Assises nationales sur la fiscalité L’agriculture pourait passer à la caisse Les op&
Les opérateurs agricoles ont eu du mal à faire valoir le droit à la reconduction de l’exonération fiscale, qui expire à la fin de cette année. D’une manière générale, c’est tout le système des exonérations qui serait remis en question, alors que l’impôt sur la fortune serait improbable.
Environ 80% des petits agriculteurs ne sont pas concernés par le principe d’imposition.
Faut-il assujettir l’agriculture enfin à l’impôt après près de 30 ans d’exonération ? Est-il opportun d’instituer un impôt sur la fortune ou sur le capital ? Quelle solution pour l’épineuse équation des exonérations fiscales dont bénéficient certains secteurs et qui engloutit des dizaines de milliards de dirhams sans une évaluation de l’impact de ces faveurs fiscales ? En un mot, comment établir une équité fiscale ? Le premier débat dans le cadre des Assises nationales sur la fiscalité, dont les travaux ont été clôturés hier au Centre international de conférences de Skhirat, après deux jours d’intenses débats, a été très animé. Surtout que le panel des intervenants a été varié, avec des universitaires et experts, des parlementaires, des responsables administratifs, des opérateurs. Et c’est au sujet de l’imposition de l’agriculture que le débat a été plus animé, même s’il a perdu d’intensité par rapport au passé, comme l’a relevé Najib Akesbi. En fait, cet économiste spécialiste de l’économie rurale a noté avec satisfaction que certes les opérateurs du secteur agricole essaient toujours de s’accrocher à l’exonération fiscale dont ils bénéficiaient jusque-là, mais leurs réactions quand celle-ci est remise en question ne sont plus aussi vives. Ce profil plutôt bas est bien perceptible lors de ces assises, au cours desquelles ces agriculteurs ont eu du mal à faire entendre leur voix, déplorant d’ailleurs de ne pas être associés à la préparation de cet évènement. Ils ont été en fait esseulés, aucun intervenant n’ayant partagé leur avis de prolonger encore une fois cette exonération. Même le représentant du ministère de l’Économie et des Finances, en l’occurrence Mohamed Chafiki, directeur des Études et des prévisions financières, n’est pas convaincu par les arguments des opérateurs agricoles qui évoquent notamment la nécessité de laisser le temps au Plan Maroc vert, qui a pour échéance l’année 2020 et de ne pas perturber sa mise en œuvre par l’imposition du secteur. Pour M. Chafiki, l’approche adoptée pour la mise en œuvre de ce plan sectoriel est l’appui ciblé pour les chaines de valeur, pour des filières agricoles qu’on veut développer. D’ailleurs, il n’y a pas que la fiscalité pour développer un secteur, a-t-il fait remarquer, avant de lancer, en guise de conclusion, à qui veut l’entendre, qu’il faut considérer le secteur agricole comme «un bien commun» et éviter d’adopter des «visions corporatistes». L’argument des opposants à cette reconduction de l’exonération de l’agriculture, qui expire à la fin de cette année, est que celle-ci profite d’une manière indifférenciée à tous les opérateurs agricoles sans prise en compte de leur taille ou de leur capacité contributive. Mieux encore, M. Akesbi a relevé que près de 80% des petits agriculteurs ne sont pas du tout concernés par l’impôt, puisqu’ils n’atteignent pas le seuil de bénéfices imposable. De même, balayant d’un revers de la main l’argument évoquant les aléas et les risques (sécheresse, inondations…) qui guettent l’agriculture, le conférencier a fait savoir que le droit commun donne la possibilité à l’agriculteur de ne rien payer au Fisc s’il n’a rien gagné. Il faudra donc, d’après Abdelali Benamour, président du Conseil de la concurrence, aider autrement ces petits agriculteurs à se développer.
À part cela, tout ce qu’on peut faire pour l’agriculture sur le plan fiscal est, d’après M. Benamour, d’accompagner les champions nationaux qui pourront tirer leur secteur et être performants à l’export, comme le font d’autres pays.
Mais là, l’agriculture n’est pas le seul secteur concerné.
Les exonérations fiscales à revoir en profondeur
D’après plusieurs intervenants, il est largement temps d’en finir avec le système actuel des exonérations fiscales. En fait, déplore-t-on, plusieurs secteurs en bénéficient pour une durée indéfinie, sans objectifs précis. Même M. Chafiki a reconnu ce «travers», qui consiste à concéder des exonérations atemporelles et sans une évaluation pour mesurer leurs effets. Que faire alors ? La solution devra porter, d’après tous les intervenants, sur la contractualisation entre l’État et les professionnels du secteur concerné sur des objectifs précis et mesurables à une échéance fixe. Et pour cause. «Pas de réforme fiscale sans une refonte du système des exonérations», conclut M. Chafiki.
- Plusieurs intervenants ont appelé à instaurer l’impôt sur la fortune pour faire contribuer davantage les riches, surtout en ces temps difficiles pour les Finances publiques.
- D’une manière plus nuancée, certains évoquent l’imposition du capital non productif, sans toucher à l’outil de production.
- Pour d’autres, il ne faut pas taxer la fortune, mais son origine, en l’occurrence les revenus. Ils demandent aussi la restitution par les riches des subventions dont ils bénéficient dans le cadre de la Caisse de compensation.
- Les exonérations fiscales ont constitué un manque à gagner de plus de 36 milliards de DH pour le Budget de l’État en 2012.
Publié le : 30 Avril 2013 –
SOURCE WEB Par Lahcen Oudoud, LE MATIN Tags : exonérations fiscales- équité fiscale- Assises nationales sur la fiscalité- l’imposition de l’agriculture- Abdelali Benamour, président du Conseil de la concurrence- l’impôt sur la fortune- l’imposition du capital non productif-