Gouvernement El Othmani : Au boulot !
C’est le mercredi 5 avril, à quelques jours de l’ouverture de la session parlementaire de printemps, que la crise politico-institutionnelle la plus longue jamais vécue dans l’Histoire du Maroc moderne a pris fin.
En effet, au moment où ces lignes sont écrites, ce mercredi 5 avril donc en milieu d’après-midi, M. Saad Eddine El Othmani, chef du gouvernement, devait être reçu au Palais royal par le Roi Mohammed VI pour la validation officielle de la liste des hommes et des femmes qui composent donc cette équipe emmenée par le numéro 2 du PJD.
5 mois pour un plantage, 20 jours pour un succès
Alors que son prédécesseur M. Abdelilah Benkirane n’avait pu en plus de cinq mois arriver à un tel résultat, le Dr El Othmani a pris seulement 20 jours pour composer une majorité parlementaire et s’assurer de la participation de la majorité des formations politiques représentées à la Chambre.
Ce qui paraissait impossible à Benkirane a donc été relativement facile pour El Othmani, ce qui confirme, si besoin est, l’analyse faite dans ces colonnes depuis de longs mois, à savoir que le principal voire unique facteur de blocage entre le 10 octobre 2016 et le 17 mars 2017 était bel et bien M. Benkirane lui-même !
Mais aujourd’hui, l’écueil dépassé, c’est vers l’avant qu’il faut regarder et souhaiter que ce gouvernement, qui comporte quelques « spécificités » inusuelles, s’attèle rapidement à la tâche qui est la sienne, celle de mettre en application les lignes d’un programme qui, au demeurant, n’a pas encore été porté à la connaissance de l’opinion publique.
Et s’il faudra attendre la présentation de la déclaration gouvernementale que M. El Othmani fera incessamment devant les deux chambres du Parlement, chacun connaît chez nous les urgences, les points noirs et les défaillances aux plans économique et social notamment.
Il s’agira, entre autres, de trouver une solution pour pallier l’absence de Loi de Finances 2017, ce qui se fera d’une manière ou d’une autre, mais ce sont surtout des problématiques nodales qui devront être rapidement et sérieusement appréhendées.
L’Emploi, l’Education, la Santé, le Logement, ces arlésiennes sans cesse renouvelées, figureront en bonne place dans cet ordre du jour gouvernemental, mais, plutôt que d’égrener une liste d’actions à mener aussi longue qu’un jour sans pain, on s’attachera surtout à examiner la qualité de cette équipe à travers le prisme de la cohésion et de la cohérence politiques.
L’auberge espagnole et ses clients…
Il n’échappera à personne, en effet, que le gouvernement El Othmani ressemble, au plan de sa composition partisane, à une véritable auberge espagnole où des progressistes (USFP et PPS) côtoieront des conservateurs (PJD) et des libéraux, (RNI-UC, MP).
Il sera donc passablement intéressant d’évaluer dans quelques semaines le rythme et la qualité de la production gouvernementale alors que ses composantes ont des positions et des lignes qui ne se rejoignent pas sur nombre de questions, notamment sociétales, (égalité des genres, par exemple), mais aussi sociales (la question des retraites, de l’emploi, la décompensation du gaz butane) ou encore économiques (l’impulsion de l’investissement, national et étranger, la relance de la croissance, etc.).
Deuxième point d’une approche « analytique » de cette équipe, la problématique des rapports de force au sein même du gouvernement, sachant qu’il comprendra, outre les représentants des partis politiques, des ministres de souveraineté, (Intérieur, Affaires étrangères et Coopération, Habous et Affaires religieuses, Défense Nationale).
M. El Othmani, pour chef de gouvernement qu’il sera, aura sans doute quelque mal à imposer ses vues (celles du PJD) face à des partis qui, dans le passé le plus récent, ont montré une grande capacité de résistance aux pressions de la composante politique de l’islamisme marocain.
Car, même si le PJD peut toujours se targuer d’être le premier parti national en termes de voix et d’élus à l’issue des législatives d’octobre 2016, il pourrait vivre, au sein du gouvernement, une atmosphère de « sainte alliance » contre lui et ses idées, laquelle alliance (RNI-UC, MP et USFP) pourrait également migrer vers les Chambres parlementaires où le PAM, deuxième force par le nombre de députés, sera en embuscade et sans doute prêt à « faire le coup de feu » avec la composante libéralo-progressiste en cas de nécessité…
Voilà pourquoi et nonobstant la qualité de chaque ministre et son appartenance partisane, on peut d’ores et déjà prédire que la direction de cette équipe que l’on qualifiera aisément « d’introuvable », ne sera pas de tout repos pour M. Saad Eddine El Othmani…
Considéré comme un homme pondéré et mesuré, à l’opposé de son Benkirane de chef, il lui faudra remplacer la gouaille populiste et les bonnes blagues, par une démarche réfléchie, à la recherche permanente du consensus, afin que son parti, minoritaire au sein du gouvernement, ne paie pas chèrement sa victoire d’octobre 2016, qui, peut-être, aura été celle de Pyrrhus !
Le 05 Avril 2017
SOURCE WEB Par Int
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