Dépasser les limites : préserver l'eau douce pour un avenir résilient

La sixième limite planétaire a été officiellement franchie : celle de l’eau douce. Pourtant, cette ressource précieuse continue d’être perçue comme inépuisable. Charlène Descollonges, hydrologue et lanceuse d’alerte, nous incite à ralentir et à renouer avec le cycle naturel de l’eau pour envisager un futur durable.
Charlène Descollonges, ingénieure hydrologue, s'est donnée pour mission de transformer notre regard sur l'eau. Plutôt que de la sur-exploiter, elle prône une réintégration respectueuse de cette ressource dans son cycle naturel. Après avoir travaillé dans la gestion publique des ressources hydriques, elle est aujourd'hui consultante indépendante et préside l’association « Pour une hydrologie régénérative ». Cette organisation cherche à renforcer la résilience des territoires face aux risques liés à l’eau. Son ouvrage Agir pour l’eau, paru en septembre, explore ces enjeux.
Une répartition inégale de l’eau douce
L’humanité partage avec le reste du vivant moins de 1 % de l’eau douce disponible sur Terre. Le cycle de l’eau se compose de réserves interconnectées par des flux dynamiques. La majorité de l’eau terrestre, soit 97,5 %, se trouve dans les océans, laissant seulement 2,5 % d’eau douce. Parmi cette faible quantité, 75 % sont retenus dans les glaciers, 22 % dans des nappes souterraines profondes, et seulement 1 % est accessible pour l’ensemble des organismes vivants.
Une vision déformée du cycle de l’eau
Selon Charlène Descollonges, notre représentation simplifiée du cycle de l'eau omet deux aspects essentiels : l’impact humain et le recyclage continental de l’eau verte. L'influence humaine, par les changements climatiques et la pollution, modifie profondément ce cycle. Par ailleurs, l’eau verte, issue de l'évaporation des sols et de la végétation, génère une part importante des précipitations. Ce phénomène, souvent méconnu, influe sur les bassins atmosphériques, qui relient des territoires éloignés.
L’empreinte humaine et ses conséquences
Chaque année, l’humanité consomme 24 000 milliards de mètres cubes d’eau, soit près de la moitié du flux d'eau douce qui s'écoule des continents vers les océans. Cette utilisation excessive, principalement liée à l’agriculture et à la déforestation, affecte les sols et aggrave les déséquilibres du cycle hydrologique. En France, l’empreinte eau quotidienne d’un individu se situe entre 5 000 et 11 000 litres, selon les méthodes de calcul.
En perturbant le cycle long de l'eau, nous avons transformé des réserves souterraines en flux rapides, aggravant les sécheresses, les inondations et l’érosion des sols. Ces phénomènes s'intensifient, mais des solutions existent pour ralentir cette dynamique.
L’hydrologie régénérative : une réponse adaptée
Charlène Descollonges défend l’hydrologie régénérative, une approche territoriale qui vise à ralentir l'eau, à la redistribuer et à encourager son infiltration dans les sols. Ce modèle repose sur trois piliers : l’eau, les sols et les arbres. En améliorant la structure des sols et en densifiant la végétation, il est possible de restaurer les écosystèmes naturels et de réduire l’impact des dérèglements hydriques.
Des actions concrètes pour chaque citoyen
Pour Charlène, l'action individuelle est essentielle. Cela commence par mieux comprendre le cycle de l'eau domestique, en questionnant la provenance et le traitement de l'eau que nous utilisons. Ensuite, il est possible de réduire son empreinte eau en modifiant son alimentation, en privilégiant des produits locaux et biologiques. Enfin, elle encourage chacun à s'engager dans des initiatives collectives pour restaurer les écosystèmes et repenser notre relation à l'eau.
Si Charlène Descollonges est pessimiste quant aux effets de la trajectoire actuelle, elle reste optimiste sur la capacité d’adaptation humaine. Elle appelle à voir dans les crises actuelles l’opportunité de construire un monde nouveau, plus respectueux des cycles naturels.
Message d’espoir pour les jeunes générations
Charlène Descollonges conclut par un message d’espérance à destination des jeunes générations. Elle reconnaît que nous assistons à la fin d’un monde, mais croit fermement que cela permettra l’émergence d’un futur plus désirable, porté par des dynamiques collectives.
Le 24/09/2024
Rédaction de l’AMDGJB Géoparc Jbel Bani
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