Brics: Européens et Américains ont fait "mauvais usage" du FMI et de la BM

Européens et Américains ont fait "mauvais usage" du FMI et de la Banque mondiale pour servir leurs intérêts: la charge n'est pas nouvelle, mais vient cette fois d'une institution rivale créée par les grands pays émergents.
"Ces institutions reflètent d'abord le point de vue, les intérêts et l'idéologie des puissances de l'Atlantique-Nord, les Européens d'un côté et les Américains de l'autre", affirme dans un entretien à l'AFP Paulo Nogueira Batista, vice-président de la Banque de développement des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).
Piliers de l'architecture financière mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) tiennent cette semaine à Washington leur assemblée annuelle, après la consécration du statu quo à leur sommet.
Comme c'est le cas depuis la création des institutions dites de Bretton Woods en 1945, un Américain, Jim Yong Kim, vient ainsi d'être reconduit à la tête de la BM, tandis que les Européens ont conservé en juillet la tête du FMI avec le nouveau mandat accordé à la Française Christine Lagarde.
Le fait que cette règle tacite perdure "montre que les changements dans ces institutions sont plus lents qu'attendu et l'espoir que les choses changent plus limité", assure M. Nogueira Batista, qui a été le représentant brésilien au FMI pendant huit ans.
"Quand on voit de telles choses à Washington, nous nous disons: 'Eh bien, on a eu raison de lancer notre propre banque'", ajoute-t-il.
De fait, la "Nouvelle banque de développement" basée à Shanghai, dont il est le vice-président, a été mise sur pied en juillet 2015, pour bousculer l'ordre établi et protester contre la sous-représentation des pays émergents dans les grandes institutions économiques.
Pendant la crise de 2010-2011, Européens et Américains, affaiblis par la tempête économique, ont certes promis de faire plus de place à la Chine ou à l'Inde, mais ces espoirs ont été vite douchés, en dépit d'une réforme, longtemps retardée, de la gouvernance du FMI.
"Les Brics n'auraient pas été aussi loin (...) s'ils étaient pleinement satisfaits des institutions existantes", affirme M. Nogueira Batista, évoquant une "certaine déception" des pays émergents, qui ont tenu l'économie mondiale à bout de bras pendant la crise financière.
Erreurs
La naissance de la "banque des Brics" et de leur propre fonds monétaire a scellé une petite révolution symbolique, selon M. Nogueira Batista. "C'est la première fois qu'une banque de développement avec des visées mondiales est créée par les seuls pays émergents", assure-t-il.
La Chine et ses partenaires restent certes membres à part entière des institutions de Bretton Woods, mais ils entendent tracer "leur propre chemin", selon le dirigeant. "Si nous faisons des erreurs, nous espérons qu'au moins, ce seront de nouvelles erreurs et pas celles que les anciennes institutions ont commises".
Le grand défi sera, selon M. Nogueira Batista, d'éviter une "politisation" de l'institution.
"Un des problèmes des institutions de Bretton Woods est que leurs principaux membres en ont fait un mauvais usage, en les transformant en instruments de leur agenda", assure-t-il, citant notamment le fait que ni la Russie ni l'Iran, en froid avec les puissances occidentales, n'ont accès aux fonds de la Banque mondiale.
Pour garantir un équilibre politique, aucun des cinq pays membres ne dispose, au sein de la banque des Brics, d'un droit de veto comme celui dont bénéficient les Américains au FMI et à la BM, rappelle M. Nogueira Batista.
La nouvelle institution, qui a approuvé ses premiers projets cette année et dispose d'un capital de 100 milliards de dollars, veut également afficher sa différence dans sa relation avec les pays emprunteurs, en misant sur la coopération, assure M. Nogueira Batista.
Le FMI et la Banque mondiale "ont souvent déjà une idée de ce qui est nécessaire et imposent leurs mesures", assure-t-il.
La nouvelle institution fait toutefois encore figure de petit poucet face au FMI et à la BM et à leurs 189 Etats membres et son succès est loin d'être acquis, de l'aveu même de son vice-président. "Il faut encore voir si ce sera un succès, car l'objectif est vaste", admet M. Nogueira Batista. "Seul l'avenir le dira".
Le 05 Octobre 2016
SOURCE WEB Par Médias 24
Les tags en relation
Les articles en relation

Banque mondiale: 2,7% de croissance pour le Maroc en 2016
Le taux de croissance qu’enregistrerait le Maroc en 2016 serait inférieur à la moyenne mondiale, estimée à 2,9% pour la même année. C’est ce que prév...

Dominique Strauss-Kahn lance un vaste projet hôtelier au Maroc
Dominique Strauss-Kahn (DSK), ex-directeur général du Fonds monétaire international (FMI), également ancien ministre français de l’Économie, des finance...

Impôts : Le Maroc a un potentiel de recettes fiscales non mobilisé de 12% du PIB (FMI)
Le Fonds monétaire international (FMI) estime que le Maroc peut mobiliser des recettes fiscales supplémentaires afin d’améliorer ses perspectives de croiss...

Séisme : 12 milliards de dirhams collectés par le Fonds 126
L’annonce a été faite ce lundi par le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, à Marrakech. Les contributions financières continuent d’affluer en...

Les migrants climatiques : visages humains d'un dérèglement planétaire
Selon une nouvelle étude de la Banque mondiale, l’aggravation des effets du changement climatique dans trois régions du monde densément peuplées pourrait ...

#Maroc_Financement_extérieur: L’enveloppe en hausse de 300%
Le montant des opérations de financement extérieur a explosé en 2019 comparé à l’année précédente, souligne le rapport de la Direction du budget. L’...

PPP : Comment se débrouille le Maroc par rapport au reste de l’Afrique
Un classement peu connu de la Banque mondiale évaluant la capacité des pays à implémenter des PPP durables et efficaces permet d’apprécier de manière pr...

Séisme : l’ONMT a? pied d’œuvre pour la destination touristique Maroc
De?s le lendemain du se?isme, l’Office national marocain du tourisme (ONMT) a mis en place une cellule de crise pour faire face aux retombe?es sur le secteur ...

Les poissons d'eau douce cruciaux pour la sécurité alimentaire dans le tiers-monde
Les poissons d'eau douce jouent un rôle essentiel pour nourrir des dizaines de millions de personnes dans les pays les plus pauvres, selon des chercheurs q...

Le FMI vient de publier un rapport accablant sur la dette mondiale… et personne ne s’en soucie
La dette mondiale atteint désormais 152.000 milliards de dollars, un montant jamais atteint, a alerté le Fonds monétaire international (FMI) dans un rapport ...

Les pays en développement appelés à reconsidérer leurs relations avec les banques internationale
Les restrictions des banques étrangères limitent l’accès des entreprises et des ménages à des financements indispensables, selon la BM Les pays en dé...

FMI: L’Afrique du Nord doit surveiller sa dette
La progression du niveau de la dette publique pourrait représenter un facteur de vulnérabilité en Afrique du Nord, selon le FMI qui tient cette semaine ses r...