Tourisme interne : La région mise sur un tourisme à taille humaine
Une façade maritime de 400km, des dunes de sable à perte de vue, une histoire millénaire autour des ksours, du commerce caravanier et des zaouïas, un patrimoine rupestre datant de 3 000 ans… La région a tout pour plaire.
Après le dernier découpage administratif, la région de Guelmim-Oued Noun englobe désormais les provinces de Guelmim, Tan-Tan, Sidi Ifni et Assa-Zag. «Nous avons gagné 80 km de côtes supplémentaires grâce à Sidi Ifni. Ce qui porte la longueur du littoral de la région à 400 km. Mais ce capital n’est malheureusement pas utilisé», déplore Patrick Simon, vice-président du CRT de Guelmim-Es-Smara, en attendant la constitution du CRT de la nouvelle région. En effet, les deux projets balnéaires phares de la région, en l’occurrence la Plage Blanche (portés par l’égyptien Pickalbatros puis par des investisseurs espagnols pour la réalisation d’une capacité de 2 400 lits et d’un aquapark) et Oued Chbika (confié à l’égyptien Orascom et au Club Med pour un golf, une marina, 2 500 chambres et 1850 unités résidentielles, sans compter les restaurants et autres éléments accessoires) ont été pratiquement abandonnés. Les chantiers sont aujourd’hui à l’arrêt. «Ces projets qui rentrent dans le cadre de la Vision 2020 ont été, d’une part, conçus sans implication de la population. D’autre part, la crise en Europe et l’insécurité en Egypte ont contribué à leur échec», poursuit M. Simon.
La Plage Blanche tient son nom des 40 km de dunes qui la longent. La mer est poissonneuse, dangereuse et son eau froide. D’après les experts, le site ne pourrait pas rivaliser avec ses concurrents internationaux en Asie ou en Europe qui restent plus adaptés au tourisme de masse. Par contre, Sidi Ifni et Mirleft, pourvues de très belles plages, sont largement fréquentées par une population locale qui opte pour les campings et l’hôtellerie non classée. «Ces deux sites peuvent accueillir de très grandes capacités litières, mais cela nécessite une volonté des pouvoirs publics», remarque le vice-président du CRT de la région.
L’option balnéaire étant pour l’heure quelque peu écartée, Guelmim-Oued Noun se tourne vers le tourisme de niche, notamment culturel. La richesse de la région qui accueille la voie royale des oasis réside dans son patrimoine, son histoire liée à la dynastie alaouite et au commerce des caravaniers d’antan, ses zaouïas, son architecture, ses gravures rupestres (336 sites répertoriés) et son folklore (Ahouach, Gnaouas). D’autre part, les potentialités naturelles de la région offrent aux touristes la possibilité de pratiquer des sports tels que la randonnée, le VTT…
Une région méconnue par les Marocains
La région peut se targuer d’accueillir des touristes venus des quatre coins du monde (Chine, Japon, Brésil, Europe, Canada…). Ils viennent à 80% via Marrakech. Mais le CRT espère aussi développer le tourisme via les aéroports situés autour de la région. Pour ce faire, il a créé 53 circuits touristiques au départ des aéroports de Guelmim, de Tan-Tan, d’Agadir, d’Ouarzazate et d’Essaouira. «A travers ces aéroports, nous pouvons obtenir 5 à 10% de touristes supplémentaires», confie le vice-président du CRT de la région. Ces circuits sont répertoriés dans une brochure avec un code QR ou à travers le portail Sud Maroc (financé par l’ONMT et le CRT à défaut d’une contribution de la région). A noter que la connexion 3G est accessible dans tout le territoire. «Notre portail est classé 3e au Maroc sur 26 millions de portails par Alexa Amazon. Il est alimenté quotidiennement par vingt à trente sources écrites, audio et visuelles disponibles en une soixantaine de langues et élaborées par une équipe de 20 personnes. Nous sommes les seuls au Maroc à le faire. Le portail est très suivi et apprécié sur les réseaux sociaux», s’enorgueillît M. Simon. Ces circuits peuvent être utilisés par les agences de voyages ou de manière individuelle. Malheureusement, encore très peu de Marocains viennent à Guelmim-Oued Noun et ses environs par méconnaissance du territoire et de ses atouts. Pour sa part, le CRT déplore une reconnaissance de la région par l’Etat qui tarde à venir.
Maison d’hôtes et permaculture pour créer des emplois
Il est vrai que le territoire est très étendu. Il représente 20% de l’ensemble du pays. Plus ou moins 200 km séparent les principales villes du territoire. Mais les routes sont dans un bon état et les paysages qui les bordent sont magnifiques. Pour y accéder, une voie express reliera Tiznit à Laâyoune via Guelmim. La route nationale est toutefois praticable.
L’aéroport de la ville est pour sa part pratiquement achevé, après des travaux d’extension de terminal qui porteront sa capacité d’accueil totale à 700 000 passagers. L’inauguration officielle ne devrait pas tarder. «Outre la ligne reliant Guelmim à Casablanca et à Tan-Tan, nous espérons une liaison avec Agadir et les Iles Canaries vue l’importante communauté marocaine dans la région», souligne le vice-président du CRT.
Pour pouvoir répondre à une hausse des arrivées, des efforts doivent cependant être consentis en matière d’hébergement.
La capacité litière de Guelmim-Oued Noun est en effet limitée à 1 723 lits classés d’après la délégation du tourisme. Par province, Guelmim offre 888 lits, Tan-Tan 454, Sidi Ifni 361 et Assa Zag 20. «Les chiffres officiels font état de 20 000 nuitées par an. Mais d’après nos estimations, la région de Guelmim Es-Smara y compris Tata (avant le découpage administratif de 2015) a réalisé une performance de 240000 nuitées en 2015. Ce qui dénote de la présence d’énormément de sous-déclarations et de l’hôtellerie informelle», commente le CRT.
Afin d’augmenter de manière considérable la capacité litière de Guelmim et sa région, le CRT n’a de choix que d’encourager l’ouverture de nouvelles maisons d’hôtes. «Nous avons prévu la création de plusieurs milliers de lits supplémentaires à travers des maisons d’hôtes et le développement des niches de culture et de nature», déclare M. Simon.
L’emploi viendra donc du tourisme à taille humaine, mais aussi des projets de permaculture qui permettront d’assurer des revenus à une population jeune (60% de la population a moins de 26 ans) qui pâtit du chômage structurel. «Dans l’économie verte, les populations arrivent à créer des activités génératrices de revenus tels que la production, le maraîchage et les cultures. Par le biais de coopératives féminines, nous essayons également de développer les cultures florales et mellifères pour faire renaître l’abeille saharienne et par ricochet l’apiculture», note le responsable du CRT.
Patrick Simon veut que ce projet soit concrétisé à plus grande échelle sur un territoire plus grand, celui de Jbel Bani à cheval sur 3 régions (2 provinces de Draâ Tafilalet, 3 de Souss Massa et 3 de Guelmim Oued Noun). Il permettra d’unifier les actions de l’administration centrale et d’inclure les professionnels, les universitaires et la société civile dans un projet qui vise à positionner ce territoire vaste bordé par la mer mais aussi par le désert et les montagnes.
Le 09 Mai 2018
Source Web : La Vie Eco
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