L’administration d’une 3e dose pour faciliter les voyages à l’étranger est-elle envisageable ?
La non-reconnaissance par des pays étrangers de certains vaccins administrés localement réduit la mobilité des citoyens. L'administration d'une 3e dose de vaccin anti-Covid reconnu par les pays de destination peut-elle être une solution envisageable au Maroc ? Avis d’experts.
Nombre de citoyens marocains, complètement vaccinés, sont désireux de voyager à l’étranger, principalement en France, pour affaires, pour un séjour touristique ou encore pour accompagner leurs enfants étudiants. Mais la majorité d’entre eux, vaccinés par Sinopharm, doivent justifier d’un motif impérieux ; une procédure complexe qui les dissuade d’effectuer le déplacement.
A ce jour, quatre vaccins sont autorisés en Europe par l’Agence européenne des médicaments (EMA), à savoir BioNTech et Pfizer, Moderna, AstraZeneca et Jansen. Chaque pays européen a toutefois le droit d’autoriser un vaccin ne figurant pas sur cette liste.
Au Maroc, seuls les étudiants et une minorité d’individus sont actuellement vaccinés par Pfizer. Il en est de même pour Jansen.
Or le vaccin Sinopharm, administré à la majorité des Marocains, n’est toujours pas reconnu par l’EMA ni par plusieurs pays d’Europe, dont la France.
Les citoyens marocains vaccinés par Sinopharm doivent de ce fait respecter les mêmes conditions d’accès au territoire français que les non-vaccinés, à savoir :
- justifier d’un motif impérieux ;
- présenter un test PCR négatif ou antigénique de moins de 48 heures ;
- effectuer systématiquement un test antigénique à l’arrivée ;
- respecter une quarantaine obligatoire de 10 jours, à l’issue de laquelle un test PCR doit être effectué.
L’Union européenne a annoncé, il y a quelques jours, accepter le pass vaccinal marocain, sans toutefois changer les conditions d’accès à son territoire. Si les Marocains ayant reçu Sinopharm peuvent entrer en Espagne en présentant simplement le QR Code de leur pass de vaccination, les conditions ci-dessus sont maintenues pour entrer en France.
Pour faire face à cette problématique, certains pays, notamment la province du Québec au Canada, ont décidé de permettre, exceptionnellement, aux personnes dont les deux doses ne sont pas reconnues par les pays où ils souhaitent se rendre, d’obtenir une troisième dose de vaccin à ARNm contre la Covid-19. Cette dose est administrée à la demande de l’intéressé pour pouvoir voyager. Le Maroc peut-il envisager une telle solution pour mettre fin à cette polémique ?
Des experts contre l’administration d’une troisième dose pour voyager
Deux experts, joints par nos soins, s’opposent à l’idée d’injecter une troisième dose, dans le seul but de permettre aux citoyens de voyager dans un pays qui ne reconnaît pas les vaccins administrés au Maroc. Ceux-ci procurent, selon eux, une protection suffisante. L’idée d’une troisième dose est envisageable pour les gens âgées ou atteints de maladies chroniques, ainsi que pour le personnel de santé. Il s’agit d’une dose de rappel pour les protéger davantage contre les nouveaux variants.
Dr Tayeb Hamdi, médecin, chercheur en politiques et systèmes de santé, est catégorique : « On ne vaccine pas pour obtenir un pass d’entrée dans d’autres pays. La vaccination est un acte médical, qui n’a rien à voir avec les conditions d’accès aux différents territoires. C’est un acte qui ne peut être fait que s’il présente un intérêt pour la santé de l’individu ou celle de la population. »
« Il n’y a donc pas lieu de permettre l’administration d’une troisième dose, pour une autre raison que médicale », ajoute-t-il, notant que « cette troisième dose s’impose plutôt pour la catégorie âgée de 65 ans et plus, et pour les personnes atteintes de maladies chroniques, indépendamment de leur âge. Ils en ont besoin incessamment. »
Pour cette dernière catégorie, Dr Tayeb se dit en faveur de la diversification des vaccins, « puisqu’en mixant deux vaccins différents, l’efficacité peut être multipliée par six. Une étude récente a démontré que recevoir un vaccin AstraZeneca et une autre dose de Pfizer peut s’avérer plus efficace qu’en effectuant deux doses du même vaccin ».
« Pour le point relatif au voyage, l’intérêt pour nous actuellement est de protéger la population. D’autre part, une telle pratique n’est pas éthique. C’est contre le principe de la médecine. On ne vaccine un corps humain que lorsqu’il y a un intérêt à le faire, et sans risque pour l’intéressé. »
Un autre expert, membre du Comité scientifique, se montre du même avis: « On ne peut pas administrer aux citoyens une troisième dose rien que pouvoir voyager, ou pour faire plaisir à certains pays qui n’autorisent pas les vaccins administrés au Maroc. »
Selon lui, le fait que l’Union européenne accepte le pass vaccinal marocain est une première étape, même si elle n’est actuellement que purement procédurale et technique. « A présent, c’est à la diplomatie marocaine de faire en sorte que le pass vaccinal marocain soit accepté de la même manière dans toute l’Europe. »
SOURCE WEB PAR Médias 24
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