MAROC Transition sexuelle
Bon, on ne va pas se mentir. Et mentir pendant le mois sacré de Ramadan est sûrement aussi grave que voler les babouches de fidèles dans une mosquée. Donc on ne va pas se mentir et admettre une bonne fois pour toutes que nous sommes en train de vivre une époque formidable ici, au Maroc.
Après la transition démocratique sur la durée de laquelle les esprits chagrins peuvent toujours pinailler, voici venu le temps de la transition sexuelle. En quelques semaines, la séquence «C’est mon corps, j’en fais ce que j’en veux, c’est mon choix » a tenté de s’installer chez nous. C’était compter sans la vigilance des gardiens du temple.
Tout a commencé avec «Much loved», le film ayant «much» énervé notre ministre de la Communication qui s’est empressé de l’interdire sans l’avoir vu. Qu’est-ce qui t’a pris Nabil de faire un film sur la prostitution ? Tu aurais pu filmer les coccinelles par exemple. C’est joli les coccinelles. Puis il y a eu les jambes de Jennifer Lopez, son déhanché, la colère du chef du gouvernement qui a tremblé pour nos valeurs morales et religieuses. Dis JLo, pourquoi tu es venue jusqu’à Rabat pour te trémousser ? T’aurais pu faire une autre scène que celle de Mawazine et du coup notre Benkirane n’aurait pas piqué une colère de chez nous.
Après il y a eu les deux Femen qui se sont embrassées torse nu sur l’esplanade de la Tour Hassan. Histoire de défendre les droits des homosexuels marocains et dont deux venaient justement de se faire condamner à 3 ans de prison ferme. Non mais de quoi je me mêle. S’embrasser devant la Tour Hassan, non mais quelle idée. Entre-temps, l’un des guitaristes de Placebo est monté sur scène avec l’inscription «489» barrée sur son torse. Ces musiciens sont fous. Ils veulent réformer notre Code pénal, abroger notre article 489 qui permet d’envoyer les non hétéros en prison. Et puis quoi encore !
Last but not least, le procès de Mohcine et Lahcen, deux jeunes poursuivis en état d’arrestation pour outrage à la pudeur et homosexualité. Heureusement qu’Al Oula était là pour les «outer» en diffusant leurs photos et identité. Ce n’est pas une époque formidable ça, avec des verrous partout et des barreaux à n’en plus finir. Quant à la tolérance, il y a des maisons pour cela. C’est clair?
22 Juin 2015
SOURCE WEB Par Narjis Reghaye Libération
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