Décès de Paul Tapponnier, pionnier de la tectonique des plaques
Le géologue, membre de l'Académie des sciences en France, et de la National Academy of Sciences aux États-Unis est mort le 24 décembre 2023, à l'âge de 76 ans.
Le géologue Paul Tapponnier, pionnier internationalement reconnu dans l'étude de la déformation des continents, est mort le 24 décembre 2023, à Pékin, ville où il dirigeait encore son propre laboratoire de recherche, à l'âge de 76 ans. Signe de sa contribution majeure à sa discipline, il était depuis 2005 membre de l'Académie des sciences en France, mais aussi de la National Academy of Sciences aux États-Unis, une reconnaissance assez exceptionnelle pour un étranger.
Après son diplôme d'ingénieur de l'École des mines de Paris, obtenu en 1970, Paul Tapponnier part à l'université de Montpellier, où il passe une thèse de doctorat en géologie en 1978. La tectonique des plaques est alors une science toute jeune, la théorie de la dérive des continents proposée par Alfred Wegener en 1912 n'ayant fait consensus qu'au cours de la deuxième moitié des années 1960. Si la théorie d'ensemble est alors bien acceptée, tout reste à faire, notamment sur le terrain, pour comprendre et décrire les mécanismes qui façonnent en permanence la surface de notre planète.
Lors d'un passage au prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), à la fin des années 1970, Paul Tapponnier découvre les premières images satellite de Landsat. Il comprend tout de suite leur énorme potentiel pour étudier la mécanique des plaques. Son utilisation pionnière de ces images lui permet de découvrir des failles actives, en Asie centrale, que personne ne soupçonnait.
En 1980, de retour en France, il est remarqué et recruté à l'IPGP (Institut de physique du globe de Paris) par Claude Allègre. Et c'est là qu'il va faire l'essentiel de sa carrière. «?C'est difficile de résumer une carrière aussi riche, mais la contribution majeure de Paul Tapponnier, c'est d'avoir fait le passage d'une théorie d'ensemble à la description des failles actives, qui sont la localisation des déformations de la croûte terrestre, là où se concentrent les séismes, témoigne Yann Klinger, directeur du laboratoire créé par Tapponnier à l'IPGP, le groupe tectonique et mécanique de la lithosphère. Le signe de sa grande influence sur sa discipline, c'est que tout le monde a repris le formalisme qu'il utilisait pour décrire la tectonique sur les cartes. »
De l'aveu de ses pairs, le grand talent de Paul Tapponnier est d'avoir été capable de faire le lien entre une vision globale des phénomènes et les études détaillées sur le terrain. «?Beaucoup de géologues font du terrain et savent repérer des failles, mais ils ne sont pas forcément capables de les replacer dans un contexte plus global, poursuit Yann Klinger. Paul Tapponnier avait une très bonne formation géologique de terrain, mais il n'est pas resté l'œil sur le caillou ! » L'un des terrains d'étude où l'approche de Paul Tapponnier a marqué son domaine fut le plateau tibétain, avec des recherches menées sur le terrain, en Chine, dès le début des années 1980, à une époque où la collaboration scientifique avec ce pays était encore très compliquée. En combinant images satellite, observations poussées sur le terrain et modélisation en laboratoire avec de la plasticine, il montre que le plateau tibétain dérive vers l'est, vers la mer de Chine, par l'effet de la poussée du sous-continent indien.
Une théorie qui fait consensus
Le triangle de la plaque tectonique indienne s'est détaché de l'Afrique il y a plusieurs dizaines de millions d'années, est remonté vers le nord à travers l'océan Indien et est entré en collision avec la plaque d'Eurasie. «?La collision entre ces deux plaques à une vitesse considérable, l'Inde continuant à bouger vers le nord de 4 centimètres par an, donne naissance à la chaîne de montagnes de l'Himalaya, note Yann Klinger. Ce phénomène n'absorbe que 50?% de la déformation induite par la collision et Paul Tapponnier a montré que tout ce qui est derrière la chaîne de montagnes se comporte comme un bloc rigide qui se déplace vers l'est. Cette théorie appelée l'extrusion du plateau tibétain a longtemps été contestée, avec des modèles alternatifs, mais fait désormais consensus dans le monde entier. » Son travail ne s'est pas limité à l'Asie, et il a aussi fait des contributions majeures en Méditerranée, à Djibouti, ou aux encore Antilles.
À cause de la limite d'âge, il avait quitté la France en 2008 et rejoint une équipe à l'université NTU, à Singapour, avant de s'installer en 2019 à l'Institut national des risques naturels, à Pékin.
Le 28/12/2023
Source web par : lefigaro
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