Chambre des représentants Le cadre juridique régissant la communication audiovisuelle jugé dépassé
Mustapha EL Khalfi estime que l’adaptation du cadre juridique s’impose.
Outre l’adaptation aux nouvelles dispositions constitutionnelles, la loi sur la communication audiovisuelle devrait être en mesure d’accompagner l’évolution technologique.
Dix ans après son entrée en vigueur, la loi 77-03 relative à la communication audiovisuelle s’avère, aujourd’hui, complètement dépassée. Tel était le constat établi lors de la journée d’étude organisée par les groupes de la majorité parlementaire à la Chambre des représentants. Partant de là, les participants à cette rencontre ont été unanimes à souligner la nécessité de revisiter le cadre juridique régissant le secteur de l’audiovisuel afin de l’adapter aux mutations profondes que connaît la société marocaine, d’une part, et pour mieux répondre aux attentes des téléspectateurs, d’autre part.
La réforme de la loi est également dictée par des considérations constitutionnelles, puisque la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (HACA) a été érigée en 2011 en institution constitutionnelle. «La consécration constitutionnelle de la HACA a des effets juridiques sur la loi sur l’audiovisuel, d’où la nécessité de mener cette réforme», a expliqué le ministre de la Communication, Mustapha EL Khalfi, lors de cette rencontre. Et d’ajouter que l’adaptation du cadre juridique s’impose aussi compte tenu de la consécration constitutionnelle de certains principes comme la gouvernance, la transparence, l’indépendance et le pluralisme. M. El Khalfi a ajouté par ailleurs que la réforme de la loi sur l’audiovisuel permettrait d’améliorer les mécanismes du pluralisme linguistique, culturel, politique et associatif. Car, selon lui, «la Constitution est en avance par rapport à l’actuelle loi sur la communication audiovisuelle».
Outre l’adaptation aux nouvelles dispositions constitutionnelles, la loi sur la communication audiovisuelle devrait être en mesure d’accompagner l’évolution technologique. Mustapha El Khalfi a souligné dans ce sens que les changements technologiques à l'ère du numérique, que ce soit en matière de diffusion, de production, d'accès à l'information électronique ou de recours aux réseaux sociaux, imposent la réforme de l’actuel cadre juridique. L’objectif étant de permettre au secteur de relever les défis de la mondialisation de l'information. En effet, le développement d’Internet dans la société a changé les habitudes. Aujourd’hui, les Marocains se tournent de plus en plus vers la Toile pour regarder les produits audiovisuels. Selon une étude menée par le ministère de la Communication, dont les résultats seront diffusés incessamment, 46% des Marocains âgés entre 15-24 regardent les chaines télévisées depuis leurs smartphones. Et 56% des Marocains de plus de 24 ans utilisent les réseaux sociaux pour regarder les chaines TV. Toutefois, seulement 7% des personnes âgées de plus de 45 ans utilisent leurs smartphones pour les produits audiovisuels et 11% optent pour les réseaux sociaux. Ainsi, les changements d’habitudes des Marocains dus à l’utilisation des nouvelles technologies imposent la mise à niveau du champ audiovisuel et la mise en place d’une politique nationale numérique, a insisté le ministre de la Communication.
Mohamed Belghouate, directeur de l'Institut supérieur des métiers de l'audiovisuel et du cinéma (Ismac), partage cet avis. D’après lui, la loi sur l’audiovisuel est devenue incapable d'accompagner les défis des médias numériques et du développement des technologies de diffusion et de l'utilisation à grande échelle de l'Internet, ce qui nécessite impérativement son amendement. D’autant plus que certaines nouvelles pratiques ne sont pas encadrées par l’actuelle loi, comme les offres audiovisuelles proposées par les opérateurs télécoms, ainsi que les nouveaux produits audiovisuels diffusés dans les salles de cinéma. «Des tendances qui échappent au contrôle de la HACA et du Centre cinématographique marocain», a-t-il fait remarquer. M. Belghouate a également relevé le vide juridique concernant l’organisation de certains métiers de l’audiovisuel. Le volet institutionnel n’est pas en reste.
Sur ce registre, le directeur de l’Ismac a appelé à mettre en place une vision concernant l’architecture institutionnelle chargée de l’audiovisuel, qui sera capable de répondre à l’évolution de l’offre et au développement des techniques de production. Conscient de ces défis, le gouvernement a fixé les orientations autour desquelles la réforme de la loi devra s’articuler. Selon Mustapha El Khalfi, la révision du cadre juridique devra se baser sur plusieurs éléments, notamment la consécration de la notion de service public audiovisuel. «C’est le titre de la Constitution relatif aux libertés et droits fondamentaux qui sera le cadre juridique fixant la notion du service public», a expliqué le ministre de la Communication. L’autre élément de base de la réforme est la consécration de l’indépendance. Un concept qui ne figure pas dans l’actuelle loi. Selon le ministre, l’absence de ce terme s’explique par le fait que le principe de l’indépendance du secteur n’est apparu que bien après l’entrée en vigueur de la loi. «Même en France, ce principe n’a été adopté qu’en 2013», a-t-il tenu à rappeler.
La protection du pluralisme, y compris le pluralisme associatif, et l’appui au développement de la production nationale indépendante, la consécration de la transparence et le renforcement des capacités des institutions nationales sont également autant de piliers devant sous-tendre la réforme du champ audiovisuel.
Le 04 Janvier 2016
SOURCE WEB Par LE MATIN
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