Culture et Tourisme font-ils bon ménage ?
En philosophie, le mot Culture désigne ce qui est différent de la nature. La culture a longtemps été considérée comme un trait caractéristique de l’humanité, qui la distinguait des animaux. Pour une institution internationale comme l’UNESCO : « Dans son sens le plus large, la culture peut aujourd’hui être considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels, matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts, les lettres et les sciences, les modes de vie, les lois, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances ». Ce « réservoir commun » évolue dans le temps par et dans les formes des échanges. Il se constitue en de multiples manières distinctes d’être, de penser, d’agir et de communiquer en société.
Voici la définition que l’on trouve de la Culture dans Wikipedia aujourd’hui.
Mais dans les faits, même si la culture utilise un champ très large, elle est quand même bien orientée vers le patrimoine et les arts dans l’imaginaire collectif. La Direction Générale des entreprises nous indiquera les faits suivant sur le secteur :
Avec plus de 8 000 musées dont 1 200 « Musées de France », 1 500 festivals, 44 000 monuments historiques classés et inscrits, 40 sites culturels inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, des parcs et jardins d’exceptions et des savoirs faires reconnus internationalement, l’offre culturelle et patrimoniale représente l’un des principaux atouts touristiques de la France.
Le poids de ce secteur est estimé à près de 100 000 emplois et 15 milliards d’euros de retombées économiques.
En contrepartie, le tourisme constitue la première voie d’accès à la culture puisqu’il génère plus de 60 % de la fréquentation de ces sites. En France, le tourisme et la culture sont deux thématiques complémentaires. En effet, si les professionnels du tourisme exploitent la richesse culturelle d’une destination pour accroître son attractivité et générer des retombées économiques, la fréquentation touristique participe également à la survie des sites culturels. Il s’agit d’une des principales motivations de séjour pour les touristes français et étrangers, quel que soit leur pays d’origine.
Au-delà des grandes métropoles, la fréquentation touristique générée par les sites culturels à un impact direct sur le développement économique des territoires, que ce soit en termes d’emplois et de recettes économiques. Ainsi, la culture est devenue le catalyseur des stratégies touristiques locales.
Conscient du poids du tourisme culturel en France et de la nécessité d’engager des actions coordonnées pour développer cette filière, les ministères chargés de la culture et du tourisme ont actualisé une convention-cadre le 19 janvier 2018. La volonté est de doter la France d’une stratégie plus offensive pour accroitre les retombées économiques touristiques à travers la valorisation des sites et évènements culturels.
People walk around the pyramid of the Louvre museum in Paris, on February 18, 2017. / AFP PHOTO / FRANCOIS GUILLOT
Le tourisme culturel est bien pris en compte par la DGE dans la politique touristique française, fait naturel à la vue des audiences que font les grands sites culturels français ces dernières années…
- Le Musée du Louvre 8,1 millions de visiteurs (+9,5% par rapport à 2016)
- Le château de Versailles avec 7,7 millions (+15,1%)
- La tour Eiffel est en troisième position avec 6,2 millions de visiteurs (+5,6%)
- Le Mont Saint Michel :2,5 millions en 2016
- Le pont du Gard – 1 201 000 visiteurs
Les audiences sont très bonnes voir même en progression pour certains sites et il est clair que l’histoire et le patrimoine français sont un réel atout pour le tourisme national et facilite l’attrait auprès des populations international pour la France.
MAIS L’ART ET LA CULTURE NE FONT PAS TOUT…
Même si l’art est à porter de tous, je souhaite revenir sur une fâcheuse habitude française, d’essayer de mettre sur chaque rond-point de France une œuvre d’art plus ou moins réussi. Je vous rassure tout de suite, ce n’est pas ça qui attirera demain de nouveaux touristes sur votre territoire…
L’art se définit en plusieurs familles selon une classification des arts, établie en 1969 par le philosophe Étienne Souriau en se basant sur sept caractéristiques sensorielles.
1. L’architecture
2. Sculpture ;
3. Arts visuels (peinture, dessin, etc.) ;
4. Musique ;
5. Littérature (poésie ou dramaturgie) ;
6. Arts de la scène (théâtre, danse, mime, cirque) ;
7. Cinéma ;
Certains rajoutent comme 8ème art, la télévision et les séries télévisuelles.
Je donnerais une vision dynamique de la culture au travers des arts. Les arts ont la capacité à faire appel à l’imaginaire de chaque individu, et c’est peut-être cela que les touristes viennent rechercher dans le tourisme culturel. Donc notre rond-point en est loin…
De nombreux exemples nous démontrent l’intérêt de l’usage de la culture au sein des territoires. Quatre jours et 280.000 spectateurs, les organisateurs des Vieilles Charrues sont ravis des résultats de leur édition « colossale » 2018, c’est inattendu pour la petite ville bretonne de Carhaix. Mais la joie d’une édition réussie n’empêche pas la vigilance pour l’avenir. « Il faut que notre festival trouve une solution pour diminuer le risque financier », a souligné lors d’une conférence de presse Jean-Luc Martin, président du festival. « Il existe l’équivalent d’un stade de France à Carhaix. On peut accueillir des évènements en dehors de juillet », a-t-il souligné, rappelant que chaque soirée, la plaine de Kerampuilh accueillait autour de 70.000 personnes. Géré par une association à but non lucratif et s’appuyant sur un réseau de 7.000 bénévoles, le festival doit vendre 205.000 billets pour atteindre l’équilibre. La vente assure 80% de son budget, les 20% restants provenant de partenaires ou de mécènes. « Le modèle économique des Charrues devient une exception dans un secteur en pleine mutation entre la concentration du milieu et une concurrence grandissante », constate Jérôme Tréhorel
On ne peut donc pas généraliser un succès comme les Vieilles Charrues à toutes manifestations culturelles, beaucoup trop de facteurs rentrent en ligne de compte pour faire de ces évènements une réussite ou non. Avec ceci, se pose la question de la gestion de l’injection de tant de visiteurs au même moment sur un territoire. Les routes sont-elles faites pour ? Les conditions d’hygiènes et de sécurité sont-elles réunies ? En gros comment réussir l’accueil touristique…
ALORS COMMENT UTILISER LA CULTURE AU SEIN DE SA STRATEGIE TOURISTIQUE ?
Que ce soit par le patrimoine naturel ou culturel, que ce soit par l’art, il me semble que l’intérêt du territoire est de jouer la carte de l’authenticité. Je m’explique… Un territoire de montagne pourra utiliser comme outil touristique des équipements culturels autour de l’eau comme le fait Saas Gründ en Suisse avec son sentier de l’eau autour du bien-être en montagne puisque c’est une ressource naturelle locale. Les châteaux bordelais et l’œnotourisme du coté de Médoc Atlantique sont aussi un très bon exemple de l’adaptation du tourisme aux ressources locales. Ce n’est pas la peine de forcer le trait, le tourisme culturel ne pourra fonctionner que si le terrain s’y prête.
“L’émergence de nouvelles formes de tourisme, tel le tourisme gourmand, le tourisme solidaire et équitable ou encore le tourisme culturel, témoigne de l’élargissement constant des intentions touristiques et en questionne le sens social. Outre la complexification croissante du champ touristique qui en résulte, nous assistons à la multiplication des destinations. Tous les lieux, quelle que soit leur échelle – du restaurant aux parcs écologiques en passant par des villes entières – ou quelle que soit leur localisation – du quartier voisin au pays situé à l’autre bout de la planète –, sont susceptibles de devenir des destinations. Désormais sans limites géographiques ou physiques, les nouvelles formes de tourisme sont aussi des manières d’aller au-delà de limites symboliques, imaginaires, culturelles. Si de nouvelles destinations sont offertes, les anciennes sont aussi susceptibles de constamment se renouveler, de telle sorte que la dynamique de changements ouvre à son tour des possibilités infinies.” dit Jean-René Morice dans son livre – Le patrimoine, outil de dynamisation touristique des villages ? –
MAIS LE TOURISME NE POURRAIT IL PAS ALTERER CERTAINS SITES PAR TROP DE FREQUENTATION ?
J’ai cité précédemment le Mont Saint Michel, le premier site touristique français après Paris rencontre aujourd’hui de nombreux problèmes apportés par le tourisme culturel. Transports surchargés, axes routiers encombrés, prestations médiocres sur le site… Deux rapports pointent les défaillances d’un site qui a perdu un million de visiteurs en une décennie. Les conditions d’accueil au Mont Saint Michel et leur financement sont épinglées dans deux rapports, l’un de la Cour régionale des comptes (CRC), l’autre du Conseil économique et social régional (CESER). “Une série de dysfonctionnements et de problèmes ressort de manière récurrente au sujet de l’accueil touristique” sur ce site classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Si le site reste l’un des plus visités de France hors région parisienne, il a perdu quelque 1 million de touristes depuis quelques années. Ils étaient 3,5 millions chaque année à la fin des années 2000 selon l’Unesco à visiter l’abbaye classée au patrimoine mondial de l’Unesco, ils n’étaient plus que 2,5 millions en 2016.
Mais de nouvelles visions d’accord entre le tourisme et la culture naissent actuellement. Lors de l’achèvement des aménagements destinés à accueillir le public au musée du Louvre, Jean-Luc Martinez, son directeur général, observait, le 6 juillet dernier, que « le tourisme est en train de changer ». « La question n’est plus tant d’augmenter le nombre de visiteurs [selon le DEPS, le Louvre conserve en 2015 sa position de musée le plus fréquenté du monde avec 8,7 millions de visiteurs même si ce nombre est en diminution par rapport à 2014 (NDLR)] que de savoir comment les accueillir et les aider à tirer un maximum d’enseignements de leur visite. L’essentiel est d’offrir à nos visiteurs un Louvre plus accueillant, plus accessible et plus généreux », ajoutait-il.
A l’heure où certains sites se plaignent des débordements du tourisme de masse, l’afflux des visiteurs dans les sites touristiques à l’orientation culturelle peut aussi poser les mêmes questions. N’est-il pas temps de favoriser la qualité d’accueil plus que sa quantité ? Ne devons-nous pas prendre en compte l’usure prématurée due aux passages du public ? N’est-il pas temps d’intégrer dans toute politique touristique une notion environnementale afin d’en tirer une notion de durabilité ?
Le 29 septembre 2018
Source web par: agence alps
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