Amazonie : sa capacité à absorber le CO2 revue à la baisse

Selon certaines prédictions, la forêt amazonienne devrait absorber plus de CO2 dans les quinze années à venir. Un groupe de scientifiques internationaux conteste cette conclusion. Selon eux, un élément essentiel a été oublié, rendant les prédictions beaucoup plus pessimistes.
Dans l'esprit de tous, la forêt amazonienne est « le poumon vert » de notre Planète. Les plantes qui la composent absorbent le CO2, qu'il soit d'origine humaine ou naturelle, et produisent une partie de l'oxygène que nous respirons. Si le réchauffement climatique éprouve cet écosystème fragile, les prédictions réalisées avec des modèles informatiques ne remettent pas en cause son rôle d'éponge à CO2. Pourtant, une équipe de chercheurs internationaux a publié une étude dans Nature Geoscience qui établit un constat bien moins optimiste. Selon eux, le puits de carbone qu'est la forêt amazonienne perdrait entre 46 % et 52 % de la taille prédite par les modèles informatiques. Le responsable ? Un facteur indispensable à la croissance des végétaux : le phosphore.
Le CO2, l’ami des plantes
Étonnamment, l'augmentation du taux atmosphérique du CO2 a aussi des bons côtés, surtout pour le monde végétal. Le dioxyde de carbone est un carburant important pour la machine complexe qu'est la photosynthèse. En présence de forte concentration de celui-ci, la photosynthèse tourne à plein régime, la plante a donc un stock important d'énergie qu'elle utilise pour sa croissance. Ce phénomène est appelé la fertilisation par le CO2. Basés sur ce constat, les modèles prédisent l'augmentation de l'absorption du CO2 par la forêt amazonienne car elle grandira plus vite. Malgré tout, un facteur limitant n'a pas été pris en compte, le manque de phosphore dans le sol.
Le phosphore comme facteur limitant
Les régions tropicales sont connues pour leur sol plutôt pauvre en nutriments. Là-bas, c'est le phosphore issu des rochers qui est l'aliment de base des plantes. Mais, il n'est présent qu'en faible quantité dans le sol, forçant les plantes à développer toutes sortes de mécanismes pour en « manger » le plus possible. L'un d'eux utilise le carbone créé à partir du CO2 et le détourne de sa fonction première, la croissance de la plante.
Dans des conditions où la concentration importante de CO2 stimulerait la croissance des plantes, celle-ci serait irrémédiablement freinée par le manque de phosphore dans le sol. En prenant cela en compte dans leur modèle, les scientifiques allemands ont estimé que, malgré une présence importante de CO2, sans phosphore la biomasse de la forêt amazonienne n'augmenterait pas. De facto, sa capacité à absorber les gaz à effet de serre se voit diminuer de 50 % selon le nouveau modèle proposé.
Le premier graphique montre la croissance de la biomasse en simulant un taux de CO2 plus important. Si l'on voit une belle augmentation avec les modèles informatiques ne prenant en compte que le carbone (en gris) et carbone avec l'azote (en bleu), l'augmentation est deux fois plus faible pour le modèle prenant en compte le carbone, l'azote et le phosphore (en vert). Le deuxième graphique montre la croissance de la forêt (GGP) et sa productivité (NNP) durant la première année de la simulation. Le diagramme CUE correspond au ratio des deux. On voit que l'apport limité de phosphore (en vert) réduit drastiquement la croissance et l'activité de la forêt. © Katrin Fleischer et al.
De la théorie à la pratique
Voilà ce que les modèles informatiques prédisent, mais que se passe-t-il sur le terrain ? C'est ce que les scientifiques cherchent à savoir grâce à l’expérience Amazon FACE. En augmentant artificiellement le taux de CO2 sur des parcelles de forêt amazonienne, ils pourront confronter leur modèle à la réalité, déjà sombre, du « poumon vert » de notre Planète.
Un site expérimental Amazon FACE qui reproduit une forte concentration de CO2 en Amazonie. © AmazonFACE
Le 25/11/2019
Source web Par futura-sciences
Les tags en relation
Les articles en relation

Changement climatique : Et si on passait des vacances plus écolo !
A l’heure où le climat change, le tourisme, tout comme les destinations, se trouvent contraints de s’adapter aux multiples changements climatiques, voire c...

L'interdiction des HFC sauvera-t-elle la planète ?
Depuis quelques jours maintenant, la presse qualifie unanimement d’ « historique » l’accord signé à Kigali (Rwanda) par la communauté internationale en...

Les 100 milliards de la COP22 : le « bluff » du siècle ?
" L'analyse selon laquelle cette promesse [ndlr. des 100 milliards de dollars de financements] est avant tout destinée à « faire patienter » l'Afriq...

Un millier de microbes, pour la plupart inconnus, détectés dans des glaciers : la crainte de pand�
968 espèces de micro-organismes ont été découvertes piégées dans la glace au Tibet. Mais avec le réchauffement climatique, ils pourraient se libérer... ...

Lutte contre le réchauffement climatique Les maires des grandes villes de la planète se réunissen
«A Mexico, Paris et d'autres villes pionnières annonceront de nouvelles mesures de lutte contre la pollution de l'air», indique la maire de Paris, An...

Territoriales de développement, et de mettre en place les systèmes nécessaires au suivi de leur m
Le Maroc adopte une approche intégrée pour rendre ses territoires plus résilients au réchauffement climatique (El Ouafi) Le Maroc s'est engagé de ma...

Maroc : l’évaporation menace les réserves d’eau
Au Maroc, la chaleur extrême menace gravement les ressources en eau. Bien que les pluies de 2025 aient mis fin à une sécheresse de sept ans et permis un remp...

Voici les pays où le réchauffement climatique fera le plus de victimes
Une étude britannique récente montre que le réchauffement climatique n’affecte pas de la même manière toutes les zones du globe. Afin de le démontrer, l...

Antonio Guterres: «L’humanité a le choix, coopérer ou périr»
La 27e Conférence des Parties (COP) s’est ouverte lundi 7 novembre à Charm el-Cheikh (Égypte). Cette 5e COP « africaine » se tient dans un contexte inter...

Stress hydrique : comment optimiser l’utilisation de l’eau ?
De nos jours, l’eau se raréfie à cause du réchauffement climatique. En 2020, un quart de la population mondiale n’avait pas accès à l’eau et 99% de l...

Réchauffement climatique Un satellite pour cerner la végétation mondiale lancé le 1er août
Le satellite sera lancé depuis Kourou en Guyane par une fusée Vega le 1er août à 22 h 58 heure de Kourou (2 h 58 GMT, le 2 août) et les premières données...