Nour-Eddine Jalil : Les Kem Kem ont permis de donner un visage a l'un des plus grands dinosaures carnivores »
ENTRETIEN. C'est aussi dans les Kem Kem qu'on a découvert récemment les restes d'un dinosaure aquatique, faisant de ce plateau une des destinations privilégiées des paléontologues. Nour-Eddine Jalil, spécialiste de l'évolution des vertébrés, présente à Médias24 la richesse fossilifère de cette région.
250 kilometres de richesse geologique et paleontologique. C'est ce qu'offre le vaste plateau des Kem Kem, situe au sud-est du Maroc, dans la region de Draa-Tafilalet. « La ou le commun des mortels voit un joli paysage, une falaise ou un relief accidente, le sedimentologue voit defiler des millions d'années et lit l'histoire geologique qui a faconne ce paysage », nous confie Nour-Eddine Jalil. Ce spécialiste de l'evolution des vertebres est professeur depuis plus de neuf ans au Museum national d'Histoire naturelle (MNHN) à Paris, où il est également chargé de Collection.
Il nous accorde cette interview entre deux missions de terrain dont la prochaine, en pleine préparation, durera trois semaines. Ses projets de recherche sont adosses aux collections paleontologiques qu'il a constituees au Maroc et qu'il continue de gerer et d'enrichir, mais aussi a celles du MNHN.
Ayant pour objet d'etude les organismes fossiles, ses projets ne se limitent pas a la description des espèces disparues ; ils s'etendent aussi a la comprehension de la dynamique evolutive des vertebres terrestres. Le paleobiologiste cumule une experience de plus de vingt-cinq ans dans ce domaine d'expertise dans lequel il s'est engage, en 1996, en tant qu'enseignant-chercheur a la Faculte des sciences Semlalia a Marrakech.
Dans cet entretien, Nour-Eddine Jalil nous immerge dans les couches fossilifères les plus anciennes des Kem Kem. Un choix qui n'est pas anodin. Au moins 70 especes y ont ete decrites, dont certaines pour la premiere fois. C'est ce qui explique certainement pourquoi ce plateau aimante autant les scientifiques du monde entier qui viennent y mener des campagnes de fouille, dont la toute premiere a ete conduite en 1948 par le geologue francais Georges Choubert. « Ils ont, en effet, livre l'assemblage de fossiles continentaux le plus riche et le plus diversifié de leur époque ; des dizaines et des dizaines d'espèces qui nous racontent leur histoire et leur milieu de vie. Leur ecosysteme tres particulier, sans equivalent dans les ecosystèmes actuels, n'en finit pas d'intriguer les paleontologue. »
L'enseignant-chercheur souligne que l'interêt pour les faunes des Kem Kem s'explique aussi par le fait que de tous les pays où affleurent des sédiments analogues (Algerie, Tunisie, Libye, Égypte, Mali, Niger, etc.), le Maroc est le seul a offrir la stabilite politique necessaire aux travaux de terrain et a la collecte de fossiles.
- Medias24 : Pour commencer, que pouvez-vous nous dire sur la richesse des couches
fossiliferes des Kem Kem et de leur datation ?
- Nour-Eddine Jalil : Avant de parler des Kem Kem et de leurs fossiles, situons d'abord l'epoque geologique qui fut le temoin de l'histoire délivree par ces fossiles. L'histoire de la « vie apparente »> ou le « Phanerozoïque » a commencé il y a environ 541 millions d'années. Elle n'a pas connu le début de la vie sur Terre. L'origine de la vie s'enracine encore plus profondement dans les temps geologiques, mais comme son nom l'indique, le « Phanérozoïque » (ou vie apparente) correspond un peu à l'époque géologique où les traces de la vie deviennent apparentes et plus abondantes dans les sediments. C'est le moment où l'histoire de la vie commence a s'ecrire avec des lettres visibles a l'œil nu. Le Phanerozoïque se divise en trois parties : le Paleozoïque (epoque de la vie ancienne), le Mesozoïque (vie moyenne) et enfin l'epoque du Cénozoïque (vie récente) qui se prolonge jusqu'à nos jours. Le Mésozoïque est l'ère qui a vu l'apparition et l'essor des dinosaures. Elle finit par une periode geologique appelee le Crétacé. Les sédiments des Kem Kem se sont donc déposés au début du Crétacé supérieur au Cénomanien qui a duré de -100,3 a -93,9 millions d'annees. Les sediments de Kem Kem ont conserve les restes des organismes qui vivaient a l'epoque. Ce sont ces restes qui nous « racontent >> aujourd'hui leur histoire.
- Quelle place occupe aujourd'hui les couches fossilifères des Kem Kem pour les paléontologues à l'échelle mondiale ?
- Les couches fossiliferes des Kem Kem sont aujourd hui mondialement reputees pour l'abondance et la diversite des fossiles qu'elles ont livres. Elles documentent merveilleusement bien la biodiversite en milieu terrestre de leur epoque. Ils ont, en effet, livre l'assemblage de fossiles continentaux le plus riche et le plus diversifie de leur epoque ; des dizaines et des dizaines d'especes qui nous parlent de leur anatomie et nous racontent leur histoire et leur milieu de vie. Leur ecosysteme tres particulier, sans equivalent dans les ecosystemes actuels, n'en finit pas d'intriguer les paleontologues. Ces fossiles constituent aujourd'hui la réference pour étudier les peuplements continentaux du début du Cretace superieur, juste après que l'Afrique se soit separee de l'Amerique du Sud par l'Atlantique Sud naissant. L'etude des fossiles des Kem Kem, est d'un grand interet pour comprendre la biodiversité nord-africaine au début du Crétace supérieur et les consequences de la fragmentation du Gondwana (L'Afrique, l'Arabie, l'Inde, l'Amerique du Sud, l'Antarctique et l'Australie sont des blocs continentaux resultant de la dislocation, il y a environ 150 millions d'annees, d'un super continent : le Gondwana, ndlr) et la separation de l'Afrique de l'Amerique du Sud, sur l'evolution des faunes continentales.
- Sur le plan géologique, quelles sont les principales spécificités des Kem Kem, et comment cela nous permet-il d'avoir plus d'informations sur les environnements anciens ?
- L'histoire de la Vie est intimement liée à celle de la Terre. Au gré de la tectonique des plaques et de la derive des continents, des mers se forment ou, au contraire, se ferment et disparaissent. Des montagnes s'érigeaient puis disparaissaient, érodées par les sévices du temps. Ces changements géographiques et climatiques n'étaient pas sans impact sur l'évolution de la vie. En retour, la distribution des êtres vivants au cours des temps géologiques nous éclaire sur les géographies anciennes.
Les faunes des Kem Kem ne sont pas en reste sur ce volet. Au tout début du Cretace supérieur, l'Afrique et l'Amerique du Sud, qui formaient un seul et même bloc continental d'abord lie au megacontinent la Pangée, puis au Gondwana, se sont séparées par l'extension vers le sud de l'océan Atlantique. Ainsi, tels deux radeaux, les deux masses continentales africaines et sud-americaines se sont éloignées l'une de l'autre, entraînant chacune sa propre faune. L'étude des dinosaures des Kem Kem montre que ces derniers sont differents de ceux des continents du Nord (Amerique du Nord, Europe, Asie). En revanche, ils présentent des similarités avec les dinosaures sud-américains, un héritage de leur histoire gondwanienne commune (quand l'Afrique et l'Amérique du Sud faisaient partie du Gondwana).
Cette etude montre aussi que les dinosaures des Kem Kem ont leurs propres caracteristiques qu'ils ont developpees quand l'Afrique est devenue insulaire. Les sediments et les couches sedimentaires sont des livres ouverts aux yeux du geologue et du paleontologue. L'observation des sédiments a l'affleurement permet, en effet, au sedimentologue (le specialiste de l'etude des sediments) de decrypter les messages qu'ils ont enregistrés et de reconnaître les processus qui ont conduit à leur mise en place. Où le commun des mortels voit un joli paysage, une falaise ou un relief accidenté, le sedimentologue et le paleontologue voient defiler des millions d'annees et lisent l'histoire geologique qui a faconne ce paysage. La nature des sediments, leurs couleurs, leur disposition les uns par rapport aux autres, leur finesse, les elements qu'ils ont entraînes au cours de leur dépôt, renseignent le géologue sur le milieu de dépôt et permettent par consequent de reconstituer les environnements anciens (contexte glaciaire, lacustre marin profond, désert, zones inondables, etc.).
- Justement, que nous apprennent la sedimentologie et les reconstitutions
paleoenvironnementales sur la vie des especes dans les Kem Kem ?
- Par l'etude des sediments des Kem Kem, nous savons aujourd'hui qu'il y a -100,3 à -93,9 millions d'annees, cette region, comme d'ailleurs une grande partie de l'Afrique du Nord, se présentait comme de vastes plateaux parcourus par de grands fleuves et rivières qui se deversaient par de grands deltas, dans une mer situee un peu plus au nord, la mer Tethys. Les sediments des Kem Kem montrent aussi des preuves de l'existence de rares environnements a eaux stagnantes comme des mares et des etangs.
Les faunes permettent aux paleontologues de compléter ce tableau. Dans les paléoenvironnements à eaux courantes, il existe des preuves de la presence d'eau douce et saumatre. Certains dipneustes qui sont des « poissons » à respiration double (branchiale et pulmonee) preferent les habitats d'eaux douces, alors que d'autres comme des requins lamniformes preferent des eaux saumatres. Certains genres aquatiques, comme l'Onchopristis, une sorte de requin marteau, ou le coelacanthe Axelrodichthys (connu avant sous le nom Mawsonia), peuvent avoir ete adaptes aux paleoenvironnements d'eau douce et marins.
Les sédiments les plus recents, qui sont donc en haut de la serie sedimentaire, sont annonciateurs du retour de la mer (transgression dans le jargon de geologue) qui, à la fin du Cenomanien, vient recouvrir toute la region. Des sediments continentaux, on passe vers des sediments marins. Ces sediments marins visibles dans plusieurs regions du Maroc montrent l'ampleur de la montee des eaux a cette époque geologique. Alors que les sediments des Kem Kem racontent l'histoire de la vie sur le continent au Cenomanien, les sediments marins qui les coiffent racontent quand la mer est revenue dans la région, et l'histoire des animaux qui y vivaient.
- Les Kem Kem ont connu de tres nombreuses campagnes de fouilles depuis 1948.
Comment expliquer cet intérêt ?
- Les premières découvertes paléontologiques dans les Kem Kem remontent en effet à la fin des années
1940, quand le geologue francais Choubert signale en 1948 la decouverte de plaques dentaires d'un dipneuste et des ecailles de poisson. La meme annee, le paleontologue francais Rene Lavocat du Museum national d'Histoire naturelle de Paris signale la decouverte dans la meme region d'un important gisement de reptiles et « poissons >> (dents rostrales du selacien Onchopristis, des plaques dentaires de dipneuste, des dents crenelees de dinosaures carnivores et des osteodermes et des dents d'un crocodilien de grande taille) (voir aussi photo). Cette liste faunique a permis, des 1948, de rapprocher ce gisement marocain de ceux d'âge analogue de diverses régions d'Afrique du Nord (Algérie, Égypte, Niger).
L'importance de ces découvertes a conduit ce même auteur, avec l'aide du Service géologique du Maroc, à preparer quatre missions de terrain entre 1948 et 1952. Plus de 3.100 restes de vertebres ont ete collectes.
Ils sont aujourd'hui conserves au Museum national d'Histoire naturelle à Paris. Les restes de l'enigmatique sauropode Rebbachisaurus garasbae, remarquable par sa vertebre dorsale haute de 1,45 m, font partie de ce materiel. Les decouvertes paleontologiques se sont succede, confirmant le potentiel et la richesse paleontologique des « Kem Kem Beds ».
La decouverte de sites a conservation exceptionnelle et la description des restes de dinosaures vers la fin des annees 1990 et au debut des annees 2000, dont les restes de certains des plus grands dinosaures carnivores, Carcharodontosaurus saharicus et Spinosaurus aegyptiacus, ont entraîné un interet croissant pour les faunes des Kem Kem. L'abondance et la diversite des restes de vertébres justifient l'interet des paleontologues pour la region des Kem Kem. En plus du fait qu'ils permettent d'illustrer l'histoire de la biosphere en Afrique du Nord entre -11 et -93 millions d'annees, les fossiles des Kem Kem permettent d'etudier l'impact de la fragmentation du Gondwana sur l'evolution de la vie.
Cet intérêt pour les faunes des Kem Kem est certainement aussi dû au fait que de tous les pays où affleurent les sediments analogues a ceux des Kem Kem (Maroc, Algerie, Tunisie, Libye, Egypte, Mali, Niger, etc.), le Maroc est le seul a presenter une stabilite politique qui permet les travaux de terrain et la collecte de fossiles.
- Quelles sont les principales avancées scientifiques réalisées grâce aux Kem Kem ?
- Les decouvertes dans les Kem Kem ont permis de donner un « visage >> a l'un des plus grands dinosaures carnivores, le Carcharodontosaurus saharicus, ou le reptile a dents de requin du Sahara. Ce dinosaure a en effet ete nomme d'apres le genre de requin Carcharodon (le grand requin blanc) car, par leur forme triangulaire, ses dents evoquent celles d'un requin.
C'est dans les Kem Kem qu'on a aussi trouve tres recemment des restes plus complets d'un autre dinosaure geant, Spinosaurus aegyptiacus, qui ont permis de montrer que ce dernier etait un dinosaure aquatique. Il s'agit d'ailleurs du seul dinosaure non-avien avec un tel mode de vie. La decouverte de fossiles a preservation exceptionnelle a donne une importance nouvelle aux fossiles des Kem Kem. Les archives paleontologiques sont par definition incompletes et livrent le plus souvent des informations très partielles sur la biodiversité et les ecosystèmes anciens. Les gisements à préservation exceptionnelle, encore appeles Lagerstatten, constituent une exception precieuse.
Ces gisements souvent qualifies « d'instantanes a haute resolution >> sont une source d'informations inegalee sur la biodiversite passee. La reunion de conditions de fossilisation exceptionnelles leur permet de livrer des fossiles particulierement bien preserves. C'est ainsi qu'on a mis en evidence dans les Kem Kem des restes de fossiles de poissons ou est encore visible leur tube digestif, et des poissons ayant conservé des fibres musculaires qui peuvent être observées au microscope électronique. Les fossiles à preservation exceptionnelle des Kem Kem permettent de reconstituer avec precision l'anatomie et le fonctionnement des organismes, mais aussi de mieux comprendre l'organisation de leur ecosystème. Les fossiles des Kem Kem donnent l'image la plus complete des faunes terrestres au Cenomanien en Afrique du Nord.
- Y a-t-il encore des mysteres non resolus dans le cadre de la recherche paleontologique
dans cette zone ?
- Il faut trouver des restes plus complets de vegetaux qui permettront une reconstitution plus précise du paleoenvironnement. Beaucoup de dinosaures sont aussi connus par des restes fragmentaires. Des restes plus complets permettront ainsi une meilleure description de la biodiversite de l'epoque. Une question intrigue encore les paleontologues. C'est l'absence de restes de mammiferes et d'oiseaux, et ce malgre la richesse des couches fossiliferes des Kem Kem et l'ampleur des travaux de recherche entrepris. Heureux est le paleontologue qui en trouvera ...
- Les différentes fouilles ont permis de « dépoussiérer » une très riche faune de vertébrés dans les couches continentales du Crétacé, sur une très grande étendue (250 km). Peut-on avoir plus de details sur les especes qu'abritent les Kem Kem?
- Au moins 70 especes ont ete decrites dans les couches fossiliferes des Kem Kem, dont certaines pour la premiere fois. On y reconnaît plantes, insectes, crustaces, selaciens, poissons osseux, dipneustes, colacanthes, amphibiens, serpents et lezards, tortues, crocodiles, reptiles volants ou ptérosaures et dinosaures non-aviens herbivores et carnivores ... Presque tous les grands groupes de vertebres.
Cette faune se caracterise par la présence de carnivores de grande taille, dont au moins quatre dinosaures non aviaires carnivores, plusieurs pterosaures et plusieurs grands crocodyliformes. Aucun ecosystème terrestre moderne n'existe avec un tel groupement de carnivores d'aussi grande taille.
- Quand on parle des Kem Kem, certains les qualifient de « Jurassic Park >> ou encore de « l'endroit le plus dangereux de l'histoire de la Terre >. Est-ce pertinent à votre avis et pourquoi ?
- Les faunes du Kem Kem datent du Cretace. C'est l'epoque geologique qui succède au Jurassique. Le contexte geographique et les faunes du Jurassique sont très différents de ceux du Crétacé. Il est bien sur errone de qualifier les Kem Kem de « Jurassic Park >>. Ce renvoi a < Jurassic Park >> n'est certainement pas etranger au succes de la saga cinematographique americaine de six films, ni a celui des romans de Michael Crichton, Jurassic Park (1990) et Le Monde perdu (1995). Dans ces films, on presente des dinosaures geants qui ont sevi au cours du Cretace, tels que le Tyranosaurus rex en Amerique du Nord et le Spinosaurus d'Afrique ; mais ces dinosaures comme la faune des Kem Kem n'ont pas existe au Jurassique, sauf peut-etre leurs lointains «< ancetres ».
Une region ou l'on a plus de « chance > de croiser des carnivores que des herbivores et, qui plus est, des carnivores depassant les 10 m de long pour un poids superieur à 10 tonnes, est bien sur dangereuse. Mais je n'irai pas jusqu'a qualifier cette region de « l'endroit le plus dangereux de l'histoire de la Terre ».
L'ecosysteme des Kem Kem etait certainement domine par des carnivores, mais il n'etait pas plus dangereux qu'un autre écosystème.
Les vertebres de l'epoque y etaient adaptes et devaient être « armes > pour y vivre et survivre. Pour rester dans les temps géologiques, la ville côtière Chicxulub Puerto, située au nord de la peninsule du Yucatan où serait tombee la meteorite qui aurait cause l'extinction des dinosaures non-aviens et bien d'autres organismes, etait de loin un endroit plus dangereux, il y a environ 66 millions d'annees (sourire) ...
- La caracteristique la plus remarquable du paleoecosysteme des Kem Kem est ce que l'on appelle « l'enigme de Stromer », c'est-a-dire, la surabondance de dinosaures predateurs par rapport aux herbivores. Une caracteristique observee a la fois dans le groupe des Kem Kem et dans la formation de Bahariya en Egypte. Comment peut-on expliquer cette composition si particulière de l'ancien écosystème des Kem Kem ?
- La surabondance de prédateurs par rapport aux dinosaures herbivores, récemment surnommée "l'enigme de Stromer", a ete remarquee pour la premiere fois en 1936 par le paleontologue allemand Ernst Freiherr Stromer, quand il a etudie les vertébres fossiles de la formation de Bahariya en Egypte qui est du meme age que les sediments des Kem Kem.
Cette sur-représentation de dinosaures carnivores de grande taille caractérise plusieurs localités fossiliferes d'age cenomanien d'Afrique du Nord. Au moins quatre theropodes de grande taille étaient présents dans les Kem Kem : un Abelisauride, Spinosaurus aegyptiacus, Carcharodontosaurus saharicus et Deltadromeus agilis. On compte le même nombre de dinosaures carnivores de grande taille dans des sédiments contemporains en Egypte, et au moins les trois premiers sont présents dans des dépôts cenomaniens moins fossiliferes en Algerie et au Niger. Cette surabondance est d'autant plus etonnante que Spinosaurus aegyptiacus et Carcharodontosaurus saharicus sont parmi les plus grands prédateurs que la Terre n'ait jamais portes.
En plus des dinosaures carnivores, les faunes des Kem Kem comptent d'autres grands predateurs parmi les pterosaures et les crocodiles. Dans la plupart des assemblages terrestres du Mesozoïque, seuls un ou deux grands dinosaures ou mega-predateurs sont presents. C'est le cas du celebre dinosaure Tyranosaurus rex qui a domine les ecosystemes terrestres au Cretace superieur d'Amerique du Nord. En plus de la surabondance et de la grande taille des predateurs, les Kem Kem se caracterisent par le fait que les herbivores de grande taille ne sont ni ne diversifies ni abondants.
La plupart des vertebres decrits dans les Kem Kem, a l'exception de certains ptérosaures et dinosaures, vivaient exclusivement ou principalement dans un environnement aquatique, qui comprendrait un etang, une riviere, un delta et des habitats pres des rivages. La plupart des taxons sont donc des predateurs qui puisent leur nourriture du milieu aquatique, comme c'est le cas dans les reseaux trophiques marins modernes. C'est cette hypothese qui permet aujourd'hui d'expliquer la composition si particulière de l'ecosysteme ancien des Kem Kem.
Le 30/11/2023
Source web par : medias24
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