100 milliards d’euros pour le climat en Allemagne

A la veille de la conférence de l’ONU qui s’ouvre ce week-end à New York, le gouvernement allemand a présenté hier un ambitieux plan climatique, appelé à devenir le principal projet de la législature.
Les partis de la coalition, les chrétiens et les sociaux-démocrates, auront finalement négocié toute la nuit pour trouver un compromis sur le climat, sous la pression de manifestations massives dans 575 villes d’Allemagne, un record. Le texte, présenté hier et baptisé «Programme de protection du climat 2030», vise à obtenir une réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. Le projet est d’autant plus ambitieux que l’Allemagne ne tiendra pas les objectifs climatiques pour 2020 qu’elle s’était fixés en 2007. «Le gouvernement avait promis 1 million de voitures électriques l’année prochaine, on en est loin, rappelle le quotidien Süd deutsche Zeitung. A la place, on atteindra cette année la barre du million de SUV vendus!»
La fragile coalition d’Angela Merkel, menacée d’implosion, jouait là son va-tout. Le parti social-démocrate, crédité de 14% des intentions de vote, a perdu une part importante de son électorat traditionnel au profit des Verts (27%), qui surfent sur la vague de Friday for future.
Réforme de la taxe automobile
Le texte de 130 pages présenté hier à Berlin prévoit d’investir «au moins 100 milliards d’euros d’ici à 2030» dans des mesures favorables à l’environnement et soutenant la conjoncture vacillante. «Pour les quatre premières années du plan, 54 milliards d’euros sont prévus, sans remettre en jeu le principe de l’équilibre budgétaire», précise le ministre des Finances, Olaf Scholz. Côté recettes, le gouvernement mise sur la vente de certificats d’émissions de CO2, une hausse de la taxe sur les billets d’avion, une réforme de la taxe automobile au détriment des véhicules les plus polluants et une nouvelle augmentation du péage autoroutier pour les poids lourds, en plus des réserves dégagées par les excédents budgétaires des années passées. Tout cela «offre la marge de manœuvre nécessaire», assure le ministre.
Ces recettes en partie nouvelles serviront à financer une panoplie de mesures destinées à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’énergie, le bâtiment, l’agriculture, l’industrie et surtout les transports. Berlin entend à cet effet développer les transports publics et accorder diverses subventions pour l’achat d’un véhicule électrique (jusqu’à 4000 euros pour un petit modèle, qui sera par ailleurs exempté de la taxe automobile jusqu’en 2025) ou l’installation d’un chauffage propre en remplacement des chaudières à fioul, interdites dès 2026. Parallèlement, le gouvernement veut encourager le développement des énergies renouvelables. Leur part dans la production d’électricité doit passer à 65% d’ici à 2030 au lieu de 40% à l’heure actuelle, grâce notamment au développement de l’éolien.
Le défi est considérable, d’autant plus que la dernière centrale nucléaire aura fermé en 2022, conformément à la loi adoptée en 2011 après l’accident de Fukushima, et que le pays a décidé d’abandonner le charbon d’ici à 2038. Par ailleurs, le gouvernement veut à tout prix éviter des suppressions massives d’emplois dans l’industrie automobile – 800 000 salariés à l’heure actuelle, autant chez les sous-traitants – alors que les constructeurs allemands ont pris du retard dans les voitures propres.
«Friday for future nous a tous réveillés»
Côté politique, l’équation est tout aussi complexe. Le gouvernement doit répondre aux attentes des jeunes de Friday for future et d’une partie de l’opinion urbaine, descendue une nouvelle fois dans la rue pour le climat hier. «Friday for future nous a tous réveillés», assure Olaf Scholz. Mais la coalition veut aussi éviter l’apparition d’un mouvement du type «gilets jaunes» dans les zones rurales et l’est du pays. Le parti d’extrême droite AfD, qui a fait de l’anti-climat l’un de ses chevaux de bataille, a remporté près de 25% des voix en ex-RDA au cours d’élections régionales partielles début septembre. L’une de ses revendications était l’abandon de la sortie du charbon et la fin du développement des éoliennes, accusées de détruire le paysage.
Réforme historique ou réformette? Les réactions sont mitigées en Allemagne. «Le gouvernement a raté une occasion», estime le quotidien de centre gauche Süd deutsche Zeitung, pour qui «le paquet climat n’a d’autre objectif que de permettre à la coalition de survivre». Le SPD avait menacé de quitter le gouvernement si aucun accord n’était trouvé sur le climat.
«Les ambitions climatiques d’Angela Merkel ne sont pas crédibles», estime de son côté le quotidien Taz, proche des Verts, rappelant que la chancelière a échoué avec les précédents objectifs climatiques qu’elle s’était fixés. «La protection du climat ne doit pas sauver le climat mais la coalition, ajoute de son côté le quotidien de centre droit Frankfurter Allgemeine Zeitung. La coalition a juste cherché le chemin médian entre protestations de l’extrême droite et de l’extrême gauche.»
Le 20 septembre 2019
Source web Par le temps
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