Plantations, niches, revenus… la fumée dissipée sur le cannabis
Une synthèse des études a été présentée par le ministère de l’intérieur au Parlement
Les revenus des paysans sont passés de 500 millions d’euros au début des années 2000 à 325 millions actuellement alors que le chiffre d’affaires en Europe oscille entre 10 et 12 milliards d’euros.
Le gouvernement plante le décor. En marge de l’examen par la Commission de l’intérieur, des collectivités territoriales, de l’habitat et de la politique de la ville à la Chambre des représentants du projet de loi N°13.21 relatif aux usages licites du cannabis, le ministère de l’intérieur a dévoilé une synthèse des études réalisées sur ce sujet.
Plantations en forte baisse
L’une des révélations phares des études concerne l’étendue des plantations du chanvre indien. Il semble dans ce sens que les campagnes menées par les autorités au cours des deux dernières décennies ont contribué à réduire drastiquement les terrains cultivés. Selon les données présentées, les zones géographiques concernées par la culture illégale du cannabis sont Al Hoceima, Ouezzane, Taounate, Larache, Chefchaouen et Tétouan. Selon les responsables, les superficies cultivées ont connu une réduction notable depuis 2003, date de la réalisation des études d’enquêtes multidimensionnelles sur l’impact social et économique de la culture du chanvre indien, entre le Royaume et le bureau des Nations Unies chargé de la lutte contre les stupéfiants et la criminalité. Ainsi, la superficie totale cultivée est passée de 130 000 ha au début des années 2000 à moins de 50 000 ha au cours des dernières années. Aussi, la culture de cette plante se fait à la majorité écrasante dans des petites parcelles de terrain. Ainsi, 80% des plantations sont une superficie de moins d’un hectare.
Revenus actuels et projetés
Le nombre total des personnes s’adonnant à la culture du cannabis avoisine les 400.000 personnes, soit environ 60.000 familles. Les études ont relevé de fortes disparités concernant le revenu et ce en fonction de la nature de la terre labourée, la productivité de la plante utilisée et la disponibilité de l’eau d’irrigation. Ainsi, le niveau du revenu peut passer de 16.000 DH/ha à environ 75.000 DH/ha.
Globalement, les revenus des paysans sont passés de 500 millions d’euros au début des années 2000 à 325 millions actuellement alors que le chiffre d’affaires en Europe oscille entre 10 et 12 milliards d’euros.
Autrement, les paysans sont exploités par les réseaux de trafic puisque les cultivateurs ne perçoivent que 3% de la valeur du produit contre 12% sur le marché légal. Concernant les revenus projetés, le revenu net annuel du cannabis à usage médical pourrait avoisiner les 110.000 dirhams par hectare, selon des études de faisabilité relatives à la légalisation de la culture de cette plante. Elles montrent que ce montant représente une amélioration d’environ 40% par rapport aux recettes actuelles, le tout dans le cadre de pratiques respectant les normes de l’agriculture durable.
Niches d’exportation
Concernant les marchés d’exportation, le document met l’accent sur les perspectives en direction de l’Europe à l’horizon 2028, selon deux hypothèses. La première cible 10% du marché du cannabis médical (4,2 milliards de dollars sur un total de 42), alors que la seconde hypothèse concerne 15% du marché, soit 6,3 milliards de dollars et des revenus agricoles de 630 millions de dollars. En outre, il ressort de ces études que le marché européen sera ciblé en premier lieu, notamment en raison des facilités de pénétration et compte tenu de facteurs liés aux prévisions d’évolution de la consommation et du volume des importations. Côté législation, les marchés prioritaires pour le cannabis médical marocain sont l’Espagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l’Allemagne, avec des prévisions de 25 milliards de dollars/an à l’horizon 2028. Les mêmes études relèvent que la prise en compte du potentiel des marchés français et italien renforcera le volume du marché potentiel de 17 milliards de dollars, pour atteindre 42 milliards.
L’usage médical de cette plante permettrait de réduire un ensemble de risques liés à la contrebande et à la consommation de drogue, ainsi que ceux en lien avec la santé et à l’environnement. Sur le plan économique, le développement de cette chaîne de production permettra au Royaume de passer du statut de pays importateur à celui d’exportateur de produits médicaux, pharmaceutiques et industriels.
Du statut d’importateur à celui d’exportateur
Les études réalisées ont montré que tous les produits issus du chanvre indien et vendus dans les pharmacies ou par Internet sont importés de l’étranger.
Les autorités veulent ainsi changer la donne. Il faut dire que cette plante est utilisée dans de nombreuses activités légales à l’échelle internationale.
Dans le domaine médical, les produits issus de cette plante sont utilisés dans le traitement de plusieurs maladies. Le chanvre indien est également utilisé de plus en plus pour la fabrication de produits cosmétiques.
En outre, plusieurs activités industrielles introduisent cette plante notamment dans le textile, le papier, l’industrie automobile et l’agroalimentaire.
Dans ce sens, les études réalisées ont montré une opportunité réelle et prometteuse de développement du cannabis médical, pharmaceutique et industriel, compte tenu des atouts dont dispose le Maroc, avec notamment un climat favorable, un sol de qualité, le savoir-faire des agriculteurs traditionnels et une position stratégique proche du marché européen.
Reconnaissance
Après la reconnaissance par les Nations Unies des vertus curatives du cannabis, un grand nombre de pays d’Europe, d’Amérique, d’Afrique et d’Asie a changé son approche concernant le chanvre indien en adoptant des lois visant à légaliser sa culture, sa transformation, sa distribution, son importation et son exportation ainsi que la réglementation de ses usages licites.
Selon le ministère de l’intérieur, le Royaume, en adhérant à cette orientation internationale, a adopté à travers la commission nationale des stupéfiants les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, notamment celles faisant suite au retrait du cannabis du tableau IV de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961, a-t-il rappelé.
Les premiers signes de légalisation de la plante du kif remontent au Dahir du 2 décembre 1922 qui permettait d’utiliser le chanvre indien dans le domaine médical, avant la promulgation du Dahir du 24 avril 1954 qui a limité l’usage de cette plante aux domaines de la recherche et de la formation à des fins scientifiques et ce, après autorisation du ministère de la santé.
Le 6 mai 2021
Source web Par : Aujourd'hui Le Maroc
Les tags en relation
Les articles en relation
Tanger-Med: saisie record de 27 tonnes de cannabis
Vingt-sept tonnes et trois cent kilogrammes de chira ont été saisis ce matin au port de Tanger-med. Cette quantité de drogues record était dissimulée à...
#MAROC_Projet_de_loi_Cannabis: Le plan ambitieux du ministère de l’Intérieur pour un «usage lé
Le Maroc s’apprête à s’engager dans un processus historique avec la légalisation de l’usage thérapeutique du cannabis. Un chantier colossal, élaboré...
Al Hoceïma : une zone économique bientôt dédiée à la transformation du cannabis
Dans la commune d’Issaguen (province d’Al Hoceïma), un budget de près de 45 millions de dirhams a été alloué à la création d’une zone économique d...
Usage licite du cannabis : le Maroc accélère le processus
Le Maroc a opté pour la légalisation de l’usage thérapeutique du cannabis, avec un cadre juridique destiné à permettre à l’État de valoriser une cult...
Chambre des représentants : Le projet de loi sur l’usage licite du cannabis adopté en Commission
Le projet de loi N°13.21 relatif à l’usage licite du cannabis a été adopté à la majorité, vendredi, par la Commission de l’Intérieur, des collectivi...
#MAROC_Usage_Légal_du_Cannabis: Le Conseil de gouvernement adopte le projet de loi
Le Conseil de gouvernement, réuni jeudi par visioconférence sous la présidence du Chef du Gouvernement, Saad Dine El Otmani, a adopté le projet de loi n°13...
#Maroc_Rif_Cannabis : Le Rif en ébullition depuis la légalisation de l’usage licite du cannabis
Depuis la légalisation du cannabis à des fins thérapeutique, cosmétique et industrielle par les autorités marocaines, le Rif, perçu pourtant comme l’une...
Histoire. La France a profité du cannabis marocain
La France n’a pas toujours réprimé l’usage et la commercialisation du cannabis. Entre 1912 et 1954, elle a même organisé son commerce au Maroc, alors so...
Maroc : les nouveaux rois du Rif
ARTE Reportage Le Rif est en ébullition. La fin d’un tabou se joue dans la région montagneuse la plus rebelle du Maroc. Le roi a légalisé la culture ...
Légalisation du cannabis à usage thérapeutique: le modèle marocain se précise
L’arsenal juridique est désormais complété par la publication de six arrêtés. Les producteurs intéressés devront se constituer en coopératives. Plus d...
Usage légal du cannabis : six arrêtés sont nécessaires pour achever le dispositif
L’opérationnalisation de l’Agence de réglementation des activités relatives au cannabis, très attendue par les futurs opérateurs, permettra de délivre...
Les produits à base de cannabis légal bientôt sur le marché marocain : un aperçu du processus d
Abderrazzak Mennioui, directeur général de SOMACAN, annonce que les premiers produits à base de cannabis légal seront bientôt disponibles sur le marché lo...