénommée KOSGEB ainsi que le ministère de l’Industrie et de la technologie et le ministère du commerce qui offrent différents programmes et mesures de soutien aux TPE chacun selon son champ de spécialité.
Une batterie de subventions pour l'internationalistion des TPE
Le ministère turc du commerce, par exemple, a développé des programmes pour permettre aux TPE d’accéder aux marchés internationaux, en subventionnant des études de marché, des programmes de marketing international et des services de consulting, entre autres.
En 2017, ce sont plus de 2.000 TPE turques qui ont pris part à 190 projets visant à renforcer leur accès aux marchés internationaux.
"Les TPE qui ne peuvent pas accéder à ces marchés par elles-mêmes intègrent ces initiatives collectives", a expliqué l'expert turc.
Ce même ministère soutient également les TPE pour adhérer à des plateformes internationales d’e-commerce, avec une subvention s’élevant à 80% du coût de l’adhésion, plafonnée à 2.000 dollars. Cette démarche se fait à travers les associations professionnelles, et exige que chaque demande de subvention soit faite par au moins 250 TPE, afin d’encourager celles-ci à s’abonner à ces plateformes.
Pour sa part, la KOSGEB offre, entre autres, des subventions pour couvrir une partie des charges des intérêts des financements bancaires octroyés aux TPE.
M.Gursoy indique que toutes les grandes banques privées ont participé à ce programme de subventions en 2018. Le gouvernement turc a d’ailleurs revu à la hausse la taille de ce programme de subvention, le portant à 180 millions d’euros contre 10 millions d’euros seulement en 2016.
En termes d’accès à l'infrastructure, le ministère turc de l’Industrie et de la Technologie accorde des prêts à des conditions avantageuses aux petites coopératives de construction pour aménager des sites industriels. Il en résulte plus de 500 petits sites, regroupant plus de 100.000 petites et très petites entreprises.
Cette approche a permis la création de plus de 180 zones industrielles organisées de presque 32.000 hectares, qui ont permis à des TPE de se relocaliser auprès de grandes entreprises.
D’une autre part, la Turquie mise grand sur les incubateurs. L’agence KOSGEB a même créée des incubateurs qui offrent des services de tenue de la comptabilité et des finances aux TPE.
L'agence prend également en charge une majeure partie des frais de participations des TPE à des programmes de formation, en plus de l’octroi de formations gratuites par ses succursales régionales.
Selon les données fournies par Murat Gursoy, sur les 20 dernières années, ce sont près de 500 millions d’euros qui ont été mobilisées annuellement par les pouvoirs publics pour financer les différentes mesures du soutien à l’égard des TPE.
L’expert souligne d'ailleurs que l’exécution efficace et efficiente de ces mesures est suivie de près par l'Etat. Cela a permis de déterminer des packages d’assistance et de soutien ciblés, plutôt que d’introduire des mesures généralistes qui ne prennent pas en compte les spécificités de certaines catégories de TPE.
De quoi inspirer nos décideurs qui veulent faire de la TPE un vivier de création de richesse et d'emploi pour les jeunes..
Le 18 février 2019
Source Web Par Le Boursier
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mercredi 20 février 2019
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